Kenshirô, en terrassant Shin, un adepte de l'école du Nanto Seïken qui l'avait laissé pour mort suite au rapt de sa fiancée Julia, a démontré qu'il était passé maître dans la pratique du Hokuto Shinken, une technique martiale conçue pour détruire le corps humain « de l'intérieur ». Juste avant de périr sous les coups de Kenshirô, Shin lui apprend qu'il est impossible de sauver Julia car elle s'est suicidée. L'Héritier de la Grande Ourse poursuit donc son chemin, décimant quelques gangs insignifiants au passage et sauvant la petite Lynn une nouvelle fois. Il finit par échouer dans un village où il rencontre Mamiya, son chef, une jeune femme à l'aspect si proche de Julia que Kenshirô s'en trouve troublé... Au même instant, un certain Rei fait son apparition : personnage ambigu aux motivations obscures, il finit par prendre parti pour les villageois et les protège à l'aide d'une technique consistant à découper les corps de ses ennemis avec ses doigts. Rei est en fait l'un des cinq maîtres du Nanto Seïken encore en vie ; pourtant, sa technique diffère sensiblement du Nanto Koshyûken de Shin (le « Poing de l'Aigle Solitaire », qui permet aux bras et aux jambes de traverser la matière) car le Nanto, contrairement au Hokuto, unique en son genre, présente plusieurs variantes en fonction de ses cent huit disciples. Les six meilleurs pratiquants du Nanto sont placés sous l'égide de la constellation chinoise « Nanteou » (la Croix du Sud, située à l'opposé de la Grande Ourse) et Rei, lié à l'étoile Gisei (celle du devoir et de la droiture), pratique le Nanto Suichôken (le Poing de l'Oiseau d'Eau, ou du cygne, ou de ce que vous voulez tant qu'il est question d'un oiseau et d'eau). Décidés à en découdre avec la bande de sauvages qui terrorise le village, les deux experts martiaux s'allient pour les défier sur leur propre territoire. Rei confie alors à Kenshirô que Mamiya, la jeune femme qui ressemble tant à Julia, lui rappelle sa sœur : nous découvrons ainsi qu'il est à la recherche de l'homme aux sept cicatrices, car il le croit responsable de sa mort...
Malgré les apparences, les trois premiers tomes de Hokuto No Ken (où Kenshirô passe son temps à massacrer des gangs sans que le lecteur n'ait l'impression de suivre une intrigue construite) recèlent plusieurs éléments d'importance nécessaires à la mise en place de ses thèmes. Tout d'abord, depuis le sacrifice de Shin dans le deuxième tome, nous savons dorénavant que, dans ce manga, les « méchants » ne sont pas forcément aussi mauvais que l'on croit, et que Kenshirô peut faire preuve de compassion à leur égard (avant de les tuer : on est dans Hokuto No Ken, tout de même). L'ambiguïté morale est donc de mise, et l'œuvre se révèle moins manichéenne qu'il n'y paraît. En vérité, ces personnages en apparence détestables ne font qu'obéir à la fatalité : ils ne sont pas libres de leur destin. Shin, par exemple, incarne Jûnsei, l'étoile du sacrifice (ou de l'offrande) ; son acte était donc inévitable. En poussant Kenshirô dans ses derniers retranchements, il n'a fait que l'inciter à dépasser ses limites pour lui donner une chance de le vaincre. Malgré lui, par sa mort, Shin a ainsi amené son vieil ami à se perfectionner pour lui permettre d'être prêt à combattre les menaces bien plus terribles qui l'attendent par la suite. En outre, grâce à cette victoire, nous savons désormais que Kenshirô ne se contente pas de vaincre ses ennemis : leurs espoirs, leurs souffrances et leurs techniques deviennent siens, faisant de lui un être plus à même de comprendre l'humanité qu'il doit sauver. Et conformément aux préceptes du Hokuto Shinken, ces émotions, loin de l'affaiblir, le rendent plus fort.
Ce quatrième tome est placé sous le signe de la fraternité. Sans trop en dire, Kenshirô finit par reconnaître Rei comme un frère d'arme, alors que tout semble l'opposer à lui : une nouvelle fois, les choses ne sont pas aussi simples que les apparences le laissent croire car Rei, derrière son attitude antipathique, cache une grande sensibilité ; Mamiya, quant à elle, sous un caractère farouche, dissimule une étonnante noblesse d'âme ainsi qu'une féminité exacerbée. Pour Kenshirô, ces personnages marquent une nouvelle étape sur la longue route ponctuée de rencontres amicales ou hostiles que lui fait suivre sa destinée. Rassurez-vous, je ne vous dévoilerai rien de ce qui vous attend, mais la complicité que nouent l'adepte du Hokuto et l'adepte du Nanto, qui n'hésitent pas à allier leurs techniques pour affronter l'ennemi commun, se révèlera d'une importance capitale dans la vie de Kenshirô, à qui il reste encore beaucoup à apprendre. Ainsi, Buronson installe tranquillement ses personnages avant de leur faire accomplir leur destin, mais bon nombre de lecteurs « non initiés » auront sûrement laissé tomber avant les coups de tonnerre que représenteront les arrivées de Raoh et Toki, à partir d'où le manga accélère son rythme et prend une nouvelle envergure. Toutefois, ce tome présente de réelles qualités : tout d'abord, le combat où s'opposent les techniques du Hokuto et du Nanto s'avère réellement impressionnant ; ensuite, le dessin de Tetsuo Hara ne cesse de s'améliorer, pour atteindre une sophistication rarement vue dans un manga. Ce tome mérite donc largement le coup d'œil, mais vous êtes prévenus : dans Hokuto No Ken, la patience est de mise.
Notes :
Pour approfondir le sujet, allez donc faire un tour sur Hokuto Legacy, section « fanzone », « analyses ».
Florent M. 20/10/2008
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