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Quitter les monts d'automne

Émilie QUERBALEC

Première parution : Paris, France : Albin Michel, collection Albin Michel Imaginaire, 3 septembre 2020

Illustration de MANCHU

ALBIN MICHEL (Paris, France), coll. Albin Michel Imaginaire précédent dans la collection suivant dans la collection
Date de parution : 3 septembre 2020
Dépôt légal : septembre 2020, Achevé d'imprimer : août 2020
Première édition
Roman, 448 pages, catégorie / prix : 21,90 €
ISBN : 978-2-226-45193-4
Format : 14,0 x 20,5 cm
Genre : Science-Fiction


Quatrième de couverture

Recueillie par sa grand-mère après la mort de ses parents, la jeune Kaori vit dans les monts d’Automne où elle se destine à être conteuse. Sur Tasai, comme partout dans les mondes du Flux, l’écriture est interdite. Seule la tradition du « Dit » fait vivre la mémoire de l’humanité. Mais le Dit se refuse à Kaori et la jeune fi lle se voit dirigée vers une carrière de danseuse.
Lorsque sa grand-mère meurt, Kaori hérite d’un rouleau de calligraphie, objet tabou par excellence, dont la seule détention pourrait lui valoir une condamnation à mort. Pour percer les secrets de cet objet, mais aussi le mystère qui entoure la disparition de ses parents, elle devra quitter les monts d’Automne et rejoindre la capitale.
Sa quête de vérité la mènera encore plus loin, très loin de chez elle.

Débutant comme un roman initiatique d’inspiration japonaise, Quitter les monts d’Automne s’impose vite comme un récit d’aventure qui frappe d’abord par sa beauté et sa poésie, puis par sa cruauté et son érotisme subtil.

ÉMILIE QUERBALEC est née au Japon. Quitter les monts d’Automne est son deuxième roman. Le précédent, Les Oubliés d’Ushtâr (Nats éditions), a été finaliste du prix Rosny aîné.

Critiques

La grande originalité de Quitter les monts d'automne réside dans le cadre où se déroule la première moitié du roman, une planète maintenue dans un état archaïque qui évoque le Japon pré-industriel. Kaori, la narratrice, elle-même élevée dans cette culture pétrie de traditions et de conservatisme, nous raconte sa jeunesse. Le récit devient roman d'initiation tandis qu'elle découvre au-delà de son monde une société intergalactique soumise à la dictature du Flux et qu'elle part à la recherche de ses origines.

En cohérence avec ce personnage qui semble sorti de la cour impériale de Kyoto, le rythme est lent, l'écriture est élégante et subtile. L'amateur de péripéties haletantes, voire de "récit d'aventure" (comme l'annonce curieusement la quatrième de couverture) en sera pour ses frais : il ne se passe pas grand-chose et on peut, selon ses goûts, apprécier les descriptions poétiques de la vie sur la planète Tasai ou trouver que le texte souffre de quelques longueurs.
Arrivé à la moitié du roman, on part dans l'espace en compagnie de l'héroïne. Le cadre devient beaucoup plus familier pour les amateurs de space-opera, cependant le rythme demeure lent, rompant avec les modèles du genre. L'univers créé par Émilie Querbalec est relativement classique mais il est intéressant et sa description à travers les yeux de Kaori ne manque ni de charme ni, parfois, d'ironie.
Sur le fond, le roman traite de la mémoire, tant individuelle (Kaori et ses amnésies post-traumatiques) que collective (l'Humanité toute entière qui a essaimé dans de multiples galaxies mais reste privée de l'écriture et soumise au mystérieux Flux pour raconter son histoire).

Quitter les monts d'automne est, au final, un roman qui pourra agacer par sa lenteur et la passivité de son personnage principal, mais qui recèle quelques atouts, au premier chef son écriture et le cadre original qu'offre la planète Tasai.

 

Jean-François SEIGNOL (lui écrire)
Première parution : 13/3/2021 nooSFere


     Dans un lointain futur, l’humanité a essaimé sur de nombreux mondes, ainsi Tasai, dont la culture préindustrielle est clairement inspirée du Japon du Dit du Genji. Sous la lointaine houlette du Flux, concept nébuleux qui apparaît religieux quand on y devine, de l’extérieur, une dimension technologique, Tasai prise d’autant plus le « Dit » que l’écriture y est interdite et passible de mort ; mais il y a donc les conteurs, ces gens qui ont connu l’expérience mystique du Ravissement – dès lors à même de conter ce qui ne peut pas être lu, en plongeant dans une sorte de transe. Mais tout le monde n’a pas accès au Dit : la narratrice, Kaori, a beau être fille et petite-fille de conteuses, il se refuse à elle – aussi doit-elle se contenter de danser sur les récits des autres.

