BUCHET-CHASTEL Dépôt légal : février 2006 Première édition Roman, 400 pages, catégorie / prix : 20 € ISBN : 2-283-02133-2 ❌
Quatrième de couverture
À quarante-quatre ans, Hippolyte Sicher a tout réussi. Lui qui a entrepris des études médicales parce qu'il ne faisait pas confiance aux toubibs, est devenu neuropsychiatre dans un grand hôpital parisien. Entouré d'une secrétaire complaisante et d'un ami exubérant, Hippolyte Sicher mène une existence confortable qui lui permet d'assouvir ses deux principales passions : la musique et la phytothérapie (il ne fait toujours pas confiance aux médecins).
Il y a pourtant une ombre dans le passé du docteur Sicher. À l'âge de vingt-quatre ans, il a quitté la femme dont il était amoureux le jour de son mariage. La rupture s'est produite au cours d'une crise dont il a occulté le souvenir. Vingt ans plus tard, il va faire cependant une découverte prodigieuse : il possède la faculté de remonter le temps. Une seule condition lui est imposée : il ne sera que le passager de lui-même, le témoin de ses pensées et de ses gestes d'autrefois.
Ainsi va-t-il commencer une double vie : la première, le jour, dans les arcanes impitoyables de l'univers hospitalier, la seconde, la nuit, dans l'éternel été de sa jeunesse. Et tandis qu'il succombe de nouveau à l'envoûtement de la passion, des questions de plus en plus obsédantes se posent à lui : qui est ce jeune homme de vingt ans en qui il ne se reconnaît plus ? Comment a-t-il pu quitter cette jeune fille délicieuse ? Et surtout, surtout, est-ce que le passé, par hasard, n'accepterait pas de se laisser changer ?
Philippe Ségur est l'auteur, entre autre romans, de Poétique de l'égorgeur, paru eux mêmes éditions.
Critiques
Et on reparle de Philippe Ségur dans Bifrost, après Poétique de l'égorgeur critiqué dans notre numéro 37. Ce coup-ci, pour son quatrième roman chez Buchet-Chastel, Seulement l'amour, il nous revient avec une véritable (si, si) histoire de voyage dans le temps.
Hypocondriaque et neuropsychiatre à l'hôpital Cochin, Hippolyte Sicher a quarante-quatre ans ; il saute sa secrétaire Sylvia, roule en Aston Martin, s'intéresse à la musique et à la phytothérapie. Seule ombre au tableau : vingt ans plus tôt, il a abandonné la belle Mado le jour de leur mariage, sans être capable de se souvenir pourquoi. Cette ombre rémanente lui gâche un peu la vie, jusqu'à ce qu'il s'aperçoive que, soumis à certains stimuli (une chanson de Depeche Mode, un parfum), il peut voyager dans le temps, du moins dans son passé. Réussira-t-il à reconquérir Mado ? Et si oui, à quel prix ?
Soyons clairs : je suis très partagé. Toute la partie littérature générale m'a semblé brillante ; Philippe Ségur écrit très bien, bien mieux que la plupart des auteurs critiqués dans Bifrost, il excelle dans la description du quotidien, ses personnages sont très humains tout en restant absolument loufoques (on pense alors aux personnages d'Abe Kôbô, ou d'Haruki Murakami) mais la partie voyage dans le temps m'a fait l'effet d'un ressort narratif prétexte, du moins jusqu'à la moitié de la troisième partie, où elle prend, tardivement, toute son importance. Par ailleurs, j'ai déjà lu ça — ce cocktail de voyage dans le temps et d'histoire sentimentale — cent fois ; je citerai Replay de Ken Grimwood, Le Voyage de Simon Morley de Jack Finney, Le Jeune homme, la mort et le temps de Richard Matheson, et, surtout, Fugues de Lewis Shiner. Des références, incontournables à mon sens, auxquelles on ajoutera deux films : le formidable Peggy Sue s'est mariée de Francis Ford Coppola et L'Effet Papillon de Eric Bress et J. Mackye Gruber.
Seulement l'amour est un livre de science-fiction pour ceux qui n'en lisent jamais, une catégorie à laquelle les lecteurs de Bifrost n'appartiennent pas. On peut s'en plaindre, mais aussi s'en réjouir, en se disant que pas mal de gens qui ne lisent jamais de S-F vont y plonger, sans trop le savoir, grâce à Philippe Ségur, de plus en plus populaire, et à son sens de l'humour remarquable car humaniste (il est si facile d'être marrant en étant méchant).