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L'Autre côté

Alfred KUBIN

Titre original : Die andere Seite, 1909
Traduction de Robert VALANÇAY
Illustration de Alfred KUBIN & Jean-Michel NICOLLET
Illustrations intérieures de Alfred KUBIN

NOUVELLES ÉDITIONS OSWALD (NéO) (Paris, France), coll. Fantastique / SF / Aventure n° 91
Dépôt légal : octobre 1983, Achevé d'imprimer : octobre 1983
Roman, 256 pages, catégorie / prix : 29 FF
ISBN : 2-7304-0232-2
Format : 14,0 x 20,5 cm
Genre : Fantastique

Couverture : dessin d'Alfred Kubin, intitulé « Oublié-englouti » 1903, adapté par Jean-Michel Nicollet.
Avertissement de l'éditeur : La précédente édition française de cet ouvrage a été publiée par Jean-Jacques Pauvert en 1964. Cette édition comportait une « Autobiographie » que nous n'avons pas reproduite non plus que plusieurs dessins pleine page.
L'ISBN 2-7304-0232-6 affiché sur le livre est invalide.
Tirage 4000 exemplaires.


Autres éditions
   HAR PO, 1986
Sous le titre L'Autre côté. Un roman fantastique
   José CORTI, 2000
Sous le titre L'Autre côté
   MARABOUT - GÉRARD, 1972
   PAUVERT, 1964

Quatrième de couverture
     Le narrateur reçoit un jour la visite d'un messager qui lui est envoyé par un de ses anciens condisciples, Claus Patera qui, devenu fabuleusement riche, a fondé, en Asie, l'Empire du rêve. Par cet envoyé, Patera le prie de s'y installer. Il décide de tenter le voyage et, aussitôt franchie la frontière qui garde l'empire, il découvre un autre monde et, en particulier, Perle, la capitale. Ici quelque chose d'impalpable plane, qui rend êtres et choses différents. Un château domine Perle, mais le narrateur cherche vainement à y rencontrer Patera. Les habitants se livrent à d'étranges cultes et la ville repose sur d'inquiétants souterrains. Peu à peu l'atmosphère de la ville vous ronge. De grands bouleversements se préparent...
     Mais il est impossible d'en dire plus sans déflorer ce livre foisonnant, d'une richesse inouïe, et qui, écrit au cours d'une illumination qui se poursuivit durant douze semaines, constitue l'une des œuvres les plus étranges, non seulement de la littérature fantastique contemporaine, mais de toute la littérature allemande.
 
     Né en Bohême (Autriche) en 1877, Alfred Kubin est mort à Zwickledt en 1959. Après des études à l'Ecole des Beaux-Arts de Salzbourg, il consacre plusieurs années à l'apprentissage de la photographie avant de découvrir, dans les oeuvres de Beardsley, Max Klinger et Odilon Redon, la gravure. Il expose ses dessins pour la première fois en 1902. Après divers voyages en France et en Italie, il s'installe en Haute-Autriche, où il demeurera jusqu'à sa mort. Devenu un des plus célèbres graveurs et dessinateurs de son époque, il publiera un seul ouvrage, L'autre côté. Nourri qu'il était de Poe et d'Hoffmann, la littérature se conçoit pour lui comme une plongée dans l'inconscient. Ce livre unique s'inscrit dans le renouveau de la littérature fantastique allemande du début du siècle, renouveau incarné par Meyrink, Ewers et Strobl. Le livre eut plusieurs éditions en langue allemande et les dessins qui éclairent celle-ci appartiennent aux illustrations que Kubin avait lui-même réalisées pour L'autre côté. Le livre a été traduit pratiquement dans toutes les langues du monde.
Sommaire
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1 - Plan de la ville de Perle, pages 6 à 7, carte, trad. (non mentionné)
Critiques
     Il m'arrive rarement de convenir qu'un livre m'est tombé des mains. Surtout lorsqu'au départ le livre en question bénéficiait d'un présupposé favorable. Il faut dire que, dans le domaine fantastique, L'autre côté est frappé d'une aura mythique. On ne cesse à son propos d'accumuler les références au fantastique allemand moderne (Meyrinck, Kubin, Ewers...) et de le désigner parmi les ouvrages fondateurs. D'autre part, Kubin cumule les rôles d'écrivain et d'artiste, et le mélange des genres m'a toujours séduit (je ne vois guère qu'Andrevon pour y prétendre dans notre domaine — voir C'est tous les jours pareils et Des îles dans la tête, mais je m'égare).
     Le thème est semble-t-il intéressant : utopie ou contre-utopie, recherche d'un bonheur terrestre et destin destructeur. Perle, la cité fondée en Asie Centrale par Claus Patera, n'est pas sans convoquer divers grands modèles, le thème de la ville génératrice d'utopie courant de Campanella à Jules Verne. Perle, pourtant, porte en germe sa destruction future : Patera l'a voulue figée, comme toute utopie, même positive — et c'est d'ailleurs en cela que toute utopie est sa propre contre-utopie, car vient un jour quelqu'un qui veut bouger. Perle est de plus figée dans le passé, et il est clair que les valeurs qui l'ont créée et la maintiennent provisoirement statique sont des valeurs réactionnaires au sens quasi étymologique du terme. Cette ville allemande composite mais ancienne transplantée dans un désert asiatique est d'avance condamnée, et aucun sortilège ne la protège lorsque se déchaînent les forces de la démence collective. Confier à un millionnaire américain, Hercule Bell, la responsabilité de la chute de l'Empire du Rêve, devient purement anecdotique. Perle devait de toute façon s'effondrer sur elle-même. Sans doute, le rôle de l'Américain est-il porteur d'un symbole : celui d'une époque qui voyait dans les États-Unis l'espoir de modernité et de force d'un monde futur.
     Malgré tout ceci, dont on ne niera pas l'intérêt, pas plus que l'on ne condamnera l'ouvrage pour son hybridité utopie/fantastique (car l'hybridité est plutôt signe de vitalité). L'autre côté reste malgré tout, un roman qui jamais n'accroche véritablement, qui jamais ne connaît le plus petit soupçon d'identification romanesque. Difficile de s'intéresser à la trajectoire du narrateur. Difficile de s'interroger sur le sens et le mystère ( ?) profond de l'Empire du Rêve. Tout le narratif semble comme décalé, et sans cesse manquant de la plus élémentaire conviction destinée à emporter l'intérêt du lecteur.
     Je ne veux pourtant pas condamner définitivement l'œuvre, dont je ne connais pas l'original (ne lisant de toute façon pas l'allemand), car une bonne part du retrait dans la lecture me semble être le fait d'une traduction usant d'une langue que je qualifierai au mieux de surannée ! Peut-être les Nouvelles Editions Oswald auraient-elles dû faire retraduire l'ouvrage, qui, comme tel, n'emporte guère l'adhésion.

