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Les Yeux électriques

Lucius SHEPARD

Titre original : Green Eyes, 1984
Première parution : États-Unis, New-York : Ace Science Fiction Books (New Ace SF Special #2), mai 1984   ISFDB
Traduction de Isabelle DELORD

Robert LAFFONT (Paris, France), coll. Ailleurs et demain précédent dans la collection suivant dans la collection
Date de parution : avril 1987
Dépôt légal : mars 1987, Achevé d'imprimer : mars 1987
Première édition
Roman, 288 pages, catégorie / prix : 92 F
ISBN : 2-221-05239-0
Format : 13,5 x 21,5 cm
Genre : Science-Fiction


Quatrième de couverture
     Les zombies correspondent-ils à une réalité scientifique ? C'est ce que pense le docteur Ezawa qui réanime pour quelque temps des cadavres frais en leur injectant des bactéries prélevées dans la terre de certains cimetières. Mais ce sont de nouvelles personnalités qui les habitent, surgies d'on ne sait où.
     Elles semblent porter à leur sommet certains traits de la nature humaine : talent, frénésie, cruauté. Tous paraissent possédés par quelque chose de plus qu'humain. Et les bactéries qui les animent prêtent à leurs yeux d'étranges reflets verts.
     Ainsi Donnell Harrison est dans sa nouvelle vie un poète génial et sombre. Il s'éprend violemment de sa thérapeute, Jocundra, et, grâce à son charisme, il la persuade de fuir avec lui la clinique Shadows.
     Commence une cavale folle qui les conduira dans les bayous de Louisiane à la recherche de la tradition vaudou qui pourrait affranchir Donnell.
     Du moins le croit-il...
     Ce premier roman de Lucius Shepard a été salué par la presse anglo-saxonne pour sa force, son originalité, son écriture et sa violence. Renouant avec d'anciens mythes, il ouvre de nouvelles voies à la science-fiction.
Critiques
     Après s'être imposé en premier dans Fiction, puis par un double recueil en « Présence du futur », ce Shepard-là, qui n'a aucune parenté avec Sam, nous surprend dans la foulée avec un premier roman, inclassable, qui joue à la fois sur la nouveauté et la tradition, sur le fantastique et la SF (celui-ci nourrissant celle-là), sur la familiarité et l'exotisme. Ce portrait lapidaire pouvait naturellement être fait à partir de la plupart de ses nouvelles (dont La fin de la vie, dans le recueil du même titre, possède valeur d'exemplarité). Dressé pour un roman, il accuse à la fois les qualités et les défauts de l'auteur. Le docteur Ezawa réanime des cadavres en leur injectant des bactéries prélevées sur des cadavres frais : les réanimés, ces nouveaux « zombis », ont tout oublié de leur ancienne personnalité et acquièrent celle émanant de ce broyât d'un nouveau genre... Voilà un thème éminemment silverbergien (on peut aussi penser, pour en rester au territoire d'A et D, à l'étrange roman de David Skal, Les croque-morts), mais en réalité cette possibilité romanesque-là, la mémoire des morts, ou l'échange de personnalité, ne semble pas vraiment intéresser Shepard...
     Après une très passionnante première partie confinée dans la clinique Shadows, on suit un des ressuscités. Donnell Harrison, qui s'en est enfui en compagnie d'une infirmière, Joncundra, laquelle est vite devenue son amante. C'est que Donnell, qui a intégré l'essence d'un poète et écrivain empli de visions cosmiques, commence à manifester un pouvoir qui lui vient des bactéries au travail dans son organisme (qui le « tuent » lentement, et se manifestent par des éclairs verts dans son regard, d'où le titre original, Green Eyes), et lui permettent de modifier le champ morfogénétique des êtres humains, donc de les guérir. La deuxième partie du récit, plus traditionnelle, se déroule ainsi en Louisianne, où Donnell et Jocundra se sont réfugiés (ils ont !e FBI aux fesses, mais cette incidence n'est guère exploitée), et où le premier guérit entre autres un cancéreux. La troisième partie enfin renoue avec le lieu clos, cette fois une sorte de phalanstère (ou de communauté) dirigée par une étrange femme, Otille, qui a réuni divers adeptes du vaudou et possesseurs de pouvoirs paranormaux. C'est là que les visions cosmiques de l'artiste Donnell vont rencontrer ses pouvoirs mal maîtrisés (II semble qu'il parvienne à pénétrer physiquement dans l'univers — parallèle ? — qu'il a mentalement créé), et que le zombi rencontrera son destin ambigu.
     Cette partie-là est certes la plus folle, la plus flamboyante, mais elle ne convainc pas entièrement à cause précisément de ses éclats divergents, et du flou de sa conclusion... Si j'ai insisté sur ce découpage en trois parties (non apparentes dans la continuité du texte), c'est qu'il s'agit bien là de l'impression ressentie à la lecture : Shepard a construit son récit sur une double rupture, aucune des parties ne développant vraiment ce que la précédente laissait entrevoir — d'où une certaine frustration pour ce qui est du domaine de la logique. Cette frustration n'entame aucunement le simple « plaisir du texte », car Shepard manifeste un art souverain pour mettre son lecteur dans le coup, grâce à sa prose à la fois très réaliste et, par à-coups, tout à fait hallucinée. Aussi loin des humanistes à la Robinson que des « cyberpunks » à la Gibson, voilà un écrivain à la voix entièrement originale qui, en trois volumes, s'est hissé sans mal au Panthéon de la jeune SF-US.

Jean-Pierre ANDREVON (lui écrire) (site web)
Première parution : 1/9/1987 dans Fiction 389
Mise en ligne le : 29/11/2002

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