Second volet de la trilogie que consacre Yves H. au mythe de Dracula, ce volume permet de découvrir la vie tourmentée de Bram Stoker, le romancier qui immortalisa le vampire et donna une figure à un mythe vieux comme le monde.
Jusqu’à l’âge de sept ans, Abraham est un enfant souffreteux qui ne peut se tenir debout. Mais ce garçon deviendra un « Géant roux » comme le surnomme ses amis du Trinity College. Lui qui ne rêve que littérature et écriture, entre dans l’administration de la justice pour plaire à son père. Afin de tromper l’ennui des journées, il prend le poste non rémunéré de critique de théâtre pour un petit journal local. Sa vie va être bouleversée par la rencontre avec Henry Irving, un comédien de talent en tournée. Celui-ci, flatté par ses chroniques dithyrambiques, voit un homme passionné par la scène. Il lui propose de s’associer pour gérer un théâtre à Londres. Abraham a besoin d’un père, d’un guide. Subjugué, il s’attache à Irving et devient régisseur. Mais l’acteur est un être tyrannique, qu’on l’appelle « Le Gouverneur ». Stoker sera littéralement vampirisé par son mentor, qui deviendra avec les années, son bourreau, lui prenant tout son temps, l’obligeant à mettre sa vie familiale et son envie d’écrire en veilleuse. Dracula naîtra cependant de ces relations ambiguës, sorte de vengeance pour toutes les humiliations, toutes les couleuvres avalées… Mais Irving refuse de monter la pièce. Bram en fait un roman qui sortira alors en volume, à trois mille exemplaires.
Yves H. réalise une biographie complète, s'intéressant surtout aux moments marquants de la vie de l’écrivain, aux jalons d’une existence difficile tant physiquement que moralement, aux étapes qui le mèneront vers une gloire posthume. Il s’attache à décrire les dimensions psychologique et spirituelle de l’homme, éclairant les contradictions apparentes du personnage. Il décortique et explicite la relation de dépendance que Bram entretient avec Irving, une relation d’autorité-soumission, de bourreau-victime, qui est la base de leurs rapports.
Séra a su trouver le style et l’esprit des gravures de la fin du 19è siècle, pour restituer, « en temps réel » la vie de l’auteur. Il reprend également l’usage du cartouche de textes sous les vignettes, permettant une lecture commode, une narration claire et fluide.
Bram Stoker, le second volet de Sur les traces de Dracula, est une réussite qui éclaire la véritable personnalité d’un auteur devenu, bien après sa mort, parmi les plus lus de la planète.
Serge Perraud nooSFere 14/11/2006
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