Site clair (Changer
 
 Fiche livre   Connexion adhérent
Graines d'épouvante

Jack FINNEY

Titre original : The Body Snatchers / The Invasion of the Body Snatchers, 1955
Première parution : Collier's, du 26 novembre au 24 décembre 1954. En volume : Dell, 1955   ISFDB
Traduction de Michel LEBRUN
Illustration de Bertrand TAGER

GUENAUD , coll. Azimut précédent dans la collection n° 2
Dépôt légal : 3ème trimestre 1977
Première édition
Roman, 232 pages, catégorie / prix : 32 Fr
ISBN : 2-86215-004-5
Format : hauteur : 21 cm
Genre : Science-Fiction

En février 1979, à la sortie du film de R. Kaufman tiré du livre, une jaquette a été rajoutée à l'ouvrage (scan de droite). Elle présente une biographie de J. Finney en rabat de couverture, et le titre est devenu "L'invasion des Profanateurs" (comme le film) au dos.

Autres éditions

Sous le titre Body Snatchers - L'Invasion des profanateurs   BÉLIAL', 2022
Sous le titre Graines d'épouvante
   CLANCIER-GUENAUD, 1986
Sous le titre L'Invasion des profanateurs
   DENOËL, 1994
   GALLIMARD, 2000

Quatrième de couverture
Ce best-seller a inspiré un chef-d'œuvre du cinéma de Science-Fiction :
L'INVASION DES PROFANATEURS DE SÉPULTURES de Don SIEGEL (1956).
 
Chaque cosse avait éclaté en quatre ou cinq endroits, laissant échapper une partie de la substance grise qu'elle contenait. Cette matière était en train de blanchir, comme si elle se décolorait au contact de l'air. Nous ne pouvions le nier, cela se passait sous nos yeux : cette substance molle et duveteuse se comprimait d'elle-même et prenait lentement forme.
Cet enchevêtrement, qui ressemblait à du crin de cheval grisâtre, glissait peu à peu hors des cosses membraneuses et s'assemblait de soi-même, les fibres finissant par se réunir et former... quelque chose... Il est impossible de dire combien de temps nous restâmes immobiles, fascinés par notre découverte. Assez longtemps toutefois pour voir cette substance grise continuer à exsuder, inexorablement, hors des grandes cosses. Assez longtemps pour voir cette masse s'éclaircir et blanchir au contact de l'air. Bien assez longtemps pour voir...
Critiques
 
     COUP DE SEMENCE

     Un film très connu, L'invasion des profanateurs de sépultures, a été tiré de ce roman haletant, qui date de 1955 mais n'a guère vieilli. Encore des extraterrestres capables de prendre la forme humaine et de réaliser une duplication parfaite — ou presque — de tout être humain, psychisme compris. C'est un bon thème, dans la ligne du célèbre Père truqué de Dick.
     Le narrateur et héros est un jeune médecin un peu stéréotypé mais vivant et attachant. Le suspense glisse au bord de la terreur sans basculer tout à fait dans l'épouvante. La fin est du pur fantastique : l'auteur était coincé et il fallait qu'il s'en sorte d'une façon ou d'une autre. Il a choisi l'autre. Malgré tout, une des meilleures histoires d'invasion que j'aie lue. Ce roman est le premier volume d'une nouvelle collection assez luxueuse et bien présentée.
 

Michel JEURY
Première parution : 1/4/1978 dans Fiction 289
Mise en ligne le : 16/1/2011

Critiques des autres éditions ou de la série
Edition BÉLIAL', (2022)

    1976, Mill Valley, charmante petite ville de Californie qui semble tout droit sortie de 1955, l’âge d’or américain. Becky Driscoll obtient de Miles Bennell, médecin généraliste, qu’il rende visite à sa cousine Wilma. Celle-ci est persuadée que l’oncle Ira n’est plus lui. Très vite, d’autres habitants affirment qu’il en va de mê­me pour leurs proches. Miles consulte son ami Manfred Kauf­man, thérapeute réputé, qui diagnostique l’illusion collective en se basant sur de solides pré­cédents. Un soir, l’écrivain Jack Belicec presse Miles et Becky de se rendre chez lui. Il a dé­couvert un corps au sous-sol, d’apparence humaine mais qui ne semble pas plus mort que vivant, et ne présente aucune empreinte digitale. La contagion de Mill Valley n’est pas hystérique mais bien réelle, l’invasion des cosses a déjà commencé…

    Réglons tout de suite l’affaire, Body Snat­chers est un chef-d’œuvre, indispensable de nos bibliothèques. Il a donné lieu, entre autres, à deux adaptations magistrales au cinéma, celle de Don Siegel en 1956, puis de Philip Kaufman en 1978, liées d’ailleurs par un subtil crossover. L’édition ici proposée, celle révisée par Jack Finney et parue en 1978, s’accompagne d’une belle et éclairante postface de Sam Azulys qui ajoute au bonheur de lecture. Nous y renvoyons donc pour l’historique de l’œuvre et ses adaptations.

