ALLIA
(Paris, France) Date de parution : 20 août 2020 Dépôt légal : août 2020 Première édition Novella, 112 pages, catégorie / prix : 10 € ISBN : 979-10-304-1261-1 Format : 11,5 x 18,5 cm❌ Genre : Science-Fiction
Existe aussi aux formats ePub et PDF.
Quatrième de couverture
[présentation du livre sur le site de l'éditeur]
“Les médias et le monde financier percevaient ces productions périodiques comme les avatars étranges et tout à la fois lucides d’un monde toujours plus insaisissable. À la façon d’oracles qui formuleraient leurs prédictions sur la base de leurs propres visions passées, elles venaient combler les besoins de réponse croissants qui assaillaient tout un chacun. Il appartenait à Robert de canaliser la charge de ces angoisses existentielles et de l’exprimer dans des formes adéquates. Fascinantes, lumineuses, mutantes, comme le corps même qui lui fournissait son combustible.”
Savant pas totalement fou, Robert est en passe de bouleverser le monde de l’entreprise grâce à l’invention d’une nouvelle résine. Au moyen de ce matériau novateur, il parvient à concevoir des vitrines dans lesquelles circulent toutes sortes de données. C’est un triomphe : le rêve cybernétique semble sur le point d’être accompli. Mais dans un monde soumis à un capitalisme liquide et implacable, la situation dégénère et le rêve tourne au cauchemar.
Les entreprises clientes de Robert subissent bientôt une vague de meurtres et d’attentats sans précédent. L’efficacité du procédé révèle son corollaire : le crime.
Plongé dans l’horreur, dépassé par la situation alors que les investisseurs le somment de répondre de sa création, Robert médite sur son invention. Au comble de l’égarement, il perd tout contact avec la réalité et s’absorbe dans une rêverie lugubre. Fantasmes et réalité se mélangent jusqu’à un paroxysme de confusion, qui se résoudra dans un déchaînement de violence…
Gilles Ribero signe un premier récit original qui offre un regard dérangeant sur les dérives de l’entreprise et du capitalisme, faisant écho tant aux visions de J. G. Ballard qu’à l’horreur surréaliste de Lautréamont. Dans le monde de Robert aussi, technologie rime avec barbarie.
Critiques
Dans le futur proche de Clairières s’est fait jour une nouvelle déclinaison du métier d’architecte, exercée par Robert Gallant, le protagoniste de ce premier roman du plasticien Gilles Ribero. Celle-ci consiste à imaginer et bâtir des « vitrines virtuelles » à destination d’entreprises aussi bien désireuses de mettre en valeur leurs résultats économiques que de « remodeler » leurs espaces de travail. Lesdites vitrines sont ainsi nommées non pas du fait de leur inexistence matérielle — elles sont autant d’artefacts bel et bien présents — qu’à cause de ce qu’elles exposent au regard. Ces vitrines d’une nature inédite sont conçues pour « absorber toutes les données générées par l’entreprise sur une période donnée, les traiter et les réorganiser selon leurs qualités de résonance et leurs affinités ». Tenant à la fois de l’écran d’informations boursières high-tech et de l’installation d’art contemporain (leur esthétique mûrement pensée évoque un « décor expressionniste »), ces vitrines font encore office d’éléments de construction. Remplaçant les murs du bâtiment abritant une entreprise, elles encerclent les femmes et les hommes y travaillant de flux d’informations permanents. Tel a été, entre autres firmes au nom fleurant la start-up carnassière, le cas de « Clearance Inc. ». Cette même firme dans laquelle on retrouve un jour « les corps du directeur général et de ses associés dispersés dans les couloirs et les atriums, les membres éparpillés çà et là ». L’équipe dirigeante a-t-elle été victime d’une « mutinerie » ourdie par des employés rendus ivres de violence par cette nouvelle forme d’open-space ? Ou bien la résine dont sont faites ces vitrines, dotée à la grande surprise de ses concepteurs d’une capacité de reproduction propre, a-t-elle joué quelque rôle dans cette frénésie homicide ? À moins que Robert n’ait quelque responsabilité dans le massacre, lui dont le jeune fils Tom affiche un goût inquiétant pour la brutalité la plus hardcore ?
Serge Ribero laisse in fine ses lecteurs et lectrices libres de décider à qui (ou à quoi) incombe le triple meurtre de la Clearance Inc. Clairières n’a en effet que fort peu à voir avec un récit d’enquête science-fictionnelle. À peine ébauchée, l’orientation policière tourne très vite court, se diluant dans une science-fiction à peine plus assumée. L’idée de cette résine imitant un être vivant, matériau de ces vitrines incarnant littéralement les flux économiques, est pourtant riche en potentialités narratives. Mais celles-ci se noient dans l’évocation de l’intériorité de Robert, bien évidemment mise à mal par les dommages « collatéraux » de son travail. Retranscrites par une écriture non dénuée d’une certaine élégance, mais aussi trop souvent oraculaire ou théorique, les affres de Robert peinent à faire un roman. Et l’on a trop souvent l’impression d’avoir entre les mains, avec Clairières, le (long) texte d’accompagnement de quelque installation d’art contemporain…