Le Seigneur de l’Orage était un tyran en Outremonde. Il a laissé derrière lui une terrible prophétie : son premier petit-fils va réduire les humains en esclavage. Eugenie Markham est sa fille et elle est enceinte. Avant même qu’ils soient nés ses jumeaux suscitent les plus vives réactions. Adoration des uns, haine des autres... Eugenie doit sans cesse fuir pour les préserver de leur violent destin. Mais alors qu’elle pense avoir trouvé un havre de paix, les royaumes des Noblaillons doivent faire face à une menace bien plus dangereuse et immédiate que les futurs pouvoirs des nourrissons. Le temps est venu pour la jeune femme d’affronter l’inéluctable.

     « Le genre de livre que j’aime : des personnages inoubliables, un univers sombre, et juste la bonne touche d’humour. Un grand moment de lecture ! » Patricia BRIGGS

     On éprouve toujours un petit coup au cœur à la lecture du dernier tome d'une série. On se sent souvent partagé entre l'excitation de connaître enfin le dénouement et la certitude nostalgique qu'il n'y aura plus de retournement de situation possible. Vers quelles voies s'orientera l'auteur ? Serons-nous séduits ou au contraire anéantis par le futur entrevu dans les dernières lignes de ce récit ? Volet final de la saga du Cygne Noir, L'Héritier de l'ombre n'échappe pas à cette règle.

     Douée pour créer des personnages d'une grande complexité, Richelle Mead s'ingénie sadiquement à les confronter à des décisions difficiles. Dans les trois premiers tomes, la vie d'Eugénie Markham, notre petite chamane, a fortement évolué. Son regard sur son entourage en a été profondément changé. Bien qu'elle ait dû remettre en question ses convictions, la jeune femme s'est toujours efforcée de choisir au mieux son avenir. Le scénario a ainsi pris des tours et des détours qui ont enrichi l'intrigue principale et complexifié l'ensemble pour notre plus grand plaisir.

     Comme dans les tomes précédents, l'univers de L'Héritier de l'ombre est soigné. Les descriptions des paysages terriens comme d'Outremonde, très précises, s'agrémentent de saveurs et d'odeurs qui facilitent l'immersion du lecteur dans l'imaginaire de Miss Read.

     Dans ce dernier opus, le thème principal réside dans l'inquiétude d'Eugénie quant à l'avenir de ses futurs enfants. Le parti pris de créer une héroïne de bit-lit enceinte s'avère assez audacieux tant ces femmes sont confrontées à une vie hasardeuse et dangereuse. Mener à bien cette grossesse devient une gageure entre ses ennemis qui veulent la mort des jumeaux et les risques habituels d'une naissance multiple. A ce titre, la gravidité avancée de la future maman réduit significativement le nombre de scènes musclées. Et quand cette situation s'éclaircit quelque peu — je ne peux m'étendre sur le sujet sous peine de dévoiler trop l'histoire — Eugénie a des états d'âme amoureux assez envahissants au regard de l'équilibre du récit. De fait, même si le lecteur est plutôt curieux de connaître les réponses aux diverses questions que se pose la jeune femme, toutes ses interrogations ralentissent dangereusement le rythme de la première moitié du livre.

     Heureusement, les velléités expansionnistes d'une reine d'Outremonde ambitieuse injectent un peu d'action dans un scénario un brin introspectif. Pour lutter contre un ennemi commun, l'union faisant la force, Richelle Mead profite de ce dernier tome pour appeler à la rescousse un bon nombre des personnages secondaires de la série. Le soin qu'elle apporte à dépeindre chaque caractère marque la force et la qualité de cet auteur. Enfin, le rythme s'accélère — surtout qu'une seconde intrigue se révèle dès la résolution de la première — et les interactions entre les protagonistes, riches en révélations, nous mènent jusqu'à un surprenant bouquet final !

     Alors, déçu ou comblé ? En fait, un peu des deux, car la fin très ouverte ne satisfait pas ce besoin d'un destin propre et net pour tous. C'est un peu frustrant tout de même ! A moins que Richelle Mead ne se soit ménagée là une ouverture pour une possible suite avec, pourquoi pas, un spin off à partir de l'un des personnages secondaires ? Un peu d'espoir ne fait de mal à personne !