LIVRE DE POCHE
(Paris, France), coll. SF (2ème série, 1987-) n° 7076 Dépôt légal : juin 1987 Roman, 512 pages, catégorie / prix : 9 ISBN : 2-253-04206-4 Format : 11,0 x 16,5 cm Genre : Science-Fiction
Heller avait voulu disposer du plus gros ordinateur de l'histoire afin de tout mettre en mémoire, de tout savoir et de tout prévoir.
Pour y parvenir, il avait relié entre eux tous les ordinateurs de l'Amérique.
Seulement, ce réseau, au lieu de produire de l'information, avait commencé à produire des puces.
Non pas des micro-processeurs, ni même des insectes, mais des sortes de bestioles toutes blanches, toutes plates, minuscules, innombrables, indestructibles, informatiques et métaphoriques, et qui étaient capables de dévorer n'importe qui ou n'importe quoi en un rien de temps.
Les puces habitaient le réseau, et comme le réseau s'étendait partout, il n'y avait aucun moyen de leur échapper.
A moins de débrancher le réseau.
Ce qui, Heller le savait, était devenu tout à fait impossible...
Theodore Roszak, théoricien de la contre-culture américaine, passe ici au roman.
Une puce est cet insecte bien connu, de l'ordre des diptères, qui n'a d'autre vocation que vous sucer le sang.
C'est aussi une pièce d'ordinateur, autrement appelée microprocesseur, qui consiste en un circuit intégré miniaturisé : c'est l'unité de base d'un cerveau mécanique, son neurone.
Le roman de Théodore Roszak est entièrement bâti sur cette homonymie, ce jeu de mot, qu'une enfant de six ans, la petite Daphné, transforme par peur et ignorance en jeu de sens : au cours d'une visite scolaire d'un Centre Informatique, elle comprend mal les explications qu'on lui donne et, comme elle se trouve douée d'étonnants pouvoirs psi, elle va matérialiser à l'intérieur de chaque ordinateur des nuées de « puces », insectes symboliques mais bien matériels, féroces et indestructibles, dont la prolifération paralysera les États-Unis, puis le monde, jusqu'à ce qu'on doive ensevelir tous les cerveaux mécaniques sous des tonnes de béton — comme on va le faire demain pour les centrales nucléaires.
Parabole sur la fragilité de la civilisation technologique, opposition de la science dure et des pouvoirs ancestraux, itinéraire d'un homme de pouvoir qui assiste à l'écroulement de son monde et de ses certitudes, roman fantastique qui convoque comme moteur de l'action un élément typiquement contemporain, histoire d'épouvante enfin, Puces noue tous ces liens et réussit le tour de force d'être passionnant et crédible de bout en bout malgré un postulat plutôt casse-gueule. Encore un de ces pavés américains dont on se dit à la sortie : quel film cela ferait...