À vingt années-lumière du système solaire, l’humanité tente de s’installer sur Hope, planète désertique et stérile. Après quatre générations à appliquer le programme d’une IA conçue sur Terre, les pionnières approchent du « jour de l’Espérance », seuil à partir duquel la croissance pourra reprendre. Malheureusement, les avaries s’enchaînent et l’espoir faiblit. Jade, ingénieure trentenaire, se lance à corps perdu pour sauver la Cité, délaissant son fils Asha. Conscient de sa différence, le premier garçon de
la colonie se réfugie dans le désert où il fait la rencontre d’un étrange animal…

Prises dans les tempêtes de sable, sans nouvelle de la Terre, les pionnières sauront-elles remettre en question les règles qui leur ont été imposées pour survivre ?

Curieuse et enthousiaste, Noëmie Lemos mène une triple vie d'ingénieure, d'autrice et de créatrice. Touche à tout dans ses lectures comme ses écrits, elle apprécie l'urban fantasy gastronomique, le steampunk à tendance électrique et la science-fiction dans toutes ses couleurs - du space opera à l'anticipation, chaque récit est pour elle l'occasion de faire réfléchir en douceur à des valeurs qui lui sont chères : respect, écologie, ouverture d'esprit.

Alors que l'humanité termine de se consumer dans les flammes et les boues chargées de plastiques, une expédition d'initiative privée est envoyée vers une planète distante, chargée d'embryons, de graines et d'un plan préétabli pour préserver le vivant et fonder une nouvelle civilisation. Quelques générations plus tard, sur la planète désertique Hope, une cité a commencé à se développer et ses habitantes luttent pied à pied contre le désert et le manque de ressources afin de permettre la croissance de la fragile colonie.

Le récit souffre de quelques défauts ; certains mystères semblent trop longtemps relever de la magie et bien des atermoiements ralentissent le rythme pendant la première moitié de l'ouvrage. La résolution des problèmes de la colonie est aussi un peu tirée par les cheveux et aurait mérité un peu plus de cohérence. Mais comme Kim Stanley Robinson nous donnait jadis dans sa trilogie le goût de vivre sur Mars, l'invitation de Noëmie Lemos à nous installer sur un nouveau monde tout aussi stérile est des plus agréables, et le fait que le début de l'histoire patine un peu nous permet de nous fondre nous aussi dans cette cité organisée de manière rationnelle, mais aux frontières de laquelle souffle un peu de liberté.

Surtout, Noëmie Lemos joue avec le genre tout en se payant le luxe de botter en touche la question du féminisme. Car si le féminisme s'entend aujourd'hui comme une mouvance militante pour promouvoir l'égalité entre hommes et femmes, la population de Hope est (presque) seulement féminine. Cette omniprésence n'est pas le résultat d'une lutte mais d'une considération réaliste : elles seules peuvent porter des enfants. Avec leur ADN légèrement modifié afin d'être plus résistantes et efficaces, les voilà toutes désignées pour être les premières sur un monde où tout est à construire, et en premier lieu à peupler. Par ailleurs, si le seul garçon présent sur la planète est une curiosité pour toutes, ce ne sera jamais pour ses particularités sexuelles ou sa virilité (lui-même cherchant à comprendre exactement sa différence) mais simplement parce qu'il est resté tout à fait humain, son génome n'ayant pas été préparé. La violence dûe aux hommes est un lointain souvenir, presque un mythe au sein de cette société apaisée. Tout juste l'autrice rate-t-elle une belle occasion d'étriller sévèrement la peur de l'autre et le racisme dans cette communauté où les disparités physiques commencent à apparaître tandis que les effets des modifications génétiques s'estompent.

Hope est un récit qui prend son temps et dont les personnages prennent soin d'eux, à l'image de la toute jeune maison d'édition Timelapse. La maquette est claire et soignée et le choix de l'impression en noir et blanc radical mais en rien dérangeant. On ne peut que pardonner les quelques faiblesses du récit mentionnées plus haut tant l'autrice et l'éditrice s'attachent à cultiver le cocon dans lequel elles nous accueillent, et il est tout à fait recommandable aux lecteurs lassés de récits trop remuants ou viriliste de faire une pause dans les dunes de Hope.