Pierre Bordage

Les guerriers du silence, La citadelle

Hyponéros, Wang, Les fables de

l'Humpur. Le dernier jugement est le

inédit, Les derniers hommes.

     La troisième guerre mondiale a réduit l'humanité à l'état de nomades vivant de troc ; plantes et animaux génétiquement modifiés ont transformé la nature en poison violent ; des solbots encore en activité tirent sur tout ce qui bouge : un décor de fin du monde.

     Solman le boîteux, du peuple Aquariote, est un donneur : son don de clairvoyance en fait un juge lors des grands rassemblements des tribus mais aussi un solitaire, car on se méfie de sa capacité à percer les âmes. Il trouve un réconfort auprès de Raïma, la guérisseuse, que la transgénose, une lente et repoussante maladie, place à l'écart des autres. Personnage clé du récit, Solman s'aperçoit que de nombreux mystères entourent sa naissance. Les découvrir lui fournira une partie de la réponse concernant le destin de l'humanité, l'autre partie étant apportée par une mystérieuse femme, Kadija, recueillie en compagnie d'un vieil homme, un scientifique de l'ancien monde. Pourchassés, décimés, les derniers représentants du peuple aquariote apprendront que la fin de l'humanité n'est pas due à la fatalité.

     Personnages foisonnants, scènes d'actions entrecoupées d'énigmes, tous les ingrédients du roman populaire sont présents. Bordage semble s'être honnêtement acquitté du difficile défi de réaliser un feuilleton chez Librio après Stephen King. Alors, pourquoi cette insatisfaction ?

     Passé un intéressant premier volume de mise en place, l'intérêt se dilue dans des rebondissements répétitifs (attaque des solbots, des sauterelIes^gm, des rats^gm, des vaches^gm, ...), engendrant une monotonie faiblement ponctuée par des révélations trop parcimonieuses concernant le passé (qui a tué les parents de Solman, qui a commandité l'assassinat, qu'est-ce que l'Eskato ?). Le récit ne progresse de façon satisfaisante que dans les deux derniers volumes. Un bavardage excessif est la cause de cette lassitude, l'auteur multipliant les appositions pour décrire et expliquer ce qui a déjà été dit cent fois, comme s'il craignait de ne pouvoir tenir la longueur. Le style épique de Bordage tourne ici au procédé, et c'est dommage compte tenu des qualités du récit.