Egaré dans l'espace à la suite d'un orage gravitationnel, un astronef parti pour une colonie lointaine dans les étoiles s'est écrasé sur une planète inconnue.
Les survivants de l'équipage, et des pionniers que cet astronef transportait, vont-ils pouvoir le réparer et repartir pour leur destination initiale ?
Sinon, peut-être vont-ils s'installer dans ce monde neuf et y bâtir une sorte de civilisation humaine ? Du moins ils le croyaient, jusqu'à ce que se lèvent les vents porteurs de folie, et qu'ils apprennent le prix que chaque Terrien doit payer avant que cette étrange planète veuille enfin les accepter pour siens…
En 1948, Marion Zimmer Bradley, alors simple fan, gagnait le prix de 25 dollars d'un concours d'Amazing Stories couronnant la meilleure nouvelle « non professionnelle » de l'année.
Sept ans plus tard, dans le prestigieux Magazine of Fantasy and Science-Fiction, elle prenait définitivement sa place parmi les grands auteurs de science-fiction, avec une longue nouvelle qui fut publiée en France, dans Fiction, sous le titre : « Marée montante ». Marion Zimmer Bradley y préconisait — déjà — un retour à la nature et à la sagesse, qu'elle n'a cessé de défendre, depuis, dans de nombreux romans.
Volume d'introduction au cycle de Ténébreuse, La Planète aux vents de folie pose les bases du cycle avec un « récit des origines » qui retrace l'histoire (voire la préhistoire) de cette planète. Un vaisseau humain s'écrase sur une planète inconnue, dans un coin perdu de l'univers, aux limites de la Voie Lactée. Le contact avec le reste de l'humanité est rompu et les survivants doivent s'organiser.
A partir de là va se dérouler la grande saga de Ténébreuse, l'une des œuvres majeures de Marion Zimmer Bradley, écrite entre 1964 et 1999. Dans ce monde isolé du reste de l'humanité, la société se développe et s'organise autour de la caste dirigeante des comyns, dotée de pouvoirs extrasensoriels (télépathie, prémonitions, contrôle des orages, etc.). Cette grande fresque couvre plusieurs dizaines de générations, avec des cycles qui permettent de se focaliser sur un moment et des personnages particuliers, mais sont parfois séparés par des « trous » de plusieurs générations. L'ordre d'écriture des épisodes n'est d'ailleurs pas forcement chronologique.
Après un début dans une atmosphère très SF, avec vaisseaux spatiaux et ordinateurs, on voit bientôt émerger des éléments de fantastique et de fantasy : avec la découverte des pouvoirs extrasensoriels chez les humains, puis celle de l'existence de mystérieux habitants, la planète révèle peu à peu ses attraits et des dangers, en particulier les « vents de folie » qui la balayent régulièrement, réveillant chez les êtres vivants des pouvoirs et des comportements étranges.
L'intrigue est bâtie autour de l'opposition entre le capitaine du navire, les scientifiques et les colons, chacun poursuivant des objectifs différents. On suit les étapes de l'exploration de la planète, on assiste aux tensions et aux conflits entre les survivants. Les grands thèmes du cycle sont déjà présents. Les personnages féminins sont souvent centraux, porteurs d'un féminisme militant (c'est le moins qu'on puisse dire !) qui marque le cycle, même s'il n'apparaît que superficiellement dans La planète aux vents de folie. L'influence celtique, que l'on trouve dans l'ensemble de l'œuvre de Marion Zimmer Bradley, est perceptible dès le départ : dans le cycle de Ténébreuse, les héros sont souvent roux, gauchers, et leurs noms fleurent bon l'Irlande ou l'Ecosse. L'autre aspect majeur de cette saga est l'étude de tout ce qui touche à l'organisation politique d'un monde. Il n'est qu'effleuré dans ce premier volume, mais c'est l'un des grands attraits de ce cycle.
Bien que conventionnel et sans grandes surprises dans l'intrigue, La Planète aux vents de folie est un ouvrage plaisant, qui donne envie de se plonger dans ce cycle de Ténébreuse, ici à peine esquissé, mais déjà très appétissant. On n'en demande pas plus.