PRESSES DE LA CITÉ
(Paris, France) Dépôt légal : octobre 2014 Première édition Roman, 496 pages, catégorie / prix : 23,50 € ISBN : 978-2-258-10917-9 Format : 14,0 x 22,5 cm Genre : Science-Fiction
« Le roman qui ose regarder le futur droit dans les yeux. »
Alastair Reynolds
2040. Le monde est plus que jamais en proie aux dérives technologiques. Les agences gouvernementales sont déterminées à éradiquer toutes les recherches scientifiques pouvant constituer un danger pour l'humanité. Parmi ces menaces : nexus, une nano-drogue qui permet à ses consommateurs de connecter leurs cerveaux.
Kade, un jeune et brillant biologiste, consiédère cette drogue comme un immense progrès pour la société, offrant des possibilités de communication illimitées. A l'aide d'une poignée d'amis, et malgré l'illégalité d'une telle entreprise, il parvient à l'améliorer. Mais ses recherches attisent bientôt les convoitises...
Des couloirs universitaires aux coulisses du pouvoir, du siège d'une agence d'élite de Washington à un laboratoire secret de Shanghai, des fêtes clandestines de San Francisco aux marchés illicites de biotechnologie de Bangkok, en passant par un monastère bouddhiste, Nexus met en scène avec brio notre univers au bord de l'implosion.
Ramez Naam est un ingénieur informaticien renommé, qui a collaboré au développement d'Internet Explorer et d'Outlook. Nexus, son premier roman de science-fiction, a obtenu un vif succès, tant public que critique, et a été couronné par le prestigieux Prometheus Award. Il sera bientôt adapté au cinéma.
Critiques
Je ne suis pas sûr que le fait de présenter l’auteur comme un ingénieur informaticien qui a collaboré au développement d’Internet Explorer et Outlook soit un indice fiable quant à la pertinence du fort contenu scientifique qui sous-tend ce roman. De fait, on se fiera davantage à son essai, More Than Human : Embracing the Promise of Biological Enhancement, pour convenir que Ramez Naam a déjà réfléchi plus qu’un peu aux possibilités d’amélioration biologique du corps humain, et, du coup, accorder à son roman le bénéfice d’une base sérieuse quant aux sciences et technologies qu’il met en œuvre.
Car Nexus, premier tome d’une trilogie dont le deuxième volume est paru fin 2014 aux États-Unis, tape en plein dans l’évolution de l’espèce humaine : le Nexus du titre, c’est une drogue permettant l’implémentation d’un système d’exploitation informatique sur le support physique que constituent neurones et synapses. Résultat : les capacités mentales sont décuplées, et il devient possible d’envisager un réseau de cerveaux communiquant entre eux. Kade, un jeune étudiant à l’origine de la création de Nexus (avec une poignée d’amis), possède en permanence ledit système bien au chaud dans son crâne. Lors d’une soirée où près d’une centaine de personnes échangent entre elles, Sam, une agente de l’ERD – la brigade gouvernementale de surveillance des dérives liées à l’ingénierie génétique –, s’infiltre et arrête le jeune homme. Le deal est simple : pour éviter la prison, il va falloir collaborer en espionnant Shu, une scientifique chinoise impliquée dans de nombreuses manipulations interdites par la loi. Kade se rend donc en Chine avec Sam pour s’apercevoir que Shu est déjà beaucoup plus avancée que lui dans le transhumanisme, et qu’elle a une toute autre version des faits que l’ERD lui reproche…
Ceci n’est que le point de départ d’un thriller extrêmement efficace, rythmé de bout en bout, à l’écriture très visuelle – aucune surprise quant au fait que le bouquin soit optionné par le cinéma. La position de Ramez Naam est clairement en faveur du transhumanisme (l’augmentation des capacités humaines par les manipulations génétiques et les nano-machines), considérant, de son point de vue, tout ce qu’il peut apporter à l’homme en termes de nouvelles capacités physiques et mentales. Kade et ses amis sont ainsi les victimes innocentes des manipulations de l’ERD, laquelle agence est dirigée par des pantins qui n’hésitent pas à recourir à la force pour protéger leur territoire, quitte à y laisser des vies humaines. Quant au stade suivant de l’évolution, le post-humanisme incarné par Shu, il nous est présenté sous un jour des plus progressiste et bienveillant. Naam s’affiche