— Coupe ! Tranche ! Perce ! Taille !

     Ce genre d'ordres, le chevalier les entendait à longueur de journée. Et vaillamment, le chevalier coupait, tranchait, perçait, taillait. Il le faisait avec courage, mais aussi avec patience : cela faisait dix-huit ans que, cinq jours par semaine, qu'il grêle, qu'il vente ou qu'il fasse un temps ordinaire, le chevalier coupait, tranchait, et ainsi de suite.

     Heureusement, il avait le samedi et le dimanche pour se reposer : le week-end, comme on dit maintenant. Mais, dès le matin du lundi, hardi ! Il recommencait à couper, à trancher, à percer, à tailler. C'était son trail. C'était ce qui lui permettait de ramener chaque mois à la maison suffisamment d'argent pour faire marcher son ménage.

 

     Jean-Pierre Andrevon

     Ecrivain de science-fiction, a publié chez Denoël, et obtenu en 1983 le grand Prix de la Science-Fiction Française pour la jeunesse avec « La fée et le géomètre » (Casterman).

     Don Quichotte revu et corrigé par Andrevon, héros-chevalier perdu dans un monde moderne où, du fait de son manque de caractère, il s'est finalement bien adapté. Le roman est plein d'idées mais sa pauvreté en surprises ne lui permet pas d'échapper à un conformisme décevant. Un détail positif, cependant : Andrevon n'a pas édulcoré son écriture. Il manie un langage riche et imagé, dépouillé des concessions imbéciles à l'enfance que certains, parfois, se croient obliger d'instaurer.