L'homme au gilet rouge, qui fit tant de bruit à la bataille d'Hernani, aimait beaucoup le travail bien fait, et son travail était d'écrire des livres. Parmi ceux qu'il nous a laissés, le roman de la momie occupe une place à part, car il invente le roman archéologique — et surtout une forme de récit où la précision de la description compte d'avantage que l'anecdote.
Les amours de Tahoser, Égyptienne de l'époque de Moïse, en sont en effet qu'un prétexte à reconstitution à partir des documents de l'archéologie égyptienne. On traite cette entreprise de romantique, mais ce n'est pas exact, car Théophile Gautier porte visiblement moins d'intérêt à ses personnages et à leur passion qu'au décor — et le décor, inspiré des peintures égyptiennes, il le décrit avec la précision de qui cherche un effet de l'art, et non du romanesque. Par là, Théophile Gautier apparaît comme l'inspirateur d'un formalisme, dont le chef d'œuvre allait être, quatre ans plus tard, en 1862, la Salammbô de Gustave Flaubert.