Curieusement, ce livre n'a pas attiré l'attention de la critique. Cela tient peut-être au fait qu'il est paru hors des grandes collections spécialisées. Pourtant, son contenu relève de la littérature fantastique : quant à son auteur, il n'est pas totalement inconnu du milieu de la S.F. puisque sous son nom se dissimule un certain Claude Klotz, qui signa jadis Les innommables (J'AI LU n° 967), un remarquable roman sur les origines de l'humanité et illustré par le dessinateur Gourmelin.
Par ailleurs, Patrick Cauvin avait déjà abordé le Fantastique dans son précédent roman, Laura Brams , paru l'an dernier chez Albin Michel.
Dans Haute-Pierre, l'auteur reprend le thème traditionnel de la maison hantée pour le traiter d'une manière neuve, où romantisme et humour constituent les principaux ingrédients. On retrouve la poésie et la sensibilité propres qui caractérisent ses publications antérieures, avec ici en plus un fantastique sens du suspense qui nous tient en alerte de la première à la dernière page. Impossible d'en deviner le dénouement final.
Plutôt que de bâtir un récit d'action, plein de rebondissements, dans la plus pure tradition de la littérature fantastique, l'auteur se livre à une étude psychologique des différents personnages et introduit progressivement des éléments insolites, à petites doses, juste ce qu'il faut pour alimenter le suspense.
Assurément, Cauvin est un habile conteur, qui sait donner vie à ses personnages et parsemer sa narration de réflexions pertinentes, je ne résiste pas à l'envie de citer celle-ci : « L'art était le seul domaine où il ne pouvait y avoir ni premier, ni deuxième, ni dernier (...) En football une équipe en battait une autre, on pouvait difficilement prétendre qu'Orson Welles battait Hitchcock deux à zéro, et pourtant tout à l'heure, un homme monterait sur l'estrade et serait considéré comme le meilleur dans un domaine où il ne pouvait y avoir de meilleur, seulement des univers différents » (p. 141). Illustration parfaite de l'absurdité des prix littéraires, de ces remises d'oscars cinématographiques et autres catégories d'exhibitionnisme mondain ou de nombrilisme travesti.
Quoi qu'il en soit, voilà un livre que l'on peut lire pour son climat fantastique mais aussi, et tout simplement, pour ses qualités d'écriture.