Sale temps pour les femmes à Pennystown. Les belles envahisseuses dénudées les massacrent allègrement puis donnent leurs cadavres à un spermatozoïde géant qui les absorbe et les pulvérise... Les survivants se sont regroupés, mais les tensions entre hommes et femmes augmentent jusqu'à la rupture. La guerre des sexes n'a jamais été aussi rude... La petite ville est toujours coupée du reste du monde par une sphère infranchissable. A l'extérieur, l'armée essaye tous les moyens pour la pénétrer, y compris un tir de missiles...
L'atmosphère claustrophobique et la tension psychologique s'accroissent encore dans ce troisième et avant-dernier tome, qui insiste sur les conflits entre hommes et femmes. Les mâles ont en effet du mal à résister aux charmantes courbes des extraterrestres, malgré la violence dont celles-ci font preuve, tandis qu'ils ont de plus en plus de mal à supporter leurs propres compagnes. Les accouplements inter-espèces se multiplient, de même que les œufs des créatures, aussi les femmes humaines ne peuvent-elles plus faire confiance aux hommes et prennent-elles les armes... Une femme, cependant, est à l'abri du danger : parce qu'elle est enceinte d'un garçon, Ruby n'est pas attaquée par les extraterrestres... Les frères Luna continuent à étudier avec une précision d'entomologistes les comportements de nos personnages enfermés sous leur infranchissable coupole. Ils nous montrent en particulier comment la méfiance finit par détruire les relations du groupe de survivants et surtout comment l'attitude des hommes évolue : initialement horrifiés, ils commencent à prendre conscience qu'eux n'ont rien à craindre et qu'au contraire, ces extraterrestres sont tout de même fort attirantes et fort peu farouches. De là à se dire qu'il vaut peut-être mieux échanger sa femme laide et acariâtre contre une flopée de jolies jeunes clones, peu bavardes mais particulièrement actives sexuellement, il n'y a qu'un pas...
Si le dessin demeure relativement rigide et monotone, il colle bien au récit, évacuant le spectaculaire pour s'axer sur l'angoisse, et sur la psychologie du petit groupe social. Cet étrange huis clos fonctionne donc toujours bien, surtout dans ce troisième tome où l'ambiguïté va croissant. Plus au cœur du récit, l'ambivalence séduction/répulsion lui apporte une dimension nouvelle, plus intéressante que les seules réactions du groupe assiégé.
Au fil des albums, Girls finit ainsi par envoûter et par s'imposer comme plus marquant qu'on ne le supposait au début. Le récit d'angoisse s'oriente finalement vers une étrange fable où l'on réfléchit sur les relations entre les sexes. On pourrait d'ailleurs voir dans ce récit une allégorie où les clones extraterrestres représenteraient ces femmes-objets qui sont omniprésentes dans les publicités et les diverses imageries de notre société : des icônes excitantes et muettes, sapant l'image des vraies femmes, notamment dans l'esprit de leurs hommes... Reste à voir quelle morale les Luna vont apporter à cette fable...
Pascal Patoz nooSFere 21/03/2007
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