Le jeune Grégoire n'est pas emballé par sa nouvelle maison, située dans une ville où il ne connaît personne et — ce qu'il considère comme le comble de la nullité — en face à une église. Cependant, cet édifice gothique est une « porte » vers un XVIIème siècle de Fantasy, où les gargouilles parlent et où affluent d'innombrables créatures fantastiques telles que griffons, lutins, fées, etc. Mais il ne s'agit pas d'un simple voyage dans le temps ou dans un univers parallèle : Grégoire y est « transposé » de même que sa famille — comme sa sœur Chloé/Clotilde — et ses amis — c'est-à-dire ceux qui deviendront ses amis dans le présent mais qu'il ne connaît pas encore...
Gargouilles est l'un des trois albums qui inaugurent la nouvelle collection des « 3 masques » aux Humanoïdes associés. La présentation de cette collection signale que « depuis Harry Potter, Le Seigneur des anneaux version Peter Jackson, Chihiro et quelques autres moins illustres, un nouveau sens a été donné au Fantastique qui n'est plus synonyme de noirceur, ni de cercle restreint d'amateurs. » Pour très critiquable que paraîtra ce postulat aux amateurs d'Imaginaire, l'objectif est clair : « la fraîcheur, la simplicité, la drôlerie, un récit accessible à tous ». En précisant toutefois qu' « il ne s'agit pas d'une collection jeunesse » mais que les albums seront accessibles « à partir de huit ans » tout en étant « fouillés sur le plan du scénario et originaux sur le plan graphique. »
Malgré cet avertissement, ce premier album ne peut qu'évoquer l'excellente collection Jeunesse des éditions Delcourt, d'autant plus que le scénariste, D.-P. Filippi, y a écrit quelques-unes des meilleures séries, comme le fort joli Drôle d'ange gardien. Dans le genre, Gargouilles se révèle d'emblée une complète réussite : frais, simple, drôle, accessible à tous, le pari est gagné haut la main. Le scénario est impeccable et le personnage de Grégoire ne pourra qu'attirer immédiatement la sympathie des enfants et des plus grands.
De même, le graphisme est séduisant, très vivant et malicieux. L'absence quasi totale d'encrage, y compris pour le cadre des cases, donne aux couleurs un éclat et une douceur inhabituels, ce qui augmente le charme de l'ensemble et lui confère un parfum de poésie.
Bref, un excellent album, à l'évidence plutôt destiné aux enfants à partir de huit ans — ils seront conquis à coup sûr — mais que l'on prendra plaisir à lire à tout âge si l'on demeure un amateur de merveilleux.
Pascal Patoz nooSFere 05/03/2003
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