Dominique WARFA (lui écrire) (site web)
Première parution : 1/9/1984 dans Fiction 354
Mise en ligne le : 1/11/2005


 
     C'est une très bonne initiative de la part des Nouvelles Editions Oswald que d'avoir réédité cet ouvrage d'Alfred Kubin, paru précédemment aux éditions Jean-Jacques Pauvert. Auteur autrichien né en Bohème en 1877 et mort à Zwickledt en 1959, Alfred Kubin fait partie de ce mouvement de renouveau de la littérature de langue allemande du début du siècle. Au même titre que Gustav Meyrink, Hanns Heinz Ewers ou Karl Hans Strobl, Alfred Kubin a su développer une vision fantastique du monde qui, à l'époque, bouleversait les conceptions traditionnelles de la littérature fantastique germanique. Ce roman, dans lequel se ressentent les influences de Poe et d'Hoffmann, se présente comme une plongée dans l'inconscient, dans les univers oniriques de l'Homme. L'autre côté est plus un roman qui exploite l'intériorité de l'individu qu'un voyage vers des contrées inconnues.
     L'histoire nous expose les mésaventures d'un couple — le narrateur et sa femme — qui s'est rendu dans l'Empire du Rêve, un pays magnifique, trop parfait, dominé par le Maître Claus Patera, camarade de classe du narrateur. Ce monde, qui au départ apparaît comme un pays de rêve, ne tarde pas à dévoiler son véritable aspect : le non-sens. Prenons par exemple la religion où « l'œuf, la noix, le pain, le fromage, le miel, le lait, le vin et le poivre sont particulièrement consacrés » (p.75), et plus loin encore où « les cheveux, la corne, les pommes de pin, les champignons, le foin aussi étaient sacrés. Le crottin de cheval, le fumier de vache avaient aussi une très haute signification » (p. 75). Il est à noter que les Français sont mal vus de l'auteur qui leur attribue tous les vices de la Création. Comme quoi, en ce début de XXe siècle, le Français offrait plutôt, au regard de nos voisins germaniques, l'image d'un amateur de bons vins et de belles filles... Monde du non-sens où tous ceux qui refusent le progrès sont accueillis à bras ouverts. « Dans l'Empire du Rêve, lieu d'asile de tous ceux que ne satisfait pas la civilisation moderne, on pourvoit à tous les besoins corporels » (p. 13). Pourtant, cela n'empêche pas le Pays du Rêve de véhiculer une certaine forme de spiritualité. « Tout y est organisé sur une vie spiritualisée au suprême degré » (p. 14) L'Empire du Rêve prend plutôt l'apparence d'un univers utopique où tout est permis à ceux qui y vivent. Mais ce non-sens reflète en réalité des conflits internes qui animent la raison humaine. Tout y est fluctuant, comme dans les rêves. D'ailleurs, la fin du récit s'apparente un peu au réveil du dormeur qui abandonne le rêve pour retrouver la morne réalité. Mais le rêve peut parfois tourner au cauchemar et, dans ce cas, le réveil se transforme en délivrance.
     Sous l'humour grinçant, parfois macabre, mais toujours déroutant, l'auteur nous dévoile une utopie antimoderniste, écrite à une époque où la science progressait à pas de géant et inquiétait bon nombre de ses contemporains. Si le livre souffre parfois de longueurs — certaines descriptions interminables — il réussit néanmoins à capter l'attention du lecteur avec ce charme suranné d'une époque révolue. Des dessins de l'auteur ont été reproduits dans le texte mais ne présentent qu'un intérêt purement historique. Ce livre est le seul connu d'Alfred Kubin. On ne peut que regretter qu'il n'en ait pas écrit d'autres dans la même veine. Une raison suffisante pour découvrir celui-là.

Frédéric KURZAWA
Première parution : 1/9/1984 dans Fiction 354
Mise en ligne le : 16/12/2008

Cité dans les Conseils de lecture / Bibliothèque idéale des oeuvres suivantes
Francis Berthelot : Bibliothèque de l'Entre-Mondes (liste parue en 2005)

Adaptations (cinéma, télévision, BD, théâtre, radio, jeu vidéo...)
Traumstadt , 1973, Johannes Schaaf

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