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« Je m'appelle Mort Linden. Ma vie n'était pas compliquée… Hold-ups, types à buter… La routine. Et puis voilà que pour fuir le lieutenant Madocks, je me plante sur une planète paumée. Divinités primitives, tribus pacifistes… Je sens que l'intégration va être difficile. »
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Le début de cet album est peu attractif : des personnages antipathiques, des pétarades gratuites, un humour un peu facile, un dessin sombre et haché... Nous aurions pu être dispensés de ce prologue inutile. Passons également sur l'invraisemblable fuite du héros à bord d'un vaisseau interstellaire qu'il ne sait pas piloter et sur son incroyable chance de s'échouer par hasard sur une planète où l'air est respirable (ce qu'il ne prend même pas la peine de vérifier) : les auteurs ne cherchent pas la crédibilité et s'autorisent même un « traducteur simultané » qui résoudra instantanément les problèmes de communication.
Heureusement, à la dixième page, tout bascule. Echoué sur une planète sauvage, parmi des peuplades et une faune très inspirés de notre préhistoire, Mort Linden devient le héros d'aventures exotiques qui rappellent les romans d'Edgar Rice Burroughs, comme ceux qui composent les cycles de Pellucidar ou de Caspak.
Là, le récit acquiert une force indéniable, d'autant que le scénariste donne à la société primitive décrite des caractéristiques intéressantes. Les Peuples Jumeaux – les Plaines et les Bois – sont une tribu d'hommes et une tribu de femmes qui ne se rencontrent qu'une fois par an, pour l'accouplement ou le transfert des enfants mâles. Ils doivent respecter un certain nombre de tabous et de rites, et en particulier il leur est rigoureusement interdit d'ôter la vie, même à un animal. Pour se nourrir, il leur faut donc capturer le gibier vivant et le sacrifier dans le Nao, une grotte magique où ils échappent à la surveillance de leurs dieux…
Mort Linden va évidemment mal supporter ces diverses contraintes, et l'album s'achèvera dans un carnage un peu superflu.
De la même façon, le dessin de Marty s'avère bien plus convaincant dans cette fantasy barbare que dans les scènes futuristes du début. Il excelle dans la peinture de ces peuples verdâtres et peinturlurés, aux mœurs sauvages et pourtant pacifiques. Les scènes de chasses, de danses ou de combats, de même que les créatures sauvages qui constituent la faune de cette planète, ont un impact visuel fort, relevé par les couleurs étranges de Beuzelin.
En conclusion, Omond et Marty ont retrouvé ici la naïveté et l'imaginaire coloré des aventures exotiques à la Burroughs ou des romans préhistoriques. A condition d'en conserver la fraîcheur en évitant notamment l'étalage trop complaisant d'une violence inutile, ce pourrait devenir une série sympathique.
Mais dans un récit centré sur la découverte d'une civilisation étrangère, il serait aussi souhaitable de pouvoir s'identifier au personnage principal, ce qui est difficile avec Mort Linden, brute dans l'ensemble assez frustre. Souhaitons qu'il évolue au fil de la série.
Pascal Patoz nooSFere
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