Il faut croire que
Galaxies NS a du mal à trouver des textes francophones de bonne qualité, sinon comment expliquer que son numéro 12 s'ouvre sur un texte de Daniel Walther,
« La Musique de la chair », tiré de son
recueil éponyme (chez
Rivière Blanche). Un texte sans grand intérêt, pas particulièrement bien écrit (de jolis gisements d'adverbes çà et là) où l'auteur mêle (et pourquoi pas) chirurgie et musique, et ne fait rien (ou presque) du mélange potentiellement détonnant. Abscons. Suit une nouvelle de
Isaac Asimov Mike Resnick qu'on croirait tirée d'un
pulp des années 30-40, où un robot ménager anthropomorphe et un pasteur discutent de Dieu, un échange qui va mal finir, comme il se doit (que ce truc non écrit, déjà lu cent fois, parfois en mieux, ait été finaliste du
prix Hugo laisse sans voix). La sélection de fictions (hors dossier E.C Tubb) s'achève avec
« Dolorem Ipsum » de Ketty Steward, une nouvelle intrigante autour d'un culte de la douleur dans une société qui bénéficie, depuis leur invention en 2068, de chambres de régénération. Le texte, résolument ambitieux, joue sur de nombreux tableaux (références SF, érudition chrétienne, artifice de construction, exposition des changements sociétaux), mais au final les enjeux de l'histoire échappent au lecteur, trop sollicité par les clins d'œil, les notes de bas de page et une érudition un poil étalée. Si le résultat reste intéressant (malgré des problèmes de rythme), on imagine sans mal ce que
Greg Egan aurait fait d'un tel décor...
Le dossier E.C. Tubb /
Dumarest (sa création la plus célèbre, trente-trois volumes), quant à lui, est (très ?) réussi dans le sens où il donne envie de découvrir cet auteur anglais, ou de le redécouvrir pour ceux qui le connaissent déjà. Un dossier plus imposant que ce dont on a l'habitude chez
Galaxies NS, puisqu'il fait plus de cinquante pages. Le texte
old school de E.C. Tubb,
« La Chute de l'ange », est excellent.
Le numéro 13 commence par une nouvelle d'
Aliette de Bodard (située dans son habituel monde futur où les Chinois ont découvert l'Amérique avant les Européens) ambitieuse, mais très dure à suivre — de part sa construction, le nombre de mots étrangers présents dans la prose et les patronymes avec lesquels on s'emmêle volontiers. A noter que la traduction française, peu assurée, n'arrange pas les choses. On passe vite sur la nouvelle de
Robert J. Sawyer d'une stupidité bluffante, à l'arrière-goût particulièrement désagréable qui plus est. La nouvelle suivante, très caustique, signée
Martin Lessard, parle de surendettement (au carré) et de suicide, mais pas forcément de la façon dont ces deux fléaux entrent d'ordinaire en collision (un tout petit peu plus de soin au niveau du style et quelques coupes auraient sans aucun doute amélioré le texte, qui a pour lui d'être plein d'humour). Quant à
« Jours d'automne » de l'espagnol
Santiago Eximeno, il s'agit d'un texte assez fort sur la vieillesse qui évoque certaines nouvelles de
Ray Bradbury (il est toutefois permis de détester le type de chute choisi par l'auteur).
Les trois nouvelles du dossier SF nordique sont vraiment convaincantes, même si la construction de «
Mixomatose ForteTM », avec son énorme tunnel central d'exposition, m'a semblé être une cession à la facilité plus qu'autre chose.
« Les Chiens de Lanzarote », très
houellebecquienne, est la plus forte des trois.
Au final deux assez bons dossiers, E.C Tubb (n°12) / la SF Nordique (n°13), mais précédés par des nouvelles parfois exécrables (Robert J. Sawyer) ou sans grand intérêt (Daniel Walther, Mike Resnick).