"Il paraît, soldat, que tu l'as bien mérité, ta retraite.
Alors, plutôt que de t'ennuyer dans cet établissement pour vétérans, raconte-nous quelques-uns de tes souvenirs, les plus héroïques, les plus saignants ou les plus cocasses.
Raconte-nous, toi qui, si souvent, as été désigné volontaire d'office.
Raconte-nous cette guerre éternelle, cette guerre semblable à toutes les autres, Sécession, Grande Guerre, 39-45, Vietnam ou Bosnie.
Oui, raconte-nous la folie des hommes."
Pierre Stolze a obtenu le prix Rosny-Aîné de la Science-Fiction avec "Cent mille images" (Éditions Philippe Olivier).
Il est l'auteur de nombreux romans et nouvelles qui ont été traduits en Allemagne, Bulgarie, Italie et Roumanie.
1 - L'Anneau, pages 5 à 18, nouvelle 2 - La Cache, pages 19 à 43, nouvelle 3 - Le Bourreau, pages 45 à 58, nouvelle 4 - Les Jambes, pages 59 à 70, nouvelle 5 - Le Camp, pages 71 à 93, nouvelle 6 - La Tête, pages 95 à 132, nouvelle 7 - Le Têtard, pages 133 à 142, nouvelle 8 - Les Mutins, pages 143 à 158, nouvelle 9 - L'Apparition, pages 159 à 174, nouvelle 10 - La Vache, pages 175 à 187, nouvelle 11 - La Ville, pages 189 à 212, nouvelle
Critiques
Étonnant Pierre Stolze ! Lui qui défend de façon provocatrice la thèse selon laquelle « il n'y a pas d'idée dans un texte de SF » (lire La Science-Fiction : littérature d'images et non d'idées, in Les Univers de la science-fiction, éd. Galaxiales, 1998) semble avoir rarement réussi à la démontrer aussi brillamment qu'avec Volontaire désigné. Ce recueil de nouvelles (mal) déguisé en roman 1 — un narrateur, partie prenante des divers épisodes racontés, sert de fil rouge à onze brefs récits — relève-t-il en fait de la SF ? On peut à bon droit se poser la question et, à quelques détails près qui inscrivent le récit dans une sorte de futur légèrement décalé ou d'univers à peine parallèle, on pourrait avoir l'impression d'avoir entre les mains un ouvrage de pure littérature générale. Car les métaphores du monde où nous vivons sont transparentes, tout particulièrement en ce qui concerne La Ville, qui clôt le volume sur un hommage grinçant à la Bosnie : « C'est beau Gradlinza, la nuit : des incendies qui n'en finissaient pas de mourir, des projecteurs fouaillant des terrains vagues devenus no man's land, des fusées éclairantes tirées par des guetteurs trop nerveux, des feux follets folâtrant au-dessus de la terre grasse des cimetières... ».
Paradoxalement, c'est au moment où l'actualité fait irruption avec le plus de force que la SF réinvestit le texte pour un final nageant dans une paranoïa teintée de X-Files et offrant au lecteur une happy end aussi jouissivement revancharde (les méchants sont punis) qu'improbable. Pouvoir de la littérature par rapport au réel !
On l'aura compris : nous avons des doutes sur le projet esthétique qui fonde l'œuvre de Stolze. Comment alors expliquer que nous aimons singulièrement ses livres ? Si ses conceptions dominaient la SF française, elles l'entraîneraient sans doute dans une impasse. Mais nous serions navré qu'une voix aussi originale soit étouffée par une norme, une sorte de « narrativement correct » qui pourrait bien se faire trop pesant. On ne saurait donc trop féliciter les éditions Hors Commerce, dirigées par de vrais passionnés, de donner à Pierre Stolze le moyen de continuer à faire lire sa SF. Elle le mérite.
Notes :
1. Ce livre est la réédition augmentée d'un ouvrage à tirage limité paru en 1995 aux éditions U.P.N.T.