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Autochtones

Maria GALINA

Traduction de Raphaëlle PACHE

AGULLO (Villenave d'Ornon, France), coll. Agullo Fiction précédent dans la collection suivant dans la collection
Date de parution : 23 janvier 2020
Dépôt légal : janvier 2020
Première édition
Roman, catégorie / prix : 22 €
ISBN : 979-10-95718-69-7
Format : 14,0 x 20,0 cm
Genre : Science-Fiction


Quatrième de couverture

Dans une ville d’une ex-république soviétique, à la frontière entre l’Est et l’Ouest de l’Europe, aujourd’hui envahie de touristes, débarque un certain Christophorov. Il arrive de Saint-Petersbourg, se prétend journaliste ou historien et enquête sur un groupe artistique et littéraire des années vingt, « Le Chevalier de Diamant ». Ce groupe aurait créé un opéra, La Mort de Pétrone, qui ne donna lieu qu’à une seule représentation : la légende raconte qu’une crise de folie collective aurait frappé le public, se terminant en orgie générale. Peut-être parce qu’on aurait versé dans le champagne des invités de la poudre de cantharide, un puissant aphrodisiaque… À la suite de ce scandale, le groupe fut dissout et ses membres semblent s’être évanouis sans laisser de traces.
Christophorov tente de remonter leur piste, en interrogeant quelques vieux mémorialistes ou collectionneurs, tous ravis de lui prêter main forte. Un peu trop ravis, peut-être ? À mesure que son enquête avance, Christophorov remarque dans la ville une kyrielle de détails ou de phénomènes qui suscitent une impression d’inquiétante étrangeté. Et les autochtones qui s’intéressent de plus en plus près à ses recherches ne sont pas les moindres de ces étrangetés…

Critiques

[Critique parue exclusivement dans la version numérique de la revue]

 

    Une ville, quelque part en Ukraine post-soviétique. L’incertitude règne en maîtresse sur des terres autrefois polonaises, austro-hongroises, soviétiques et désormais en proie au tourisme de masse, des hordes de Japonais rendant périlleuse la traversée du centre-ville. La Wehrmacht a sillonné les lieux jadis, raflant les Juifs pour les expédier vers leur destination finale, avant de succomber à son tour à la pression de l’armée rouge. De cette époque, la ville garde diverses traces, surtout dans les mémoires de vieux messieurs attachés à leurs secrets. Débarqué de Saint-Pétersbourg en qualité de journaliste enquêteur œuvrant dans le domaine de l’art, un inconnu se pique de curiosité pour un groupe de l’avant-garde artistique des années 1920 qui aurait donné une unique représentation à l’opéra du coin. Une œuvre intitulée La Mort de Pétrone, dont on raconte qu’elle aurait plongé le public dans la folie collective. Sauf qu’une fois sur place les obstacles s’accumulent, compliquant l’enquête. Les faits échappent à la mémoire des vieux barbons du cru, ex-directeurs littéraires, collectionneurs, archivistes et autres critiques d’art. Ils plongent également les rares descendants des interprètes de l’opéra dans les faux-fuyants, au point de susciter le malaise, d’autant plus qu’autour de cette représentation gravitent tout un tas de curieux, chauffeur de taxi, vieux monsieur trop poli pour être honnête, riders sans entraves et serveuse au café bien trop empressés à voir solutionner l’énigme de cette unique représentation.

    Second roman traduit dans nos contrées après L’OrganisationAutochtones confirme la singularité de l’imaginaire de Maria Galina. De cet univers volontiers absurde, aux références littéraires foisonnantes, mélange de post-soviétisme dépressif et de fantastique lorgnant du côté du réalisme magique, on ressort un tantinet déstabilisé. Les autochtones de l’autrice russe ne se livrent pas sans quelques efforts. Pratiquant l’art de l’ellipse, semant la confusion et cachant les faits sous de multiples couches de mensonges, ils suscitent une impression d’inquiétante étrangeté. Et les moins inquiétants ne sont pas ces créatures échappées d’un bestiaire fabuleux, vampire, loup-garou, sylphe, salamandre, dieu sumérien et autres extraterrestres. Bien au contraire, les personnages les plus dangereux errent aux marges de la normalité, faisant de la banalité de leur existence une couverture efficace. Dans une forme narrative ne ménageant guère la suspension d’incrédulité, Maria Galina nous immerge au cœur d’une intrigue tortueuse, aux marges de l’histoire tragique de ce bout de continent européen, de l’enquête policière et du fantastique. Pratiquant le changement de cadre impromptu, mêlé à une certaine forme de poésie, l’autrice déboussole le lecteur, prenant un malin plaisir à l’égarer dans un récit labyrinthique et redondant, où chaque détail prosaïque, chaque référence érudite, contribue à la bizarrerie de l’ensemble et recèle une part de vérité dont le sens ne se dévoile qu’à force de ténacité. Bref, Autochtones n’usurpe pas sa qualité de lecture rude, mais finalement suffisamment bizarre pour que l’on ait envie de pousser l’expérience jusqu’à son terme. Avis aux amateurs.

Laurent LELEU
Première parution : 1/4/2020 dans Bifrost 98
Mise en ligne le : 12/1/2024

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