    Qu’est-ce qui fait de ce roman un classique ? Lorsque Finney l’écrit, l’envahisseur végétal issu de l’espace est, en science-fiction, une thématique secondaire mais déjà installée. Sans remonter à H. G. Wells et l’algue rouge de La Guerre des mondes, il suffit d’évoquer Le Jour des Triffides de John Wyndham, paru quatre ans avant la première parution de Body Snatchers. Finney présente un même souci de vraisemblance dans la description organique, à ce point riche d’ailleurs que l’on en oublie certaines caracté­ristiques : des spores, répandus dans une dé­charge, dupliquent dans un premier temps tout ce qui leur tombe sous la cosse, le vivant mais aussi des objets inanimés, manche de bois ou jus de fruit.

    Par ailleurs, l’infra-envahisseur est également un genre éprouvé. Dès 1938, La Chose de John W. Campbell confère à la créature des propriétés métamorphiques : «  Un monde à prendre – à condition qu’elle nous copie ! » (parution en « Une Heure-Lumière », critique dans Bifrost n°101). Marionnettes humaines, de Robert A. Hein­lein, développe en 1951 la notion pragmatique d’hôte. Ajoutons pour 1953 L’Homme démoli, d’Alfred Bester, avec l’idée d’une surveillance continuelle de l’être intérieur et, l’année d’après, « Le Père truqué », nouvelle de Philip K. Dick dans laquelle un petit garçon est convaincu que son père a laissé place à un sosie malfaisant. Or 1953 est aussi l’année où Chris­tine Costner Sizemore, discrète mère au foyer de vingt-six ans, est diagnostiquée comme schizophrène à personnalités multiples par les docteurs Corbett H. Thigpen et Hervey M. Cleckley, ce dernier ayant par ailleurs fixé les critères de la psychopathie. Une première dans l’histoire de la psychiatrie, Sizemore et ses médecins prouvent l’inadmissible : l’Américain moyen est plusieurs.

    Ce qui fait de Body Snat­chers un classique indémoda­ble est à la fois sa vraisemblance et son pouvoir métaphori­que. La vraisemblance est un magistral effet littéraire totalement contre-intuitif et qui prend à re­bours le lecteur. C’est parce que l’oncle Ira est en tout point lui, jusqu’à une petite cicatrice sur la nuque, qu’il est une parfaite du­plication. La preuve, rien n’a changé, c’est donc qu’il est autre. Les copies con­servent la mémoire et les habitudes de leurs modèles, mais débarrassées des tracas sen­timentaux et des aspirations vaines, comme l’ambition et l’orgueil.

    Quant au pouvoir métaphorique du roman, il se dévoile dans son contexte original de parution, les années cinquante. Effet d’une époque, le récit autorise une double lecture : la contamination de la population américaine par des agents soviétiques infiltrés, ou la persécution induite par les effets résiduels du Maccarthysme finissant. Les doubles négligent leurs pelouses et la peinture des façades, attaque discrète mais virulente de Finney envers l’American way of life. C’est en devenant terne que l’Amérique demeurera à tout prix. L’auteur s’est toujours défendu d’avoir proposé une visée politique, ce qu’il soutient encore tardivement dans une correspondance échangée avec Stephen King et en partie rapportée dans Anatomie de l’horreur. Reste que la métaphore permet pareilles lectures, et occasionne dans tous les cas une sévère paranoïa.

    D’ailleurs Jack Finney joue habilement de la dissociation par effets opposés. Le médecin généraliste local est une figure littéraire typiquement américaine, un véritable outil narratif qui permet de se déplacer aisément en tous lieux de la ville. On est en terrain connu, mais en même temps Miles et Becky sont tous deux divorcés, ce qui les situe d’entrée dans la marge. C’est leur différence qui leur permet de rester identiques.

    La culture américaine, si policée d’apparence, présente une non-concordance entre l’être et le paraître, l’apparence et l’intention. En ce sens, la version Body Snatchers de 1978, qui demeure très fifties, conserve cependant toute sa pertinence, à l’ère post Viêt-Nam et Watergate. Et elle demeure d’une étonnante actualité, en un temps du questionnement multiple des identités et, dans une triste et chaude actualité aux États-Unis, de la naissance à tout prix. La vie est une valeur en soi, les cosses ne diraient pas autrement…

    L’ennui, avec le Body Snatchers de Jack Finney, est qu’il a toujours raison. C’est aussi sa force.

