George LANGELAAN Première parution : Paris, France : Robert Laffont, mars 1962
Illustration de (non mentionné)
Robert LAFFONT
(Paris, France) Dépôt légal : 1962, Achevé d'imprimer : 10 mars 1962 Retirage Recueil de nouvelles, 424 pages, catégorie / prix : 15,45 F T.L.I. ISBN : néant Format : 13,5 x 20,0 cm✅ Genre : Science-Fiction
Livre réédité en numérique par les éditions FeniXX (pdf : 9782402640718) dans le cadre du programme dit des « Livres indisponibles ».
« L'histoire la plus célèbre du présent recueil, c'est La Mouche, que beaucoup de critiques ont qualifiée à juste titre de la nouvelle la plus terrifiante écrite au XXesiècle »...
« Les autres nouvelles du recueil valent largement La Mouche. On y retrouve un motif commun : le temps et ses mystères. H. P. Lovecraft avait écrit que le combat contre le temps est le seul digne d'un romancier.
« Nous ne savons que bien peu de choses du temps. Celui-ci n'est pas le même pour un objet en mouvement que pour un objet immobile. Le temps physiologique n'est pas le même que le temps des horloges. La nouvelle relativité de Milne et de Haldane fait une distinction entre le temps cinématique et le temps dynamique.
« Les récits de science-fiction ayant le temps comme sujet ne manquent pas, mais ceux de Langelaan sont tout particulièrement originaux, probablement parce qu'ils sont tirés d'une expérience intérieure. Il y a beaucoup à apprendre de la vraie fiction, a-t-on écrit. C'est particulièrement vrai pour les récits de Langelaan. »
JACQUES BERGIER
1 - Jacques BERGIER, Préface, pages 7 à 8, préface 2 - Le Miracle, pages 9 à 31, nouvelle 3 - Chute dans l'oubli, pages 33 à 50, nouvelle 4 - La Mouche (The Fly, 1957), pages 51 à 94, nouvelle 5 - La Dame d'outre-nulle part, pages 95 à 128, nouvelle 6 - Récession, pages 129 à 151, nouvelle 7 - Le Tigre récalcitrant, pages 153 à 167, nouvelle 8 - L'Autre main, pages 169 à 195, nouvelle 9 - Temps mort, pages 197 à 266, nouvelle 10 - La Tournée du diable, pages 267 à 284, nouvelle 11 - De fauteuil en déduction, pages 285 à 296, nouvelle 12 - La Dernière traversée, pages 297 à 311, nouvelle 13 - Robots pensants, pages 313 à 366, nouvelle 14 - Sortie de secours, pages 367 à 421, nouvelle
Un peu oublié aujourd’hui, l’auteur franco-britannique George Langelaan, à la biographie rocambolesque, a pourtant son titre de gloire SF : « La Mouche », nouvelle à l’origine des films que vous savez. Mais il avait écrit d’autres récits d’Imaginaire, entre science-fiction et fantastique, qui furent rassemblés en 1962 chez Robert Laffont dans le recueil Nouvelles de l’Anti-Monde, aujourd’hui réédité par l’Arbre Vengeur.
Ces treize récits constituent un ensemble varié, même si certains thèmes (le temps, les radiations, les expériences scientifiques qui tournent mal) ou procédés (la chute, le rapport livrant l’explication du mystère après coup, l’apparence de récit policier) sont récurrents. S’il faut jouer le jeu des références, on a pu avancer que les récits de George Langelaan évoquaient ceux d’un Richard Matheson, et ils témoignent en tout cas d’un art de la narration consommé, même si pas sans failles.
Ces nouvelles étaient sans doute remarquablement inventives à l’époque — on le sent, et cela peut contribuer à expliquer leur postérité cinématographique, dans le cas de « La Mouche » et de quelques autres (relevons aussi le caractère étonnamment graphique de certaines histoires). Mais, pour le coup, le temps a peut-être joué un mauvais tour à l’auteur, et un lecteur de SF contemporain ne sera que bien rarement surpris par des récits qui étaient régulièrement conçus pour surprendre. Rien de dramatique, cela dit, et si le recueil a quelque chose d’un peu suranné, ça n’est au fond pas désagréable.
Un aspect un peu plus gênant de ce nécessaire vieillissement doit cependant être noté. Dans les récits les plus amples, l’auteur tend à dilater l’intrigue en retardant artificiellement la compréhension qu’a le narrateur des phénomènes qu’il vit : le cas le plus flagrant est « Temps mort », une nouvelle fascinante par ailleurs, et conçue avec une grande attention aux détails, où le héros se retrouve dans un Paris qui vit beaucoup, beaucoup plus lentement que lui… Le texte est bon, voire mieux que ça, mais on en voit arriver la fin avec un certain soulagement. Ce problème n’est pas systématique : « La Mouche », texte d’une veine assez comparable, est une réussite de la première à la dernière ligne, où le mystère et l’explication sont bien mieux dosés ; mais des textes comme « Robots pensants », sur la base d’un automate joueur d’échecs, ou « Sortie de secours », thriller baignant dans les souvenirs de la Résistance, moins convaincants, pâtissent davantage de cet écueil.
Sur des formats plus concis, d’autres nouvelles sont bien dignes d’être notées, comme « La Dame d’Outre-Nulle part », qui, au-delà de sa dimension de romance par écran interposé, repose sur un postulat très original et porteur d’une certaine angoisse, ou encore « L’Autre main », qui joue impeccablement d’une trame bien autrement convenue (la main qui n’obéit plus et qui prend l’initiative d’actes criminels).
Le reste est probablement un petit cran en dessous, mais jamais mauvais, qu’il s’agisse de nouvelles en formes de blagues (« Le Miracle » en tête) ou de choses plus « sérieuses » (très belle ambiance, par exemple, dans « La Dernière Traversée »), avec nombre de degrés intermédiaires (« La Tournée du Diable »).
Ces Nouvelles de l’Anti-Monde ont pris un coup de vieux, mais qui ne leur a pas été fatal. Même suranné, ou parce que suranné, le recueil demeure une lecture intéressante, riche d’idées fortes et qu’on devine avoir été alors d’une inventivité remarquable. « La Mouche » en témoigne, mais d’autres nouvelles tout autant, et l’auteur mérite bien qu’on ne l’oublie pas.
Bertrand BONNET Première parution : 1/7/2018 Bifrost 91 Mise en ligne le : 7/5/2023