Nävis est devenue formatrice. Elle supervise un exercice sur le pilotage de robots de combat dans un labyrinthe en constante évolution. Un huissier fait irruption vers la fin de la démonstration pour lui signifier qu’elle : « …ne peut exercer une activité professionnelle issue de la formation qu’elle a reçue au sein de Sillage. » Il lui saisit sa rémunération et lui intime de cesser cette activité, …illégale pour elle. Écoeurée, elle est rentrée dans son infect meublé, quand le téléphone sonne. C’est maître Ehmté-Ciss-Ronn, l’avocat qui l’a défendue pendant son procès. Il lui annonce avoir des nouvelles de Bobo et lui demande de passer à son cabinet. S’il lui a évité la prison, il n’a pas empêché sa destitution et manœuvre pour que Nävis devienne, avec toutes ses capacités, un agent à son service. Il lui apprend que Bobo a été envoyé, par ses soins, sur la planète Ribehn, en observateur. L’avocat veut savoir comment la Constituante s’organise entre la faction impériale qui a pris le pouvoir et les traditionalistes avec qui elle trafique pour mettre la main sur le Graviton, une roche qui possède la particularité d’inverser la gravité planétaire. Mais Bobo ne donne plus signe de vie. Il semble avoir oublié son rôle d’observateur et avoir pris fait et cause. Nävis, est envoyé sur place, contrainte et forcée, avec une couverture de journaliste. Un contact local la guidera pour se fondre dans la population en pleine guerre civile et qui rejette les étrangers. Un groupe de onze navigants a été massacré récemment !
Jean-David Morvan a fait de son héroïne, une révoltée individualiste. Dans cet épisode, il explore un nouveau volet où la personnalité de Nävis va être confrontée à une situation déstabilisante, dans une société où les traditions ont un poids très lourd. Il donne à la société de Ribehn, les fondements du japon millénaire. Le scénariste s’amuse à confronter la jeune guerrière à des activités traditionnellement réservées aux femmes comme l’art du bouquet, de la musique, de la peinture… Cependant, il démontre que, sous des dehors fragiles, futiles, ce sont ces femmes qui possèdent en fait le pouvoir. Il se livre à des réflexions sur la nature et le statut de l’étranger, sur la difficile intégration dans des communautés dont on n’est pas issu. Il pointe la trop grande propension de notre société à faire régner en maître la gesticulation stérile et le vacarme inutile… Il fait évoluer sensiblement, par les épreuves qu’elle traverse, son héroïne vers plus de maturité.
Philippe Buchet accompagne cette maturité. Il faut saluer son travail pour faire « vieillir » Nävis, lui faire quitter son allure et son visage d’adolescente pour ceux qu’une jeune femme plus proche d’un quart de siècle. Le découpage des scènes est toujours aussi dynamique, les décors, le bestiaire aussi éblouissants.
Monde flottant, le onzième opus des aventures de Nävis se révèle un bien bel album. Il conforte et justifie largement le Prix Essentiel Jeunesse attribué à la série pendant le Festival de la BD à Angoulême, en 2008.
Serge Perraud nooSFere 23/11/2008
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