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1957 : USA et URSS se livrent une guerre sans merci pour être les premiers dans l'espace. Sur le cosmodrome de Baïkonour, et malgré un danger de pluie de météorites, le général Oufa, commandant militaire de la base, oblige le professeur Ilioutchine, chef du projet scientifique, à procéder au lancement d'une fusée.
Frappé par les météorites, l'engin retombe. L'équipe chargée de ramasser les débris est anéantie par un mystérieux virus.
Moscou ordonne de détruire toute trace du fléau. Mais le Dr Voronov, chef de la clinique du KGB de la base, isole la souche venue de l'espace. Il s'en sert pour assassiner les maîtres du Kremlin, traîtres selon lui à la pensée du grand Staline, et les chefs d'états occidentaux… | |
Et Blake et Mortimer continuent leurs aventures… avec une nouvelle équipe d'auteurs.
Soulignons d'emblée que le pastiche est remarquable, tant sur le plan des textes qu'au niveau graphique : les auteurs se sont attachés à s'effacer derrière le mythe pour recréer impeccablement l'ambiance des albums de Jacobs.
La qualité du pastiche avait déjà été soulignée pour L'affaire Francis Blake, dessiné par Ted Benoît. Il est en fait assez difficile - et vain - de comparer les mérites respectifs de ces deux albums, tous deux d'un très bon niveau.
Cependant, le scénario apparaît ici plus dense que celui du précédent volume. Nos amis sont cette fois confrontés à une menace de guerre bactériologique et nucléaire, en raison de la découverte par les russes d'une bactérie d'origine extraterrestre, et ils vont devoir affronter un vaste réseau d'espions.
Ce qui séduit tout particulièrement, c'est l'atmosphère de guerre froide qui est extrêmement bien rendue. Certes, les auteurs jouent avec les clichés du genre et ne cherchent pas à apporter d'originalité à cet univers, mais nous sommes immédiatement plongés au cœur d'une intrigue qui rappelle les romans de John Le Carré et dans laquelle on se laisse glisser avec un grand plaisir.
L'un des intérêts de l'album est en outre l'introduction d'un véritable méchant en la personne de Voronov. Exalté, sournois, implacable, il s'avère très convaincant et ramène Olrik à sa juste place, celui du méchant de second ordre, du mercenaire omniprésent mais en fin de compte peu efficace…
Il est intéressant de noter le glissement qui s'opère dans les albums récents. Ceux-ci s'inscrivent désormais dans un monde qui fait partie de notre passé. Ils y gagnent en réalisme et s'orientent vers des récits d'espionnage, en réduisant la part proprement science-fictive pourtant toujours très présente dans l'œuvre de Jacobs.
Ainsi, si l'apparence feutrée et british est conservée, on ne retrouve plus la démesure et la folie douce qui sous-tend les premiers albums.
Dans ce réalisme grandissant, il est devenu définitivement impossible de trouver une place à la guerre décrite dans Le secret de l'Espadon, comme le souligne Daniel Riche dans son article Subversion et empire, une guerre trop loin (disponible intégralement sur nooSFere). Cette guerre qui voit la destruction des grandes capitales du monde, n'est en effet pas compatible avec les guerres mondiales désormais mentionnées dans les albums ultérieurs.
De même, il est amusant de voir Mortimer porter un toast en prédisant candidement que l'homme marchera peut-être un jour sur la lune, alors qu'il a déjà assisté au décollage de vaisseaux intersidéraux à la fin de L'énigme de l'Atlantide
Il s'agit en tout cas d'un excellent ouvrage, qui comblera les nostalgiques de Jacobs ou de l'ambiance tendue des romans et des films d'espionnage se déroulant sous la guerre froide.
On peut espérer toutefois que les auteurs sauront se montrer parfois moins sages et qu'ils tenteront de réinsuffler un peu de folie scientifique à leurs récits, pour mieux retrouver l'esprit initial de la série.
Pascal Patoz nooSFere
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