Xavier MAUMÉJEAN
Première parution : 1/10/2022
Bifrost 108
Mise en ligne le : 20/5/2025


Edition DENOËL, Présence du futur (1994)

     Mill Valley est une petite ville de Californie du nord, non loin de San Francisco. Tout le monde y connait tout le monde, et nul mieux que Miles Bennell, le médecin local, qui y a grandi et y exerce. Mais petit à petit, un phénomène bizarre envahit Mill Valley. Des gens viennent trouver Miles et lui affirment que des personnes qu'ils ont connues toute leur vie ne sont plus les mêmes. Elles sont exactement semblables, des sosies parfaits... mais ce ne sont plus les mêmes.
     Bientôt, on montre à Miles Bennell un cadavre. Humain, mais bizarrement... neuf. Un corps qui n'aurait pas vécu.

     Les amateurs de films fantastiques auront reconnu ici un scénario qui a inspiré trois films : un de Don « Les proies » Siegel dans les années cinquante, un de Philip « L'étoffe des héros » Kaufman en 1978 et un troisième d'Abel « China Girl » Ferrara en 1993. À l'origine, c'est un roman de Jack Finney, l'auteur du Voyage de Simon Morley et du Retour de Marion Marsh, récemment et finalement édités en France par « Présences ». Sur ce sujet éminemment paranoïaque, Finney trace à nouveau son sillon de prédilection. Ces envahisseurs, c'est le monde moderne, le monde où l'on a plus le temps de vivre, où l'efficacité devient seule maîtresse. Avec la graduelle mort de Mill Valley, c'est une façon de goûter le bonheur de vivre qui périt, étouffée par un progrès aveugle. On se souviendra que le film de Siegel avait été perçu comme un message anti-Rouges, celui de Kaufman comme la montée de l'indifférence dans notre société moderne, et celui de Ferrara comme une vision du SIDA ou de la drogue.

     Mais, me direz-vous, fidèles lecteurs, ce roman existait déjà en français, il portait même un autre titre : Graines d'épouvante, adopté lors de sa publication chez Clancier-Guénaud ? Si fait, si fait. Mais M. Clancier-Guénaud avait un peu « allégé » le texte ici restauré par M. Denoël. Et pour marquer sa différence, la nouvelle édition revue et corrigée prend le titre des films inspirés de l'œuvre. Titre objectivement idiot, remarquons-le en passant, comme le reconnaît l'édition Denoël elle-même. C'était une ânerie de traducteur cinéma un peu niais : il a confondu les body-snatchers victoriens, dont les plus célèbres restent Burke et Hare, détrousseurs de tombes (ou profanateurs de sépultures, si vous préférez) qui revendaient les cadavres aux médecins férus de dissection, avec ces body-snatchers-ci, qui volent des corps.

     Mais foin de tout ceci. Si vous avez déjà goûté les charmes de Finney, vous savez à quoi vous attendre. Le suc de la nostalgie et la saveur de l'existence, une voix calme et enjôleuse, le plaisir. Sinon, profitez de ce classique et félicitez-vous que l'heure de Finney ait enfin sonné en France.
     Et si vous devez voir une adaptation cinéma, je suggère celle de Kaufman, dont le « message » est le plus proche du roman de Finney, même s'il est nettement plus pessimiste.
     Finney n'a jamais pu s'empêcher de garder confiance en l'homme.

Patrick MARCEL
Première parution : 1/4/1994
Yellow Submarine 109
Mise en ligne le : 22/9/2004

Cité dans les pages thématiques suivantes
Invasions

Adaptations (cinéma, télévision, BD, théâtre, radio, jeu vidéo...)
L'Invasion des profanateurs de sépultures , 1956, Don Siegel
L'Invasion des profanateurs , 1978, Philip Kaufman
Invasion of the Bunny Snatchers , 1992, Greg Ford & Terry Lennon (court métrage animation)
Body Snatchers , 1993, Abel Ferrara
Invasion , 2007, Oliver Hirschbiegel

retour en haut de page

Dans la nooSFere : 87251 livres, 112067 photos de couvertures, 83685 quatrièmes.
10815 critiques, 47149 intervenant·e·s, 1982 photographies, 3915 adaptations.
 
NooSFere est une encyclopédie et une base de données bibliographique.
Nous ne sommes ni libraire ni éditeur, nous ne vendons pas de livres et ne publions pas de textes. Trouver une librairie !
A propos de l'association  -   Vie privée et cookies/RGPD