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Trois âges de la nuit - Histoires de sorcellerie

Françoise MALLET-JORIS


Illustration de Pierre FAUCHEUX

LIVRE DE POCHE (Paris, France) n° 3861
Dépôt légal : 3ème trimestre 1977
Recueil de nouvelles, 448 pages, catégorie / prix : nd
ISBN : 2-253-00048-5
Format : 11,0 x 16,5 cm
Genre : Imaginaire


Pas de texte sur la quatrième de couverture.
Sommaire
Afficher les différentes éditions des textes
1 - Anne ou le théâtre, pages 7 à 108, nouvelle
2 - Elisabeth ou l'amour fou, pages 109 à 258, nouvelle
3 - Jeanne ou la révolte, pages 259 à 430, nouvelle
4 - Note sur la sorcellerie, pages 431 à 437, notes
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition GRASSET, (1968)

     La sorcellerie a déjà été étudiée par des historiens (Michelet, Jean Palou), des folkloristes (Claude Seignolle), des ethnologues (Margaret Murray). La sorcière a été l’héroïne de multiples romans et nouvelles. Dans Trois âges de la nuitFrançoise Mallet-Joris, peintre de l’âme féminine, attachée à démasquer ce qui se cache d’égoïsme, de fourberie, de cruauté, dans les relations humaines, récemment convertie au catholicisme et très sensible au problème du mal, a mis en œuvre toutes ses qualités de romancière, d’historienne (elle a écrit une biographie de Marie Mancini), pour nous donner trois portraits vivants de sorcières.

     Les trois cas évoqués Anne de Chantraine, brûlée à dix-sept ans ; Elisabeth de Ranfaing, possédée, exorcisée et fondatrice d’un ordre religieux ; Jeanne Harvilliers, fille et petite fille de sorcières, brûlée également, se produisirent aux alentours de 1600, lors de la plus grande épidémie de sorcellerie qui affligea la France du milieu du XVe siècle au milieu du XVIIe, dans le nord-est (la Lorraine fut un grand foyer de sorcellerie) et dans la Flandre du sud.

     Cette épidémie fut provoquée avant tout par la misère des paysans, une misère abrutissante, qui put parfois les conduire au cannibalisme (p. 349). Les paysans cherchèrent des responsables : ils crurent les trouver en la personne des sorciers et sorcières ; il leur fallait aussi des boucs émissaires pour se laver des crimes que la misère leur faisait commettre : les sorciers furent contraints de jouer ce rôle. Mais pour la sorcière, la sorcellerie fut parfois aussi une révolte : révolte sociale de Jeanne qui rêve d’une terre de justice, révolte féminine et révolte tout court.

     L’époque est impitoyable pour les faibles pauvres, femmes, enfants. Ces trois femmes furent condamnées dès leur naissance : Anne, fille de colporteur (l’un des métiers qui compta le plus de sorciers) ; Jeanne, bohémienne, descendante de sorcières reconnues ; Elisabeth, détraquée par une mère malade, refoulée, abigotée. Le monde ne demande qu’à les nier ; par réaction, croît en elles la « fureur de survivre » (p. 235) : « Une femme qu’on traite en objet, qu’on traite en morte, qu’on traite comme si elle n’avait jamais existé, il faut qu’elle prouve qu’elle est une créature vivante, qu’elle peut encore avant de mourir donner la vie à quelque chose, fût-ce au mal et au trouble » (p. 242), Anne l’oubliée sera conduite au bûcher, pour avoir cédé à la « tentation d’exister de nouveau » (p. 91).

     « Dans ce monde où le mal a pris une forme mécanique », (p. 13) la Tentation acquiert une force redoutable ; Anne, Elisabeth et Jeanne cèdent dans un véritable paroxysme érotique (la crise de possession d’Elisabeth) à un désir d’anéantissement qui les laisse brisées, insatisfaites et prêtes à recommencer.

     Pris dans leur sillage, personne ne sort indemne d’avoir fréquenté une sorcière : brûlés Laurent, Christiane, initiateurs de Anne, Poirot, qui se laisse mener au bûcher par amour pour avoir voulu faire d’Elisabeth une femme normale ; durement éprouvés le bourreau, le greffier, Jean Bodin le juriste venu là pour trouver des raisons et la Raison, pour savoir avec certitude, et qui « demeure seul, vaincu » (p. 365).

     Françoise Mallet-Joris n’avait à sa disposition que fort peu de documents (sauf pour Elisabeth dont le cas a déjà été étudié) ; attentive aux moindres gestes, sensible à toutes les blessures, elle a réussi à faire revivre le drame de ces trois innocentes dans toute sa grandeur humaine. Écrit dans un style touffu, étouffant, parfois surchargé, ce livre dur, beau et émouvant, par la pitié et l’amour qu’on sent que l’auteur porte à ses héroïnes, s’imposera à qui veut maintenant se pencher sur la sorcellerie.

Alain GARSAULT
Première parution : 1/8/1968
Fiction 177
Mise en ligne le : 12/4/2023

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