Dans une ville virtuelle à l'image de Londres au XIXe siècle, une jeune femme est assassinée. Roberta Morgenstern, sorcière spécialisée dans les enquêtes criminelles, et son assistant, Clément Martineau, vont remonter le temps pour trouver l'assassin. La traque des suspects les entraîne en un tourbillon d'époques et de lieux, du Paris médiéval au Mexique des Aztèques. Tous les indices convergent vers le machiavélique comte Palladio, qui a ressuscité un quadrille de grands criminels pour renégocier avec le Diable son pacte d'immortalité.
« Une gigue endiablée qui confirme l'exceptionnel talent de son ordonnateur. N'hésitez pas, entrez dans la danse... »
Jacques Baudou, Le Monde
Hervé Jubert, né en 1970, a notamment publié une trilogie de SF chez J'ai Lu (Les aventures de Pierre Pélerin), un cycle fantastique aux éditions du Masque (La Bibliothèque noire) et deux trilogies mêlant enquête à la Dumas, fantasy et SF aux éditions Albin Michel : La Trilogie Morgenstern et La Trilogie Blanche.
Le roman s'ouvre sur un prologue très sombre : dans les ruelles londoniennes, une jeune femme se fait violer, assassiner puis éviscérer.
Où l'on fait ensuite plus ample connaissance avec les deux protagonistes du récit : Roberta Morgenstern, tout d'abord, vit à Bâle dans un appartement douillet. C'est une sorcière âgée d'une cinquantaine d'années qui travaille aux affaires criminelles sous les ordres du major Gruber. Puis Clément Martineau entre en scène : c'est un jeune blanc-bec de 25 ans, très sûr de lui et de ses méthodes d'investigation. Il comprend au fil de l'enquête qu'il est lui-même sorcier. Ce duo insolite et hétéroclite est chargé d'enquêter sur le meurtre commis dans la ville historique de Londres. Ce meurtre est un fait extraordinaire dans ce monde où la criminalité a presque disparu, grâce aux “traceurs”, sortes de mouchards ultra-rapides et très performants.
Les villes historiques sont des lieux factices créés par le comte Palladino et destinés au tourisme. Elles constituent des sortes de concentrés de tout ce qui fit autrefois l'essence et le cœur des grandes cités. C'est pourquoi Roberta et Clément se rendent successivement à Londres, à Paris, à Venise puis à Tenochtitlan. Ils y traquent quatre assassins : l'Eventreur, La Voisin, le comte Palladio en personne et enfin Montezuma, l'empereur aztèque déchu. Leur enquête pleine de fureur, de rebondissements et de coups de théâtre les conduit sur la piste du diable, avec lequel les quatre complices auraient conclu un pacte ... de dupes !
Hervé Jubert a du talent et de l'expérience puisqu'il est déjà l'auteur d'une trilogie de SF publiée chez J'ai lu et d'un cycle fantastique aux éditions du Masque. Il sait étonner son lecteur, l'amener là où ce dernier ne s'attend pas et ceci n'est pas si fréquent. Il mêle habilement plusieurs genres, policier, science-fiction, gothique, crée un duo détonnant, pimente son récit d'humour et de références. Un problème se pose cependant : qui est le destinataire de ce roman ? Albin Michel le publie dans une collection jeunesse. On pourrait donc légitimement le proposer aux lecteurs à partir de 12, 13 ans. Pourtant la scène du prologue me paraît déplacée dans un roman destiné à ces lecteurs-là car le viol et le meurtre de la jeune femme sont racontés avec un luxe de détails particulièrement racoleurs et l'ensemble est violent. Alors que les affaires de “tournantes”, de viols collectifs sont nombreuses et que certains adolescents sont en perte de repères, on peut tout de même s'interroger sur l'opportunité d'une telle scène. Sans cette réserve, le roman est excellent.
Dans le futur, on a reconstitué certaines villes du passé pour la joie des touristes. Ceux-ci ont ainsi la possibilité de séjourner dans le Londres du XIXe siècle, dans le Paris du XVIIe siècle... Ces cités, créations très prisées du puissant comte Palladio, sont pourtant un jour le décor de crimes atroces. Roberta Morgenstern, une sorcière, est chargée de mener l'enquête, accompagnée de Clément Martineau, un jeune policier fraîchement émoulu. Il connaît les procédures sur le bout des doigts, elle n'en a cure. Ce couple détonnant va apprendre à travailler ensemble, tout en démêlant les fils de ce qui, au long du roman, ressemble de plus en plus à un complot visant à invoquer le diable...
