En 1799, Napoléon a poursuivi ses conquêtes jusqu'aux Indes britanniques. Certaines sciences se sont développées, autour des machines à vapeur, des dirigeables... Mais les anglais viennent pour la première fois de battre Napoléon, grâce à un mystérieux « général fantôme » qui se cache dans un chariot et utilise des cartes perforées... Charles Nodier va mener l'enquête sur ce curieux général, tout en continuant à traquer son ennemi séculaire, le baron Vlad Dracula...
Jean-Pierre Pécau développe ici une uchronie intéressante, genre qui a de plus en plus les faveurs de la bande dessinée. Il y ajoute une imagerie steampunk désormais classique et mêle personnages historiques (Nodier, déjà mis en scène dans Les Fées noires, Surcouf, Byron...) et de fiction (Phileas Fogg, qui meurt et rate donc son pari, Frankenstein, Dracula...). Tous les ingrédients paraissent donc réunis pour plaire aux lecteurs, et pourtant la sauce ne prend pas tout à fait. Peut-être justement parce que tous ces éléments apparaissent plaqués là sans grande conviction, parce que le mystère paraît trop évident — on devine dès sa première mention que le général fantôme est un ordinateur. Certains personnages comme Surcouf passent sans rien apporter à l'intrigue, comme pour meubler. Les idées intéressantes ne sont pas toujours bien mises en valeur, et le récit patine un peu, peine à captiver. Il y a à la fois trop et trop peu — trop d'éléments sont cités sans être vraiment développés.
De même, le dessin de Kordey est inégal, parfois relâché au point qu'on éprouverait quelques difficultés à reconnaître les personnages n'étaient leurs costumes. Il souffre également d'une mise en couleurs qui manque de relief.
Bref, l'ensemble apparaît un peu fade. On se prend à souhaiter une Inde plus vivante — seuls les thugs nous rappellent où nous sommes — , un récit plus soutenu, une intrigue plus surprenante, un graphisme plus précis ou plus percutant... Néanmoins, rien que pour l'uchronie, Empire demeure une création intéressante dont nous attendons la suite avec curiosité, dans l'espoir que les deux tomes à venir exploitent mieux l'univers mis en place.
Pascal Patoz nooSFere 30/10/2006
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