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En quête d'éternité

Greg BEAR

Titre original : Vitals, 2002
Première parution : Del Rey, 2002   ISFDB
Traduction de Thierry ARSON
Illustration de Didier THIMONIER

PRESSES DE LA CITÉ (Paris, France)
Dépôt légal : septembre 2004
Première édition
Roman, 456 pages, catégorie / prix : 19,80 €
ISBN : 2-258-06274-8
Genre : Science-Fiction


Quatrième de couverture
     A près de 2 000 mètres sous la surface de l'océan Pacifique, Hal Cousins, spécialiste en biotechnologie, traque dans les grands fonds marins les bactéries qui pourraient ralentir le vieillissement du corps humain, poursuivant un rêve ancestral : accéder à l'immortalité. Aujourd'hui, il sent que ses recherches sont sur le point d'aboutir...
     Et voilà que, soudain, le rêve tourne au cauchemar : le pilote de son submersible tente de le tuer, son laboratoire est dévasté, le généreux mécène qui finance ses recherches lui coupe tout crédit et cinq scientifiques sont sauvagement assassinés en l'espace d'une semaine.
     Haï découvre que derrière ce déchaînement de violence se trouvent des savants sans scrupules qui œuvrent dans l'ombre depuis plus d'un demi-siècle pour mettre en place un monde terrifiant. Commence alors pour lui une enquête dont dépend peut-être la survie de l'humanité tout entière...
     Un étonnant roman de science-fiction doublé d'un thriller scientifique au suspense de tous les instants, par l'un des maîtres incontestés du genre.

     Auteur d'une vingtaine de romans, dont la célèbre Echelle de Darwin, Greg Bear s'est vu plusieurs fois récompenser par les prix Hugo et Nebula, attribués aux meilleurs auteurs de science-fiction.
Critiques
     Les milliardaires acceptent volontiers de financer des recherches en biologie sur la longévité et, pourquoi pas, l'immortalité. Hal Cousins est de ces chercheurs. Il veut examiner les microorganismes les plus anciens, avant que les mitochondries ne soient intégrées aux appareils cellulaires des êtres vivants. Il voit dans la collaboration entre les êtres vivants et les bactéries qui les ont infectés avant de s'y intégrer dans un réciproque intérêt la cause du vieillissement puis de la mort.

     Certains ne voient pas ces recherches d'un bon œil. S'il échappe de justesse à un sort funeste, Cousins ne s'en trouve pas moins mis sur la touche et son labo détruit. Les diverses tentatives de meurtres auxquelles il échappe sont pour le moins curieuses. Il semble qu'absolument n'importe qui cherche à l'occire. C'est alors qu'il rencontre Banning, un historien déchu qui a un jour subitement viré antisémite et, ce faisant, s'est discrédité. Banning lui remet des papiers de son frère, Rob, lui aussi étrangement assassiné.

     Rob, également biologiste, a découvert qu'en Russie, dès les années 30, un biologiste juif, Maxim Golokhov, et sa femme Irina, ont mené les mêmes recherches qu'eux. Or, ce même champ de recherches bactériologiques a débouché sur une possibilité de contrôle très poussée du comportement par contamination bactérienne. Possibilité qui a tout pour séduire Béria, l'âme damnée de Staline, chef de la police secrète du régime qui épargnera aux Golokhov le sort des biologistes soviétiques ne sacrifiant pas au dogme imposé par Lyssenko. Sous Staline, Golokhov met sur pied Silk, une organisation qui travaille au contrôle social. Après la mort du Petit Père des Peuples et l'exécution de Béria au début des années 50, Silk passe à l'Ouest.

     En fait, Silk n'est nullement assujetti à une quelconque idéologie. Silk tourne avant tout pour lui-même, selon la vision du monde de Golokhov. Et Silk voit d'un mauvais œil Hal Cousins venir empiéter sur ses plates-bandes...

     Greg Bear est sans conteste l'un des meilleurs écrivains actuels de S-F ; on peut lire L'Echelle de Darwin, qui vient de ressortir au Livre de poche, pour s'en convaincre. Mais écrire de la hard science est une chose ; écrire un thriller en est une autre et n'est pas Michael Crichton qui veut. Pas même Greg Bear. Surtout pas Greg Bear. En quête d'éternité est un thriller à 2 de tension. Bear a rassemblé la matière d'un somptueux thriller paranoïaque et a complètement échoué dans sa mise en œuvre. C'est pataud. Pataud et compliqué. Or, l'art du thriller consiste à rendre limpide un montage complexe ; c'est nécessaire à l'accroissement de la tension. Rien à faire. La mayonnaise ne prend pas.

