Réussite totale pour Les gobelins, prolongement romanesque original de la meilleure série TV de ces dernières années : Aux frontières du réel. C'est un vétéran des littératures de genre, Charles Grant, qui signe le premier ouvrage d'une série qui, aux USA, en compte déjà cinq — Grant est également l'auteur du second volume.
Mulder et Scully, assistés sur ordre de leurs supérieurs par les agents Licia Andrews et Hank Webber, enquêtent sur une série de meurtres commis à Marville, un bled paumé au fin fond des États-Unis, proche de la base militaire de Fort Dix. Les victimes ont toutes été égorgées alors qu'elles étaient en état d'ébriété. Les rares témoins parlent d'un bras armé ayant jailli d'une muraille ou du tronc d'un arbre, tandis que la rumeur fait état dans la forêt voisine de la présence de gobelins. Peu à peu, il devient évident qu'une expérience ultra-secrète menée à Fort Dix sur un cobaye humain est liée à la série d'assassinats. Au terme d'une enquête riche en rebondissements, l'assassin sera démasqué — son identité est une réelle surprise pour le lecteur ! N'en disons pas davantage. Selon l'usage, traîtres et agents à la solde d'un pouvoir occulte dissimulé au sein même de la hiérarchie du FBI (et du Gouvernement) se dresseront sur la route de notre couple d'enquêteurs de l'étrange préféré.
Notons que l'esprit et le ton du roman sont parfaitement conformes à ceux de la série — on retrouve bien les sorties humoristiques de Mulder : « Qu'est-ce que ça veut dire, Scully ? T'es en train de me torturer parce que je n'ai pas voulu regarder tes diapos de voyage ? » (p. 63). Dans les détails, Charles Grant a toutefois pris quelques distances. A plusieurs reprises, des scènes à connotation sexuelle sont insérées dans le récit, Mulder se montrant bien plus intéressé par les jeunes femmes passant à proximité que dans les épisodes de la série — à un moment Scully lui donne des coups de pied dans les tibias parce qu'il évalue du regard « avec un peu trop d'insistance » la capacité pulmonaire de l'agent Andrews...
On pourra également regretter une traduction parfois un peu rapide — « De toute façon, il ne s'attendait pas que le major l'emmène dans un restau snob » (p. 107). Mais la version originale m'a également laissé le souvenir d'une écriture privilégiant l'efficacité et l'avancée dans la narration sur d'éventuelles préoccupations stylistiques.
Francis VALÉRY
Première parution : 1/7/1996 dans Cyberdreams 7
Mise en ligne le : 15/9/2003