Comment des agents temporels originaires du XXXIXe siècle font signer par Louis XI, en 1461, un édit abolissant les pratiques de l'inquisition avec trois siècles d'avance, sans pour cela provoquer de paradoxe temporel grâce à certaine jonglerie finale sur les lignes de temps parallèles...
Ou comment Gilles Novak, play-boy et rédacteur en chef de la mythique revue LEM (et projection amplifiée de Jimmy Guieu lui-même), accompagné de sa petite amie la ravissante (et un peu idiote) Régine Véran, visite les humides cachots d'un moyen-âge d'image d'Epinal au cours d'une de ces désormais banales « missions impossibles » dont il est coutumier.
Ouvrage au demeurant plutôt meilleur que les derniers parus de l'auteur, qui reste sympathique dans ses efforts de rendre vivants ses personnages et chaleureuses leurs relations (même si l'humour est épais), et qui demeure touchant de bonne volonté didactique grâce aux petites notices de bas de page estampillées « authentiques » dont il a le secret (même si ses références sont on ne peut plus contestables).
Grâce à un usage immodéré des archétypes de la « vieille » SF (pistolets multiray, scooters dégravités...) qui fonctionnent dans ses récits à la manière de collages (même si le procédé n'est pas volontaire), Guieu est sans doute l'auteur du Fleuve Noir qui se trouve le plus près de la bande dessinée : ses premiers romans (Au-delà de l'infini, etc.) sont d'ailleurs depuis un an ou deux adaptés en B.D. (malheureusement, par le médiocre Giordan) aux Editions Aredit de Tourcoing, dans leur magazine Sidéral, où ils figurent aux côtés de ceux de son confrère Richard-Bessière.
De la bande dessinée naïve à la littérature pour adolescents, il n'y a qu'un pas que je franchirai en écrivant qu'au sein d'une collection qui, à travers ses différents auteurs, semble viser des publics assez divergents, Guieu est sans conteste l'homme à qui il faut adresser en priorité le public naissant des « 12 à 15 ans » (ou des « 10 à 13 » ?). J'espère qu'il ne prendra pas cette opinion pour un dénigrement : sous ma plume, ce serait plutôt un compliment.
Denis PHILIPPE
Première parution : 1/1/1972 dans Fiction 217
Mise en ligne le : 28/4/2002