Du XIXe siècle à aujourd'hui, le fantastique a tenté les plumes les plus célèbres, comme de moins connues. Le public, de son côté, a suivi, et les éditeurs lui offrent un large éventail de textes.
La demande du public n'explique pas tout. Il faut se tourner aussi du côté des créateurs. Pour certains d'entre eux, le fantastique est un besoin, une interrogation ou une façon de s'expliquer. Il est rarement gratuit ou simple phénomène de mode.
Balzac lui confie ses méditations ; Gautier laisse filtrer ses hantises dont ses contemporains nous ont gardé témoignage ; Maupassant nous ouvre le domaine de la peur où sa folie et des dispositions héréditaires l'ont conduit.
Chez nos contemporains encore, que d'aveux ! Ghelderode se met en scène, par personnages interposés, dans ses Contes crépusculaires ; Claude Seignolle avoue : « Je suis un grand peureux » ; Marcel Thiry interroge le Temps ; Marcel Brion se heurte au monde des apparences, etc.
Aborder la littérature fantastique dans nos pays — France, Belgique francophone — ne signifie pas renoncer à la « grande » littérature, mais l'éclairer d'une lumière qui en avive les couleurs ou la compléter. La peau de chagrin est une grande œuvre de Balzac, les contes sont la meilleure partie de celle de Maupassant, comme celle de Nerval ne se conçoit pas sans Aurélia.
Cet essai, qui aborde une trentaine d'œuvres, permet de mesurer l'apport du fantastique — trop méprisé jusqu'ici, mais qui fait son chemin — à la littérature française, comme de prendre connaissance de la part des écrivains belges, ignorés (ou presque) par les études parues à ce jour.