     Reste que l'histoire est intéressante. Que l'auteur tente avec un certain succès de mettre en scène le super-complot avec un minimum de crédibilité scientifique. Bear n'est pas ici à son mieux, mais, s'il n'est pas à privilégier, En quête d'éternité n'est pas pour autant à éviter.

Jean-Pierre LION
Première parution : 1/4/2005 dans Bifrost 38
Mise en ligne le : 3/8/2006


     Et si la clé de l'immortalité résidait dans la communication entre notre organisme et ses bactéries ? C'est l« hypothèse que défend le chercheur Hal Cousins, qui étudie les formes bactériennes les plus primitives dans l'espoir d'augmenter notre longévité...

     L'idée est intéressante — même si elle simplifie à l'extrême les mécanismes du vieillissement. Cependant, Bear ne s'attarde guère à étoffer et à crédibiliser ses données scientifiques, préférant orienter son récit vers un thriller conventionnel : héros traqué, jeu de piste autour d'indices laissés par le frère jumeau mort qui avait déjà tout compris, découverte d'un vaste complot historique prenant source dans les années 1930. Manipulations mentales, nazisme, antisémitisme, stalinisme, révisionnisme, la sauce est riche, avec toutefois un goût de déjà lu.

     Le principal défaut de ce roman est que le lecteur a déjà tout compris de l'idée principale dans les cent vingt premières pages et qu'il n'a plus qu'à attendre que le héros en viennent aux mêmes conclusions que lui au bout de quatre cent cinquante pages. L'intrigue est manifestement délayée par une rétention volontaire des informations révélées au héros, par des rebondissements mécaniques, par des situations et des explications redondantes.
     En outre, la suspension de l'incrédulité est parfois mise à rude épreuve, notamment par ce personnage de savant génial qui, dès les années 1930, domine parfaitement les bactéries au point de pouvoir en faire un vecteur de manipulations mentales — à une époque où, rappelons-le, l'humanité ne dispose même pas d'antibiotiques. On y croirait dans un roman steampunk où les technologies ont souvent un ou deux siècles d'avance, c'est plus difficile à avaler dans un thriller scientifique qui se donne l'apparence du sérieux.

     Au total, le plus passionnant reste la citation de Lewis Thomas placée en exergue : « Mes mitochondries composent une proportion très importante de mon être. Il m'est impossible de la calculer, mais je suppose qu'il y en a autant en masse que le reste de mon être. Considérées ainsi, on pourrait les voir telle une vaste colonie mobile de bactéries, gérant un système complexe de nucléus, microtubules et neurones, pour le plaisir et l'alimentation de leurs familles, et se servant, à cet instant précis, d'une machine à écrire. » (sachant qu' « il y a des milliards d'années, les mitochondries étaient des envahisseurs bactériens, les parasites des premières cellules »). Hélas, à aucun instant Greg Bear ne développe réellement cette idée, privilégiant plutôt le sensationnalisme superficiel. L'intérêt du roman demeure constamment en-deça de cette citation préliminaire, ce qui est bien dommage.

     Néanmoins, n'exagérons pas. En quête d'éternité n'est pas désagréable à lire : c'est un thriller honnête, dans la veine de ces ouvrages destinés à être aussitôt adaptés pour un prochain film hollywoodien. La déception vient surtout du décalage entre des prémices très prometteurs et un résultat poussif qui ne tient que grâce aux grosses ficelles d'un thriller de base. Distrayant, sans plus.

