La vie d'Alvin Norge se complique sérieusement depuis le décès apparemment accidentel de Nathan Buckley, génial inventeur du processeur moléculaire « quantum » qui a révolutionné la planète. Mais même dans sa mort, il a réalisé une nouvelle prouesse en se dématérialisant au sein de son propre réseau informatique. Débarrassé de son enveloppe charnelle, Burckley s'attaque à la domination du monde. Entre ses mains, Norge n'est plus qu'une sorte de pion et le célèbre hacker se débat dans les bizarreries permanentes qui hantent désormais sa vie, comme sa vue qui se pixélise. Comment l'œil humain peut-il fabriquer des pixels ? Accompagné d'Olga — la charmante biélorusse — , il est bien décidé à percer le mystère et à trouver des réponses aux innombrables questions qu'il se pose...
Troisième volet de cette saga cyber-thriller déjantée, Shangaï hypothèse, s'oriente plus vers le thème de la manipulation en faisant de la machination hourdie par Burckley et de sa relation avec Alvin Norge les fils conducteurs du récit. Même si l'on retrouve les personnages emblématiques de la série que sont Kymberley (le virus aux allures de Vamp inventé par Norge) et Molmol (l'interface domotique), ils ne sont ici qu'au service d'un scénario aussi volontairement embrouillé que doit l'être l'esprit du héros. A l'instar de ce dernier, le lecteur se retrouve perdu et quelque peu dépassé par les événements, d'autant plus que certaines scènes n'ont pas de rapport immédiat avec le contexte et semblent seulement destinées à créer une atmosphère de malaise par leur caractère choquant ou dérangeant — comme ce squat immonde où une femme espagnole et ses deux jeunes filles siamoises mangent des insectes, assises au milieu d'excréments. Les pièces du puzzle sont ainsi données au compte-goutte, et elles demeurent beaucoup trop écartées les unes des autres pour que l'on puisse distinguer l'image globale. C'est pourtant ce que doit faire le personnage créé par Chris Lamquet au sein d'un scénario alambiqué et manifestement échafaudé avec soin.
Coté dessin, nous retrouvons la mise en scène particulière à cette série : un dessin très précis et réaliste qui associe graphisme traditionnel et techniques infographiques, des couleurs chatoyantes à la limite du criard sur certaines cases, des bulles aux codes colorés, etc.
Ce mélange des genres, tant au niveau scénaristique que graphique, donne un ensemble très efficace : voilà vraiment une excellente série !
Fabrice Fauconnier nooSFere 02/11/2003
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