Le Maedre est la collection jeunesse des éditions de L'Atalante. Bien que créée en 2006, elle n'avait jusqu'à présent publié que très peu d'ouvrages, en fait les derniers livres du seul Andreas Eschbach. Depuis mai 2008, L'Atalante a semble-t-il décidé de passer à la vitesse supérieure, puisque ce n'est pas moins de trois ouvrages qui sont parus simultanément sous la direction de Stéphane Manfrédo : un Pelot, Les croix de feu, non SF, Le Graal du Gobelin, de Jim C. Hines, et donc ce Mystère Olphite de Carina Rozenfeld, jeune auteur dont c'est ici le premier livre publié.
Dès les premières pages, on sait qu'on aura affaire à un roman d'apprentissage : un jeune homme de 17 ans, Maor, sort en pleine nuit de l'école Olphite située quasiment au sommet du Mont-Blanc, pour s'enfuir dans la neige et échapper aux prêtres de l'ordre. Pourquoi ? C'est ce que nous allons découvrir, en même temps que nous sera révélée l'histoire des Olphites. Il s'agit d'hommes — les femmes ne sont pas concernées — capables, suite à la chute d'une météorite sur la Lune, d'établir un lien télépathique avec des comètes. Dépassant l'entendement, leur pouvoir leur confère une aura de quasi-sainteté : l'ordre Olphite est ainsi créé, et va affermir de plus en plus son pouvoir politique. Jusqu'au jour où une comète menace la planète Terre d'un cataclysme, et où les Olphites peuvent peut-être proposer une solution au reste de l'humanité...
Ce roman est d'une facture très classique : une course-poursuite dont la proie n'est autre qu'un garçon dont on sent bien qu'il est appelé à dépasser sa condition et à accéder à une certaine révélation. Les aspirations des Olphites sont dévoilées peu à peu, de même que la raison de l'évasion initiale de Maor, ainsi que l'histoire des Olphites, dévoilée progressivement à travers des extraits de publications ou de journaux intimes situés en début de chapitre — ce qui la différencie clairement de l'essentiel du roman, à savoir la fuite de Maor. De ce point de vue formel, Carina Rozenfeld s'acquitte de manière tout à fait satisfaisante de sa tâche : les personnages sont crédibles, travaillés, même si certaines réactions surprennent : ainsi, page 227, un des personnages s'inquiète de la santé d'un de ses amis auprès de leurs ravisseurs, peut-être mort ; toutefois, il part dans ses rêveries pendant quelques secondes avant de faire attention à la réponse, pourtant cruciale. Le développement de l'intrigue est quant à lui parfaitement maîtrisé, même si tout cela paraît un petit peu trop « sage » — mais il est vrai que ce livre s'adresse à la jeunesse.
Il faut donc aller chercher ailleurs ce qui fait la vraie personnalité de ce livre : la réponse réside dans son aspect poétique. Des hommes qui entrent en contact télépathique avec des comètes, dit comme ça, ça paraît bizarre, pour tout dire un peu absurde et peu crédible. Pourtant, l'auteur réussit à nous faire adhérer à cette vision sans que nous trouvions cela ridicule, par petites touches, tout d'abord subjectives (des descriptions médicales) puis objectives, lorsqu'un des protagonistes décrit ce qu'il vit/voit. Et, finalement, lorsqu'on a affaire à une comète pensante, nous ne sommes pas surpris. Un beau tour de force.
Le Mystère Olphite marque donc les débuts convaincants de Carina Rozenfeld dans la littérature de SF jeunesse. Malgré quelques défauts inhérents à toute première œuvre, ce livre nous donne l'occasion de découvrir un auteur prometteur et attachant.