GALLIMARD
(Paris, France), coll. Folio SF n° 706 Date de parution : 5 mai 2022 Dépôt légal : 2022 Réédition Roman, 688 pages, catégorie / prix : 8,70 € ISBN : 978-2-07-294784-1 Format : 10,8 x 17,8 cm❌ Genre : Fantasy
Rien ne va plus à Seth. Les castes inférieures, tiraillées par la faim et excédées par le mépris croissant de la noblesse, rêvent de révolte. Les puissants, eux, ne s’entendent plus. Il suffirait d’une étincelle pour que la capitale s’embrase. Lorsqu’un attentat ensanglante la très attendue cérémonie du millénaire de Seth, c’est tout l’Empire qui vacille sur ses fondations. Alors qu’Alfred de Pergoal, ingénieur de génie et créateur des plus beaux engins à vapeur de son temps, est accusé à tort de ce funeste crime, les différentes puissances déclenchent leurs offensives. Car si l’Empire s’effondre, la guerre, elle, ne fait que commencer, et elle sera totale…
Avec L’Empire s’effondre, Sébastien Coville signe le premier volume d’une trilogie grandiose, au croisement de la fantasy, du steampunk et du roman historique, qui fait écho aux questions contemporaines qui traversent nos sociétés.
[Critique parue exclusivement dans la version numérique de la revue]
Ce qui frappe avant tout avec L’Empire s’effondre, premier tome d’une trilogie éponyme, c’est la communication de son éditeur — quatrième de couverture et sites marchands notamment : on y voit passer des comparaisons avec Frank Herbert, Isaac Asimov, Jean-Philippe Jaworski, Eugène Sue et Alexandre Dumas. Excusez du peu ! Outre le fait que pour un premier roman, ce genre de parallèles a bien peu de chances de se révéler fondé (et, évacuons tout suspense, ils ne le sont pas), ils ont aussi le grand tort d’établir des attentes qui, si elles ne sont pas remplies, génèreront à coup sûr de la frustration. Sans parler du fait que la comparaison avec Herbert est fort limitée (la religion en tant qu’outil de contrôle) et paraît assez opportuniste (disons que c’est de bonne guerre) à l’approche de la sortie du film Dune…
Dans un empire où la technologie (centrée sur la vapeur pour l’essentiel) cohabite avec un système de castes professionnelles hyper rigide car établi par des dieux tutélaires conférant un pouvoir absolu aux Princes qui les dirigent, un attentat menace de faire s’effondrer tout l’édifice. En effet, les violentes émeutes qu’il provoque servent elles-mêmes à justifier une révolution de palais dans laquelle trois princes prennent le pouvoir au détriment des autres, tandis qu’un quatrième entre en guerre pour rétablir le régime théocratique. On sent clairement, à tous les niveaux, le potentiel de l’auteur, mais à chaque fois, quelque chose cloche : son écriture est souvent fluide et agréable, mais ne fait pas l’impasse sur des effets de manche stylistiques dont il aurait pu se passer (tout comme des quatre scènes de viol en cent pages !), sans parler de passages d’une emphase excessive et très clairement, de longueurs (l’ouvrage ne se serait pas plus mal porté dégraissé d’un bon quart) ; les personnages sont intéressants, mais le nombre de points de vue (une dizaine !) est effroyablement trop élevé, d’autant plus que certaines sous-intrigues sont achevées hors-champ et réglées d’un trait de plume (le conseil basique d’écriture « Montrer plutôt que raconter » est pourtant censé être connu de tous), quand ce n’est pas le personnage lui-même dont on se débarrasse sommairement sans qu’on comprenne l’intérêt de lui avoir consacré tant de pages ; le worldbuilding est travaillé et évocateur, mais montre aussi des détails peu crédibles, comme ces armes à feu à vapeur ou ces quartiers à étages s’accrochant au flanc des collines où se trouvent les palais des puissants ; enfin, l’aspect roman social fait lever les yeux au ciel tant il est du cent fois vu en Fantasy (si tant est que ce livre en relève, certains indices incitant au doute), avec sa stratification sociale se doublant d’une stratification spatiale, sa charge anticapitaliste, anti-élites, anti-religion, anti-journalistes, sa révolte prolétarienne, etc.