Ce roman publié dans une collection pour les adolescents est un savoureux mélange de science-fiction (les villes recréées, les gadgets technologiques...), de fantastique (le personnage de la sorcière, l'apparition de vampires...), d'aventures échevelées (qui nous mèneront de Londres à Paris puis à Venise et au Mexique) et d'humour (le gaffeur Martineau et la bourrue Roberta). On n'a donc pas le temps de s'ennuyer durant les quatre cents pages de ce roman, et on admire l'inventivité de son auteur, dont on avait déjà apprécié le talent dans des oeuvres proches, comme la série de la Bibliothèque Noire. Ici, on retrouve son attrait pour le rocambolesque, le steampunk, les machinations, les clins d'oeil au lecteur : dans la Bibliothèque Noire, le personnage pénétrait dans des romans. Ici, Roberta se voit dire par son supérieur : « Vous n'êtes même pas censée exister, Roberta. Sinon dans les livres d'enfants. »
Bref, un très bon roman pour les adolescents, parfois un peu complexe, parfois un peu violent pour le public visé (la scène d'ouverture, un viol raconté avec force détails), mais intelligent et hautement délassant. Que demander de plus, si ce n'est la date de parution du second tome des aventures de l'improbable mais très efficace couple Martineau / Morgenstern ?
Malgré une trilogie globalement décevante chez J'ai Lu (Les Aventures de Pierre Pèlerin), Hervé Jubert m'a toujours semblé avoir un fort potentiel, entrevu dans ses deux premiers romans parus dans la collection « Abysses » il y a quelques années. Après la lecture de ce Quadrille des assassins, je commence à douter...
Levons tout de suite une ambiguïté : si le roman paraît dans une collection pour la jeunesse, il n'en a pourtant aucune caractéristique et n'hésite pas à l'occasion à mêler violence et sexe — l'une des premières scènes du livre décrit un meurtre assez peu ragoûtant.
Le Quadrille des assassins ne relève de la S-F que de façon lointaine. L'époque n'est pas précisée, futur proche ou présent parallèle. L'action se déroule pour l'essentiel dans des villes-musées, reconstitutions de lieux emblématiques de périodes révolues : le Londres du XIXe siècle, le Paris de Louis XIV ou la Venise des Doges. Ces lieux, avec quelques autres, sont devenus des centres touristiques majeurs, sortes de Disneylands historiques.
Pour le reste, le roman de Jubert œuvre plutôt dans le registre du fantastique : son héroïne est une magicienne, la sorcellerie est présente tout au long du récit et le diable en personne viendra même faire une apparition. Qu'importe, Jubert a toujours affiché un dédain royal pour les genres, qu'il s'est toujours plu à mêler, plus souvent pour le meilleur que pour le pire, d'ailleurs.
L'intrigue en deux mots : Roberta Morgenstern, sorcière employée au Bureau des Affaires Criminelles, est chargée d'enquêter sur un meurtre commis dans le Londres reconstitué. Elle est accompagnée d'un jeune collègue, Clément Martineau, dont c'est la première mission. Ils découvriront rapidement que le tueur en question est un célèbre personnage historique — Londres, XIXe siècle, assassin, ai-je besoin de vous faire un dessin ? D'autres événements similaires vont bientôt se dérouler à Paris, conduisant les enquêteurs à s'intéresser au créateur de ces villes-musées, vieillard qui semble devoir sa longévité à autre chose qu'aux progrès de la science.
En premier lieu, Le Quadrille des assassins souffre d'un récit extrêmement linéaire : les personnages se rendent dans une première ville, résolvent l'affaire, partent pour une deuxième ville, etc. C'est le moindre de ses défauts. Le vrai problème, c'est que ce roman est d'une vacuité totale. L'univers mis en scène n'a pas plus d'épaisseur qu'un décor de théâtre. Les personnages ne sont ni attachants, ni sympathiques, ni même intéressants. Le style est totalement impersonnel. Et surtout, Jubert a beau multiplier les péripéties et les scènes d'action, en particulier dans le dernier quart du récit, on s'ennuie à pleurer. Certains de ces défauts étaient déjà sensibles dans les œuvres précédentes de l'auteur, mais ils n'ont jamais été aussi criants. Jusqu'alors, Jubert parvenait à les masquer derrière une imagination fertile et un goût pour l'insolite salvateurs. Cette fois, rien ne vient sauver le navire du naufrage.