ainsi en pourfendeur d’une certaine frange américaine, conservatrice sur les aspects d’expérimentation scientifique. On aurait néanmoins aimé qu’il donne ici la parole à un défenseur crédible du statu quo, un contradicteur censé, plutôt qu’à un fantoche prêt à appuyer sur le bouton pour lancer ses barbouzes. Bref, pour le débat d’idées, on repassera… Dommage. En l’état, Nexus fait donc office de vulgarisation des théories de l’auteur énoncées dans More Than Human et lors de conférences qu’il a l’habitude de donner. Des théories qui, pour complexe qu’elles soient, n’en sont pas moins exposées de manière claire, et surtout parfaitement intégrées à la trame romanesque du livre ; pas de passage rebutant au jargon abscons, mais une vraie œuvre de vulgarisation, dans le sens noble du terme, où la simplification ne se traduit pas par un appauvrissement du contenu technique. Et comme nous sommes dans un thriller mené tambour battant, le plaisir de ces spéculations scientifiques est aussitôt mis en pratique lors de scènes (d’action, généralement) mettant en pleine lumière les bienfaits vantés par Ramez Naam. La narration est fluide, et les coups de théâtre bien amenés malgré quelques grosses ficelles inhérentes au registre du thriller cinématographique.
Au final, Nexus se révèle une très bonne découverte, un premier roman intelligent, énergique, au service d’une idéologie assumée et dont on ne peut qu’attendre la suite avec une certaine impatience.
Dans les États-Unis de 2040, des lois d’exception ont interdit toute recherche pouvant conduire à la création d’humains augmentés et ont créé l’ERD, la direction des risques émergents, une agence gouvernementale omnipotente chargée de ce sujet.
Kade, un jeune étudiant biologiste et informaticien, a fait évoluer une drogue prohibée, le Nexus 3, vers le Nexus 5, qui connecte des cerveaux entre eux pour partager pensées et émotions. Cette drogue permet tout simplement l’installation dans le cortex d’un mini système d’exploitation informatique, contrôlant le corps et l’esprit, agissant à la fois comme multiplicateur des capacités mentales, comme couche réseau de connexion à d'autres cerveaux et comme pare-feu de protection. Lors d’une soirée de partage de Nexus, un agent infiltré de l’ERD conduit à la capture de Kade et de ses amis. L’ERD fait chanter Kade : s’il ne les aide pas à espionner Su-Yong Shu, la spécialiste chinoise du domaine, il finira sa vie en prison ainsi que ses compagnons. Il est alors envoyé en Thaïlande pour assister à un séminaire international pendant lequel il devra se faire embaucher par Su-Yong Shu.
Ramez Naam, à côté de sa carrière d’informaticien, est avant tout un chantre du transhumanisme. Avant Nexus, il a écrit More than human, un panorama de la recherche scientifique actuelle et à venir d’amélioration du corps et de l’esprit ; il donne aussi des conférences sur ces sujets.
Nexus est une extension romanesque de son œuvre de futurologue : si l’introduction avec sa scène de sexe folklorique qui tourne mal parait plutôt légère, l’écrivain retrouve vite son sérieux pour mêler à une intrigue de thriller politique ses préoccupations éthiques et techniques. Le futur américain que propose Naam est glaçant : les lois bloquant toute recherche sur l’augmentation du corps humain rappellent les débats autour de l’utilisation des cellules souches et les restrictions imposées sur le sujet par George W. Bush suite aux pressions de son entourage le plus conservateur. Ramez Naam, à travers son personnage principal, se prononce clairement contre les entraves à la recherche.
Mais pour autant l’auteur n’oublie pas qu’il écrit un roman et mène celui-ci à bon rythme : alternant les rencontres et dialogues fourmillant d’idées avec des scènes d’actions impressionnantes, il ne laisse pas au lecteur le temps de s’ennuyer et ne tombe jamais dans la lourdeur didactique qu’un récit aussi pointu techniquement pourrait entrainer. Saluons au passage l’excellente traduction de Jean-Daniel Brèque qui a dû beaucoup se documenter pour rendre tous ces concepts en Français.
Plus qu’un simple technothriller, Nexus est un roman intelligent et rythmé mêlant science et réflexion tout en se mettant à portée des lecteurs. Une excellente surprise !