BÉLIAL'
(Moret-Loing-et-Orvanne, France) Date de parution : 23 février 2023 Dépôt légal : février 2023, Achevé d'imprimer : février 2023 Première édition Roman, 320 pages, catégorie / prix : 23,90 € ISBN : 978-2-38163-075-5 Format : 14,0 x 20,5 cm✅ Genre : Science-Fiction
Dépot légal à parution. Existe aussi en numérique au format ePub (ISBN : 978-2-38163-076-2) au prix de 11,99 €.
Quatrième de couverture
Qui est Silas Coade ? Où se trouve-t-il ? Et quand ?
Un médecin, sans doute, à bord de la goélette Demeter, à l’orée du XIXe siècle, perdu dans les eaux norvégiennes en quête d’un Édifice dont il ignore tout ? Ou plutôt à la fin de ce même siècle, non loin du pôle Sud, sur la trace de ce même Édifice, prêt à rejouer un désastre annoncé ? À moins qu’il ne soit dans les entretoises d’un dirigeable, quelques dizaines d’années plus tard, en route pour le cœur de la Terre, sur la piste, toujours, de cette structure cyclopéenne mystérieuse ?
Silas Coade est médecin, et il se peut qu’il ne cesse de mourir à jamais, ici, là ou ailleurs… À moins d’envisager l’inenvisageable, et d’affronter l’impensable.
Né en 1966 au Pays de Galles, Alastair Reynolds mène pendant des années une double carrière d’écrivain et d’astrophysicien au sein de l’Agence Spatiale Européenne. Auteur à plein temps depuis 2004, son cycle des « Inhibiteurs » est traduit dans le monde entier. Si le Publishers Weekly le considère comme l’un des auteurs de hard SF les plus doués de sa génération, il est avant tout l’héritier direct de cette science-fiction inventée par Olaf Stapledon, celle du parfait vertige et de l’émerveillement. Éversion en témoigne avec maestria.
« Un roman jubilatoire, une friandise rusée. À lire absolument. »
QUOI DE NEUF SUR MA PILE
Critiques
S’il est avant tout connu comme écrivain de hard SF et de space-opera, Alastair Reynolds porte un véritable intérêt pour le steampunk ou encore le roman d'aventure maritime, comme le prouvent Terminal World et la série Vengeresse. On ne sera donc pas surpris outre mesure qu'Éversion débute à bord d'une goélette du XIXe siècle, à la recherche d'une mystérieuse destination dans la mer de Norvège. Le noble Topolsky a monté une expédition sur la foi d’une carte énigmatique et, accompagné d’un mathématicien fiévreux et d’un vieux mercenaire venu des Amériques, il a engagé un petit équipage aguerri. Le narrateur est Silas, chirurgien de bord opiomane, un peu rêveur, un peu couard, sensible et attaché à ses patients. En dire davantage sur l’intrigue serait gâcher une série de révélations qui fait tout le sel de ce roman.
Qu’on sache simplement qu’Éversion va se déployer sur plusieurs époques, jusqu’à un futur lointain, et que ce déploiement n’est pas sans rappeler Exercices de style. La même histoire revient avec de multiples variations, s’étoffe petit à petit et épouse différentes formes : roman d’aventure maritime, merveilleux scientifique, SF de l’Âge d’or… Comme Raymond Queneau, l’auteur change de style et adapte son écriture aux canons des différents genres, offrant au lecteur une suite d’hommages malicieux aux prédécesseurs de la SF contemporaine.
Ce principe de boucle, de répétition, n’a rien de lassant, bien au contraire. On s’amuse beaucoup à retrouver les différents éléments de l’intrigue d’un chapitre à l’autre, des décors ou des détails qui se répondent, et même les incarnations successives des personnages à travers ces multiples variations. Les noms des protagonistes sont eux-même l’occasion de clins d’œil, comme celui de Dupin, qui évoque à la fois le chevalier Dupin de Poe et le mathématicien Charles Dupin.
Mais derrière le caractère très ludique du roman, au-delà de l’exercice de style mené avec brio, se dévoile l’un plus beaux romans de Reynolds porté par un personnage d’une « humanité » sidérante. Impossible d’en dire davantage sans gâcher le dénouement, si ce n’est que l’auteur réussit à faire du dilemme du tramway un moment d’une grande intensité.
Avec Éversion, Alastair Reynolds signe son Art de la fugue. Le roman à la construction aussi subtile que malicieuse tient son lecteur en haleine jusqu’au dénouement bouleversant. Une vraie réussite !
En Bifrosty, on aime confier à votre serviteur des missions difficiles. « Apo, merci de synthétiser 8 tomes sur 9 de “TheExpanse” en moins de 4500 signes et sans spoiler, bisou. » Malaisé, mais faisable. En revanche, chroniquer Éversion sans divulgâcher tient de la quasi-impossibilité. Même en résumer les quelques premières dizaines de pages sans trop en dire est une gageure, car même en dire très peu, c’est déjà en dire trop. Essayons tout de même !
Au temps de la marine à voile, Silas Coade est le chirurgien du Déméter, un navire affrété par un commanditaire privé pour rechercher une faille dans les falaises de la côte norvégienne, faille qui mènerait à un lagon où se trouverait un mystérieux Édifice (avec une majuscule, comme dans Big Dumb Object), à l’indicible géométrie. Via un roman de ce que l’on pourrait appeler du Merveilleux Scientifique, qu’il rédige, Coade manifeste, à l’instar d’un autre membre de l’équipage, une surprenante connaissance de techniques en avance sur son temps. Rapidement, un incident se produit, qui devrait conduire l’intrigue dans une tout autre direction. Sauf que, si c’est bel et bien le cas, cela ne se produit pas du tout de la manière à laquelle peut s’attendre le lecteur. En définitive, l’histoire n’en devient que plus excitante par le fait qu’elle s’avère à la fois remarquablement semblable à celle qui se déroulait avant cet accident fatidique… et en même temps complètement différente ! Un procédé qui, d’ailleurs, va se répéter plusieurs fois au cours du roman, jusqu’à un deuxième point précis de l’intrigue.
Éversion ayant été écrit par Alastair Reynolds et pas par quelqu’un comme Walter Jon Williams, qui publie aussi bien de la littérature d’aventure navale que de la SF, on se doute qu’en réalité, ce roman relève du second genre… et pas qu’un peu. Il ne cherche pas forcément l’originalité, reprenant plus des tropes bien connus qu’autre chose, mais ce qu’il fait, il le fait très bien, rendant hommage non seulement à quelques maîtres du registre science-fictif (sans doute, principalement, Arthur C. Clarke), mais aussi aux romans centrés sur l’audacieuse exploration de terres et de mers inconnues, que ce soit à l’aide de bateaux, de dirigeables… ou d’autres véhicules. On louera tout particulièrement l’habileté de la construction du récit, le minutage d’une précision suisse des révélations (dont certaines hautement inattendues), et la façon dont Rey- nolds se joue de nous en nous donnant presque d’emblée toutes les clés, sans que nous nous en rendions forcément compte. Une prouesse ! On saluera aussi une fin d’une facture étonnante, puisque ressemblant à l’ahurissant mélange des conclusions d’ouvrages phares de Dan Simmons et… Tolkien !
Sous ses faux airs de littérature navale, Éversion est un très grand livre de SF qui, après une série de romans et de novellas plus ou moins convaincants, prouve à nouveau, s’il en était besoin, que Reynolds est un des maîtres modernes du genre.