Créé par Warren Ellis en 1999, The Authority est surtout connu pour son caractère provocateur et ses polémiques. On se souvient encore du premier coming-out de super-héros, via une case où deux membres du groupe s'embrassaient fougueusement (Apollo et Midnighter, personnages inspirés de Superman et Batman) ; ou bien des allusions à peine voilées au onze septembre. Engagée politiquement, la série a su se démarquer des autres titres parus dans le grand big bang des années quatre-vingt dix, où les nouveaux éditeurs ( Image en tête) proposaient tout et n'importe quoi. La longévité du titre sur une décennie n'a donc rien d'un hasard.
Kev fait figure de cas à part puisque les deux histoires proposées peuvent se lire indépendamment de la série, hors continuité. Confié aux mains du scénariste irlandais Garth Ennis ( Preacher) et de l'illustrateur Glenn Fabry (auteur des couvertures de Preacher), le but de ce « one-shot » est d'offrir au lecteur une petite zone de turbulence où le style trash d'Ennis peut s'exprimer sans retenue. Son scénario est centré sur un ancien membre des SAS, les forces spéciales britanniques, dont la mission va consister à éliminer Authority. Mais voilà : Kev est aussi un pauvre type, l'un de ces poissards losers qu'affectionne tant l'auteur, capables de se retrouver dans les situations les plus impossibles. Sans surprise, le résultat est hilarant : Garth Ennis déteste les super-héros, et s'applique toujours autant à les ridiculiser. Comme à son habitude, il se moque de tout et de tout le monde dans une joyeuse débauche d'humour noir : les clichés de la science-fiction, les hommes politiques, ou encore la relation homosexuelle d'Apollo et Midnighter (son épilogue écarte cependant tout soupçon d'homophobie). On peut d'ailleurs s'étonner que les éditeurs se disputent les faveurs d'un auteur dont la principale motivation consiste à ridiculiser leurs personnages vedettes (en vérité, la réponse est simple, et très cynique : les lecteurs en redemandent !).
Que dire de plus, si ce n'est que Garth Ennis semble réserver ses histoires « premier degré » aux personnages qui n'appartiennent pas au cercle des super-héros (Jesse Custer, le Punisher... Ses comics « sérieux » figurent d'ailleurs parmi les plus matures et intenses du genre) pour consacrer ses délires aux Spider-Man et autres Wolverine. Autant dire qu'avec lui, le mythe du super-héros en prend un coup : certains apprécieront, d'autres moins, mais après tout, les icônes sont faites pour être désacralisées. Ah, j'allais oublier : ne ratez surtout pas l'histoire du tigre !
Florent M. 17/10/2009
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