« Le Système D est un élégant hommage aussi bien aux dystopies de Philip K. Dick qu'au cycle de Harlem de Chester Himes. » Megan Abbott.
Dévastée par une série d'attentats et une supergrippe, New York tarde à lancer sa « Grande Reconstruction ». Plus d'électricité hormis pour quelques privilégiés, pénurie généralisée de nourriture, d'eau, d'essence... Les habitants ont fui pour la plupart.
Dewey Décimal, lui, est resté. Amnésique, paranoïaque et hypocondriaque, ce dur à cuire vit dans la bibliothèque municipale de New York — d'où son surnom. Il est aussi chargé par le procureur de la ville de missions aussi diverses que mystérieuses. La dernière en date : retrouver et supprimer un Ukrainien peu recommandable. Pour accomplir sa tâche, Dewey Décimal est armé de son Beretta, de son flacon de Purell® et surtout de son Système...
Rythmé comme un blockbuster, peuplé de gangsters, de membres du FBI et de tueurs à gages, Le Système D ne laisse pas une minute de répit au lecteur.
Critiques
S'il emprunte davantage au roman policier qu'à tout autre genre, Le Système D, de Nathan Larson, appartient bien aux genres de l'imaginaire, de par son décor. Nous nous trouvons en effet à New York, quelques mois après de tragiques événements qui se sont produits le jour de la Saint-Valentin. Une série d'attentats se sont abattus sur la métropole américaine, en même temps qu'une grippe extrêmement meurtrière frappait la ville. Ajoutez à cela un krach boursier et vous aurez une idée de l'environnement dans lequel vont évoluer les protagonistes de cette histoire. Au premier lieu desquels Dewey Decimal (il s'agit d'un surnom, car il est amnésique), homme à tout faire du nouveau procureur de la ville, qui vit dans la bibliothèque municipale, à présent désertée. Sa mission, quand le roman commence, est de se débarrasser du leader des Ukrainiens, jugé trop gênant pour les affaires dudit procureur. Dewey tente bien d'intimider Shapsko, mais comme celui-ci est un dur à cuire, il essaie un autre moyen : s'en prendre à sa femme, Iveta. Et l'histoire se transforme alors totalement... car Decimal va se rendre compte peu à peu que tout n'est que faux-semblants dans cette affaire, que les motivations officielles des agissements des uns et des autres sont bien éloignées des officieuses, et que les personnages sont rarement ce qu'ils prétendent être. Difficile de s'y retrouver donc pour le pauvre Dewey, qui part déjà avec un sérieux handicap.
Car Dewey, et c'est là la principale caractéristique de ce roman (avec son cadre, donc), est un homme bien particulier. Complètement hypocondriaque, il craint tout contact, que ce soit avec d'autres êtres humains qu'avec tout objet, selon lui véhicule potentiel de nombreuses maladies. Aussi sa vie est-elle régie par ce qu'il appelle le Système, à savoir une série de codes comportementaux censés le prémunir de toute contraction de telle ou telle infection. Il se lave en permanence les mains au Purell®, il porte des gants, il décide de n'aller qu'à gauche le matin et à droite l'après-midi, il alterne lignes de métro numérotées paires et impaires... bref, un sacré loustic. Qui foire régulièrement ses coups, ce qui nous donne un roman particulièrement sarcastique, où l'on ne sait jamais si Dewey se montrera réellement à la hauteur des taches qui lui sont confiées. Et qui s'entortillent peu à peu en un imbroglio invraisemblable, où il lui faudra du courage pour s'en sortir.
Une écriture très visuelle, un rythme soutenu, une ironie mordante, une mégapole quasiment vidée de tous ses habitants, et par-dessus tout un personnage principal particulièrement travaillé (y compris dans ses côtés sombres, car il en a aussi, on est quand même sur du polar new-yorkais), bref tout concourt à faire de ce, du nouveau venu Nathan Larson – il s'agit de son premier roman – une très jolie découverte.