Les écrivains de science-fiction parlent peu, dans nos médias. Il faut dire qu'elle n'a pas très bonne presse, la science-fiction — tout juste accepte-t-on de parler des plus gros films, mais alors, quel silence autour des livres se revendiquant de ce genre. Pourtant, il est bien temps de les faire parler, ces écrivains. C'est la tâche que s'est fixé depuis des années Richard Comballot, qui interroge sans relâche et avec le sens du détail les auteurs les plus marquants de la science-fiction telle qu'elle se pratique en France. La démarche est à la fois littéraire (forcément), identitaire (mais le terme est sans doute piégé) et patrimoniale (car la mémoire manque à la science-fiction). Le résultat ? Un portrait impressionniste, dont les voix sont fort différentes mais toutes passionnées.
Cette science-fiction française, elle est mouvante, contradictoire, parfois provocante, parfois touchante... et ses « voix du futur » forment comment autant de portraits d'artistes.
1 - Préface, pages 5 à 9, préface 2 - Entretien avec Stefan Wul, pages 11 à 37, entretien avec Stefan WUL 3 - Entretien avec Michel Jeury, pages 39 à 93, entretien avec Michel JEURY 4 - Entretien avec Jean-Pierre Andrevon, pages 95 à 145, entretien avec Jean-Pierre ANDREVON 5 - Entretien avec Serge Brussolo (2010), pages 147 à 195, entretien avec Serge BRUSSOLO 6 - Entretien avec Jacques Barbéri, pages 197 à 229, entretien avec Jacques BARBÉRI 7 - Entretien avec Ayerdhal, pages 231 à 292, entretien avec AYERDHAL 8 - Entretien avec Pierre Bordage, pages 295 à 361, entretien avec Pierre BORDAGE 9 - Entretien avec Maurice G. Dantec, pages 363 à 407, entretien avec Maurice G. DANTEC
Critiques
Richard Comballot, outre ses éminentes activités d'anthologiste, mène depuis longtemps des entretiens fleuves avec les acteurs de la science-fiction française. Voix du futur en réunit huit. Quatre (Andrevon, Barbéri, Jeury et Wul) sont issus de Bifrost ; un (Dantec) provient de Temps noir, l'excellente et regrettée revue de polar des éditions Joseph K. ; un autre (Brussolo) a paru au fil des ans et de trois supports différents (L'Ecran fantastique, Phénix et encore Temps noir) ; enfin, deux (Ayerdahl et Bordage) sont inédits.
L'ouvrage adopte une approche chronologique qui se base sur la première publication de l'auteur. Stefan Wul ouvre donc le bal, on croise ensuite Michel Jeury (campé avant Jean-Pierre Andrevon par le biais de son roman initial de littérature générale et de ses deux Rayon Fantastique), et ainsi de suite jusqu'à Dantec. De la sorte, sans avoir l'air d'y toucher, Comballot déroule une sorte d'histoire en creux de la S-F en France, puisqu'il interroge les auteurs sur les collections qui les ont hébergés, les éditeurs avec lesquels ils ont travaillé, l'accueil critique qu'ils ont reçu, à côté de questions personnelles sur l'enfance, la découverte des livres et de la science-fiction, le milieu familial et social, l'éducation et tutti quanti. Visiblement épaulé par des notes fournies et une bibliothèque redoutable, il n'hésite pas à citer des propos antérieurs sans passer sous silence d'éventuelles contradictions et à évoquer des projets abandonnés, bref, à asticoter son sujet, si bien que même un Jacques Barbéri pourtant bonne pâte et complice en vient à maugréer « que [s]es putains d'interviews sont aussi éprouvantes que six mois dans l'audiovisuel et que je suis sur les rotules ».
Ce gros ouvrage n'a qu'un défaut, en fait : celui d'être trop court. On en ressort gavé d'envie de relectures, voire de lectures, heureux de voir des auteurs qu'on apprécie se montrer sans effort sous leur meilleur jour, quitte à se dévoiler d'émouvante façon, et désireux qu'une telle entreprise fasse, sinon des émules (il sera difficile d'égaler Comballot dans l'exercice : avec lui, même les fortes têtes passent à table sans trop rechigner), du moins des petits. C'est qu'il y a de la matière, en abondance, des dizaines d'entretiens déjà réalisés et d'autres en projet ou en cours. Chiche ?