Hey, Chet, tu nous avais habitué à mieux !
Chet Williamson, dont les récits traduits en France semblaient prometteurs, a sombré ici dans la facilité. Même si l'exercice de style imposé par TSR, possesseur des droits du jeu de rôle AD&D (et incidemment de son développement vampiresque Ravenloft), restreint beaucoup les possibilités de créations originales, tant à cause des règles rigides qu'à cause de l'éthique monolithique du géant américain, il aurait été plus élégant d'écrire un roman qui ne soit pas le plagiat (presque) parfait du roman de Mary Woolenstonecraft Shelley. Rien ne manque à ce Prométhée moderne abâtardi : des glaces à la tempête qui voit la naissance du monstre du docteur Frankenstein, tout a déjà été vu, en matière de clichés éculés, vu et revu quinze millions de fois. Il n'y a même pas d'humour. La grandeur romantique et gothique du roman original n'est ici plus qu'un vague souvenir, une réminiscence mal digérée.
La recette du succès des livres pour rôlistes semble être simple : prenez un best-seller fantastique tombé dans le domaine public (histoire de ne pas s'embêter avec les droits), saupoudrez (vaguement) dessus quelques éléments issus du monde imaginé au sein des studios de création TSR, liez le tout avec des éléments pseudo-intellectuels, et votre indigeste gâteau est prêt à être dévoré par les joueurs. Ces derniers seraient-ils sots ? Ou est-ce une excessive consommation de pizzas commandées par téléphone qui auraient ainsi blindé leur intellect contre toute tentative de réflexion ?
Ravenloft sans vampire, c'est comme une bière sans mousse : faut aimer. Peu de joueurs (selon moi) y trouveront leur compte. Quant aux amateurs de fantastique, pour peu qu'ils soient un tantinet futés, ils dépenseront leur argent ailleurs, dans la nouvelle collection Polar SF, par exemple.
Jean MILLEMANN (lui écrire)
nooSFere