« Et pourtant rien de ce qui est imaginaire n'est pure invention » écrit Jean-Louis Fetjaine dans la préface de cette encyclopédie, réunissant en un seul tome les trois volumes qu'Edouard Brasey a publiés entre 2005 et 2006 aux Éditions du Pré aux Clercs.
Le préfacier replace ainsi dans un contexte, sinon historique ou scientifique, du moins humain, la place qu'ont pu prendre les créatures du « Petit Peuple », les entités du bestiaire monstrueux et fantastique. Toutes sont nées d'une réalité déformée, fantasmée, enjolivée, rêvée par les humains.
Il faut resituer, à l'aube de son développement, le « malheureux » homo sapiens dans un environnement où il doit lutter contre la démesure de la nature. Il vit, en petites communautés, sur des zones entourées de forêts immenses ou désertiques peuplées de dangers et de prédateurs. Il s'éclaire avec de faibles moyens et ses pauvres lumignons ne suffisent pas à chasser l'obscurité profonde, la nuit très sombre, ce noir intense qui l'entoure. De plus, l'Homme aime parler, raconter. Pour combler ses lacunes à expliquer des phénomènes si naturels aujourd'hui mais si mystérieux hier, pour conjurer sa peur et ses terreurs, peu à peu se constitue un ensemble de récits oraux dans les veillées, dans les tavernes... Chaque conteur apporte sa participation à la construction par des histoires vécues ou non, des faits héroïques qui deviennent des légendes, en fonction de ses angoisses, de sa région, de son imagination, de son vécu et de ses espoirs. Il pare aussi un quotidien bien terne de merveilleux, il décrit mille monstres pour se donner un peu d'importance, de notoriété...
Ainsi, dans ce « pot commun » d'histoires, chacun puise, amende, enrichit, déforme, enjolive. Puis d'oral, cet ensemble passe à l'écrit, acquerrant alors une dimension supplémentaire, mais que l'on qualifie d'imaginaire.
Edouard Brasey a compilé, classé, ordonné tout ce qu'il a pu trouver sur ces créatures, ces héroïnes de récits plus ou moins légendaires, plus ou moins fantastiques, mais qui sont la mémoire du monde. Réunis en trois groupes principaux, il en détaille les différentes entités qui s'y rapportent, énumère les noms et les formes qui ont pu être attribués selon les pays, les régions.
Il donne en fin de volume une liste de sources bibliographiques impressionnante, de quoi se constituer une remarquable bibliothèque dédiée au genre avec plus de deux cent cinquante ouvrages.
Tout au long des quatre cent trente-quatre pages que compte cette encyclopédie, il a disposé une iconographie très complète, composée de tableaux célèbres ou non, d'illustrations et ...de créations de Sandrine Gestin. Je n'irais pas jusqu'à dire que l'on peut être tenté de n'acheter l'encyclopédie que pour les dessins de l'illustratrice, car ce serait faire injure au magnifique travail de M. Brasey, mais...
Cette petite encyclopédie du Merveilleux, qui synthétise des siècles de légendes et croyances, trouve sa place dans toute bibliothèque sérieuse d'un lecteur un peu curieux de mieux cerner l'histoire au quotidien de l'aventure humaine.
Serge PERRAUD
Première parution : 5/12/2007 nooSFere