    À la mort de sa grand-mère, pourtant, elle hérite d’un bien singulier trésor : un rouleau calligraphié, dont la simple possession est criminelle. Kaori, intriguée autant qu’effrayée par l’objet, mais tout autant curieuse de savoir d’où elle vient pour savoir qui elle est, doit quitter les Monts d’Automne pour en apprendre davantage. Son périple, sur Tasai même, lui fait envisager un monde bien différent de celui qu’elle a toujours connu — mais elle voyagera à terme bien plus loin, quittant Tasai pour naviguer au sein du Flux et contre lui, et en définitive remonter à sa source : il y faudra des années-lumière de distance, et des siècles d’errance…

    Quitter les Monts d’Automne débute comme un roman initiatique assez commun – le cadre japonisant ne lui conférant pas tant de singularité que cela, même s’il n’est pas sans élégance. Dans le meilleur des cas, Émilie Querbalec chasse ici sur les terres d’Ursula K. Le Guin, et non sans habileté. Cette référence vaut sans doute aussi pour la suite, dans la confrontation du caractère « primitif » de Tasai et de Kaori avec la réalité autrement technologique des mondes du Flux – même si ce dernier apparaît bien plus menaçant que l’Ekumen…

    C’est bien ce décalage qui fait la saveur du roman – et de la sorte la dimension initiatique du récit se mue, insidieusement d’abord, puis plus brutalement, en une prise de conscience quant à la nature de l’univers qui dépasse et sublime la seule quête d’identité. Mais en des termes communs ? L’expérience vécue par Kaori, si elle évoque aux lecteurs de SF la démesure intimidante et fascinante du sense of wonder, ce vertige si désirable, revêt pour elle quelque chose qui tient de la magie. Cette naïveté participe de son charme – et si l’on a pu critiquer le caractère passif de « l’héroïne » une fois Tasai abandonnée, on avouera que cela nous préserve des fâcheuses lourdeurs si communes dans les récits où figure un(e) élu(e).

    Il s’agit bien d’un pur roman de science-fiction, du début à la fin – le caractère en apparence « primitif » de Tasai ne suffit certes pas à lui conférer les atours de la fantasy. Si Quitter les Monts d’Automne donne parfois l’impression de jongler entre les genres, c’est plutôt au travers d’une trame globale qui peut paraître décousue par moments – notamment lors des étapes intermédiaires du voyage spatial, quand une sorte de thriller en huis-clos se met en place. En même temps, ce caractère s’avère pertinent, quand on le lit au prisme de la dilatation spatiale et temporelle qui caractérise la deuxième moitié du roman. Et si le point final a sans doute, comme le point de départ, quelque chose de convenu, peu importe : c’est le voyage qui compte – et il est fascinant.

    La plume d’Émilie Querbalec y est pour quelque chose : sans en faire trop, elle sonne juste – et parvient régulièrement à exprimer une sobriété élégante tout à fait à propos. En d’autres occasions, la justesse et la sobriété s’associent pour exprimer la douleur de Kaori avec un impact certain, qu’il s’agisse d’une mélancolie sourde s’inscrivant dans la durée, ou de la brutalité insoutenable d’une très rude scène de viol. Au-delà, cependant, il y a donc ce vertige des grands nombres, suscité et entretenu avec beaucoup d’habileté.

    Quitter les Monts d’Automne n’est sans doute pas un roman parfait, mais il fonctionne remarquablement bien, surtout en ce qu’il dépasse le caractère un brin bateau de l’exposition pour convier le lecteur à participer, au côté de Kaori, à une fascinante et surprenante odyssée de l’espace, qui est en même temps, comme de juste, une aventure personnelle.

Bertrand BONNET
Première parution : 1/1/2021 dans Bifrost 101
Mise en ligne le : 21/6/2024

Prix obtenus
Rosny aîné, Roman, 2021


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