Joseph O'NEILL Titre original : Land under England, 1935 Première parution : Angleterre, Londres : Gollancz, février 1935 / États-Unis, New York : Simon & Schuster, 1935 ISFDB Traduction de Jacques GANS Illustration de Greg VEZON
L'ARBRE VENGEUR
(Talence, France) Date de parution : 3 juin 2022 Dépôt légal : 2ème trimestre 2022 Réédition Roman, 426 pages, catégorie / prix : 19,50 € ISBN : 978-2-37941-196-0 Format : 12,5 x 18,0 cm✅ Genre : Science-Fiction
Pour retrouver son père qui a disparu dans les entrailles de la terre à la recherche d'une civilisation perdue, le héros de l'incroyable périple qui nous est conté ici va, à son tour, plonger dans l'inconnu. Quel n'est pas son effarement, après avoir affronté d'immondes créatures, de découvrir qu'une civilisation, héritière des Romains, s'est développée sous l'Angleterre ! Dans ce monde de ténèbres angoissantes, les hommes ont réussi à perdurer, mais à quel prix : soumis à une terreur permanente, ils vivent, comme hypnotisés et sans jamais prononcer un mot, dans le contrôle permanent d'une élite qui leur dénie vie sociale, intellectuelle et affective.
Fresque vivante et palpitante, récit galvanisant sur le combat d'un homme qui refuse de se soumettre à la dictature, La terre sous l'Angleterre, classique du récit en terres creuses, est aussi, sous ses allures de dystopie inquiétante, une ode majeure à la liberté : un roman qui allie le charme de l'aventure et de descriptions incroyables à un engagement contre toute forme d'embrigadement. C'est dire s'il reste d'actualité...
1 - Guy COSTES, Land Under England, Le peuple des ténèbres versus La Terre sous l'Angleterre, pages 5 à 24, préface
Critiques
Joseph O’Neill (1878-1952), inspecteur scolaire puis secrétaire du ministère de l’éducation de l’état libre d’Irlande, a signé cinq romans, dont trois de SF. Il est surtout connu pour LaTerre sous l’Angleterre, paru en 1935 outre-Manche, présenté ici dans une traduction légèrement révisée, et accompagnée d’une préface érudite de Guy Costes.
Le narrateur, Antoine, qui vit dans le Cumberland, décide de partir à la recherche de son père, disparu brutalement sans laisser de traces. Il tombe dans une faille qui le propulse dans un monde souterrain, obscur mais éclairé par des lumières magnétiques d’intensité variable. Il doit tout d’abord trouver ses repères dans ce nouveau monde, éviter les créatures dangereuses, puis entreprendre un périlleux périple où les éléments naturels jouent contre lui… Après quelque temps, il va croiser ses premiers hommes… et regretter de l’avoir fait. Car la société qui vit dans cet univers souterrain a tous les traits de la dystopie. En effet, il s’aperçoit vite que la plupart des habitants, tous silencieux, paraissent éteints, sans volonté propre, et ne font qu’accomplir des tâches répétitives et monotones. Certains ont développé un pouvoir télépathique leur permettant d’imposer leur volonté à leurs congénères, et n’hésitent pas à y recourir, pas tant à des fins purement personnelles que pour servir la cause – celle de la survie de leur société, qui descend en droite ligne des Romains, dont elle a conservé nombre d’aspects. Pour le bien commun, chacun doit donc jouer son rôle, y compris celui de simple rouage de la machine, sans aucune distraction afin d’améliorer efficacité et rendement, quitte à recourir aux puissances de l’esprit pour contraindre qui a besoin de l’être. Cette société aliénante et inhumaine, on devine aisément qu’elle se veut une critique acerbe de toute forme d’embrigadement qui déshumanise (rappelons que le livre paraît en 1935, alors que l’Allemagne nage en plein nazisme), aussi l’auteur, au travers des yeux d’Antoine, nous la décrit précisément : après une tentative d’asservissement ratée de notre héros, le Maître du Savoir tente la méthode douce en lui présentant les rouages de la société. Malgré la minutie de la description qui révèle peu à peu une évidente grandeur de la vision d’ensemble (un trait qui n’a pas manqué d’induire en erreur certains critiques, qui ont qualifié ce roman de « fasciste »), Antoine, et le lecteur avec lui, ne peut que rejeter cette société prônant l’annihilation de tout ce qui fait la force et les caractéristiques de l’âme humaine.
Classique des terres creuses un brin daté, La Terre sous l’Angleterre se révèle ainsi un roman aussi prenant qu’éminemment politique dans son rejet du totalitarisme.