L’empire s’effondre n’est en aucun cas un mauvais roman (surtout pour une première œuvre), mais il n’est certainement pas non plus à la hauteur des comparaisons auxquelles se livre son éditeur. Coville a clairement du potentiel, et avec peu d’ajustements (et une communication plus sobre), le tome suivant pourrait être une spectaculaire réussite.
APOPHIS (site web) Première parution : 1/10/2021 Bifrost 104 Mise en ligne le : 12/1/2025
[Critique parue exclusivement dans la version numérique de la revue]
Ce qui frappe avant tout avec L’Empire s’effondre, premier tome d’une trilogie éponyme, c’est la communication de son éditeur — quatrième de couverture et sites marchands notamment : on y voit passer des comparaisons avec Frank Herbert, Isaac Asimov, Jean-Philippe Jaworski, Eugène Sue et Alexandre Dumas. Excusez du peu ! Outre le fait que pour un premier roman, ce genre de parallèles a bien peu de chances de se révéler fondé (et, évacuons tout suspense, ils ne le sont pas), ils ont aussi le grand tort d’établir des attentes qui, si elles ne sont pas remplies, génèreront à coup sûr de la frustration. Sans parler du fait que la comparaison avec Herbert est fort limitée (la religion en tant qu’outil de contrôle) et paraît assez opportuniste (disons que c’est de bonne guerre) à l’approche de la sortie du film Dune…
Dans un empire où la technologie (centrée sur la vapeur pour l’essentiel) cohabite avec un système de castes professionnelles hyper rigide car établi par des dieux tutélaires conférant un pouvoir absolu aux Princes qui les dirigent, un attentat menace de faire s’effondrer tout l’édifice. En effet, les violentes émeutes qu’il provoque servent elles-mêmes à justifier une révolution de palais dans laquelle trois princes prennent le pouvoir au détriment des autres, tandis qu’un quatrième entre en guerre pour rétablir le régime théocratique. On sent clairement, à tous les niveaux, le potentiel de l’auteur, mais à chaque fois, quelque chose cloche : son écriture est souvent fluide et agréable, mais ne fait pas l’impasse sur des effets de manche stylistiques dont il aurait pu se passer (tout comme des quatre scènes de viol en cent pages !), sans parler de passages d’une emphase excessive et très clairement, de longueurs (l’ouvrage ne se serait pas plus mal porté dégraissé d’un bon quart) ; les personnages sont intéressants, mais le nombre de points de vue (une dizaine !) est effroyablement trop élevé, d’autant plus que certaines sous-intrigues sont achevées hors-champ et réglées d’un trait de plume (le conseil basique d’écriture « Montrer plutôt que raconter » est pourtant censé être connu de tous), quand ce n’est pas le personnage lui-même dont on se débarrasse sommairement sans qu’on comprenne l’intérêt de lui avoir consacré tant de pages ; le worldbuilding est travaillé et évocateur, mais montre aussi des détails peu crédibles, comme ces armes à feu à vapeur ou ces quartiers à étages s’accrochant au flanc des collines où se trouvent les palais des puissants ; enfin, l’aspect roman social fait lever les yeux au ciel tant il est du cent fois vu en Fantasy (si tant est que ce livre en relève, certains indices incitant au doute), avec sa stratification sociale se doublant d’une stratification spatiale, sa charge anticapitaliste, anti-élites, anti-religion, anti-journalistes, sa révolte prolétarienne, etc.
L’empire s’effondre n’est en aucun cas un mauvais roman (surtout pour une première œuvre), mais il n’est certainement pas non plus à la hauteur des comparaisons auxquelles se livre son éditeur. Coville a clairement du potentiel, et avec peu d’ajustements (et une communication plus sobre), le tome suivant pourrait être une spectaculaire réussite.
APOPHIS (site web) Première parution : 1/10/2021 Bifrost 104 Mise en ligne le : 12/1/2025