Sur un monde dont nous ne savons pas grand chose – une planète lointaine ? la Terre d'un lointain passé ou d'un futur post-apocalyptique ? – une guerre se prépare entre deux peuples rivaux, celui du Sud et celui du Nord-Ouest, deux factions dont la technologie est suffisamment avancée pour qu'elles disposent de diverses machines volantes telles que dirigeables ou hydravions. Entre ces deux régions se situe une immense plaine verdoyante, où vit une tribu de cavaliers nomades. Anto, un soldat du nord dont l'engin vient s'écraser dans cette plaine, est sauvé de la mort par la jeune Clio, au moment même où des émissaires du Sud essayent d'obtenir l'appui des nomades. Clio va guider le soldat pour le ramener chez lui, malgré le danger encouru.
Si le thème de la guerre n'est guère nouveau, les Icariades ont le mérite de l'aborder de façon indirecte, à travers le regard d'un noble peuple qui se veut neutre et proche de la nature. L'origine Suisse de cet album n'est sans doute pas étrangère à ce choix de neutralité qui permet de mettre en scène une enclave préservée mais finalement menacée par la violence environnante. Grands espaces et chamanisme sont au cœur du récit, tandis que la guerre paraît lointaine, presque irréelle, comme la menace confuse d'un ciel qui pourrait nous tomber sur la tête. A propos de ciel, le titre de la série semble justement vouloir évoquer Icare. Anto tombe du ciel et la seule technologie évidente est celle de l'aviation, qui permet d'obtenir la maîtrise du ciel. Le terme d'Icariade rappelle aussi l'Iliade, autre récit de guerre, tandis que Clio rappelle bien sûr la muse de l'Histoire. Sont-ce là des clefs qui doivent nous aider à cerner le propos des auteurs ? Pour l'instant, il est difficile de l'affirmer, car le scénario, très simple, nous laisse encore dans l'expectative.
Le dessin privilégie lui aussi l'espace, à l'aide de grandes cases aérées où le ciel, l'eau et la verdure des plaines occupent la première place. Malgré quelques maladresses assez communes pour un premier album – une certaine rigidité surtout, en particulier pour les chevaux – ce sens de l'espace donne un agréable souffle à l'album.
Même si l'on pourrait souhaiter un scénario plus étoffé, Les Icariades possède ainsi une fraîcheur indéniablement séduisante qui laisse présager l'affirmation future du talent des auteurs.
Pascal Patoz nooSFere 01/02/2002
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