Pascal PATOZ (lui écrire)
Première parution : 1/2/2005 nooSFere


     Hal Cousins, chercheur en biotechnologie, poursuit une chimère de l'humanité : l'immortalité. Il espère découvrir des bactéries permettant de ralentir voire de stopper le vieillissement humain. Toutefois, alors qu'il est dans un sous-marin de poche au fond de l'océan, son pilote devient fou et tente de le tuer. Hal le maîtrise et réussit péniblement à remonter l'engin à la surface. Pour y découvrir que sur le bateau, un autre scientifique aliéné a tué plusieurs personnes. Les déboires de Hal ne s'arrêtent pas là puisqu'il apprend à son retour chez lui que son frère jumeau, qui suit une carrière parallèle à la sienne dans le même domaine, est mort assassiné. Cela fait beaucoup de coïncidences ; dès lors, Hal Cousins s'imagine qu'un complot est en train de se tramer et il va tout faire pour le mettre à jour.
     On sait Greg Bear plutôt apôtre de la hard science : en tant que chercheur lui-même, la plupart de ses romans ont un fort contenu scientifique. C'est évidemment le cas ici, mais même si le sujet est passionnant, le côté vulgarisation ne m'a pas semblé très accessible au lecteur lambda. Bien sûr, pour éviter de trop lourdes scènes explicatives, Bear dissémine les notes techniques par petites touches dans le corps du récit, mais si cela confère un bon rythme à l'ensemble, on a un peu de mal à suivre les postulats de l'auteur quant à cette quête de l'immortalité.
     Toutefois, il s'agit aussi — avant tout ? — d'un roman à suspense, et force est de constater que de ce point de vue là, Bear s'en tire avec les honneurs. Essentiellement par la construction, habile, qui alterne scènes du présent et scènes du passé, ces dernières dévoilant au lecteur des éléments que Hal ne découvrira que progressivement. La dynamique du roman naît autant de ce balancier que du rythme intrinsèque des événements (Hal est traqué, et doit donc en permanence bouger pour qu'on ne le retrouve pas).
     En définitive, un livre plaisant à lire, mais dont on ressort quelque peu frustré de ne pas avoir pu véritablement suivre l'auteur dans ses élucubrations scientifiques.

Bruno PARA (lui écrire)
Première parution : 19/12/2004 nooSFere


     C'est en remontant à la surface que Hal Cousins plonge dans le cauchemar. Acharné à guérir l'ultime maladie humaine — la mort de vieillesse — il enquêtait sur les bactéries primitives de fonds marins, fruit d'une évolution indépendante. Mais l'équipage du navire océanographique semble frappé de folie, et quand Hal touche terre, il se découvre recherché sans raison par le FBI, ses précieux échantillons détruits, tandis que son frère jumeau lui laisse un message téléphonique désespéré, peu avant qu'on apprenne qu'il a été assassiné. D'un univers de spéculation scientifique comme Bear sait en bâtir, où le rôle d'auxiliaires microscopiques de l'évolution humaine, que jouaient les virus de l'Échelle de Darwin, a été endossé par les bactéries, on passe à un thriller noir, totalement paranoïaque : Hal Cousins perd confiance en son gouvernement, en ses sponsors, en ses proches, et finalement en lui-même. Un groupe mystérieux connu sous le nom de Silk est capable de prendre le contrôle de n'importe qui par simple contamination bactérienne suivie de la dictée de quelques chiffres hypnotiques. La conspiration ancienne a introduit ses tentacules dans tous les services gouvernementaux. Hal ne peut plus compter que sur d'autres paranoïaques, comme Rudy Banning, un historien de renom discrédité par ses délires antisémites, ou Ben Bridger, ancien soldat reconverti lui aussi dans l'histoire militaire, qui avait accompagné Rob Cousins dans les dernières semaines de sa vie.

     Hal Cousins n'est pas un simple procédé de narration de l'intrigue ; il est doté d'une personnalité complexe, obsédé par sa rivalité souvent sans pitié avec son frère jumeau, méfiant et naïf à la fois envers les femmes, toujours prêt aux glissements de point de vue — avec Ben Bridger pour fournir un contrepoint narratif beaucoup plus cynique.

     Toutefois, j'ai surtout été sensible à l'aspect politique implicite du livre. La menace qui plane, en fin de compte, est celle d'un stalinisme paradoxal, reconverti à la faveur du post-soviétisme, qui trouve un terrain d'élection dans les services secrets américains. Comme Les Enfants de Darwin, ce livre a dû être écrit avant le Patriot Act, et pourtant on en sent les résonances. Si police et gouvernement étaient des ennemis dans Les Enfants de Darwin, le roman était finalement optimiste, mettait en scène des contre-pouvoirs efficaces, et esquissait un chemin possible pour l'évolution de la race humaine. En Quête d'Eternité, au contraire, réécrit le passé, et parodie, réfute ou épouse mainte théorie de conspiration cachée (au point que l'auteur s'est senti obligé de préciser dans une brève postface la part du vrai dans les références qu'il cite !). On a du mal à croire à tous les détails du complot, à reconstituer une image cohérente des événements qui nous bousculent tout au long du livre. On a trop peur pour prendre le temps de réfléchir, et les narrateurs ont tous les deux, à un moment ou un autre, été contaminés par les bactéries tueuses de volonté — de quoi remettre en doute leur récit tout entier, un peu comme dans le film Usual Suspects. Ce n'est que plus désespérant. Quelle efficacité dans la terreur politico-scientifique.

Pascal J. THOMAS (lui écrire)
Première parution : 1/12/2004 dans Galaxies 35
Mise en ligne le : 8/1/2009

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