Pour Turner, cette mission d'exfiltration d'un cadre de Maas Biolab fait partie de la routine de son boulot de mercenaire. Et il est le meilleur dans sa partie...
Au même moment, en Europe, Marly, une galeriste d'art ruinée, reçoit une étrange proposition du multimilliardaire Joseph Virek : découvrir l'origine de mystérieux coffrets dont le style ressemble à celui de l'artiste qui à causé sa perte...
Quant à Bobby, un hacker qui se fait appeler Comte Zéro, il voit son ultime heure venue. Son dernier casse informatique a mal tourné : le système qu'il croyait pirater est en train de le tuer...
Trois êtres que tout sépare, mais que le cyberspace va réunir dans une course contre la montre dont l'enjeu est... la domination du monde !
William Gibson est un auteur a succès, une découverte qu'on s'arrache, et que La Découverte Fictions publie intensivement, puisque outre ses deux romans, ils prévoient de traduire son recueil de nouvelles Burning Chrome, mettant ainsi pratiquement sur le marché les œuvres complètes de ce jeune écrivain. Le grand mérite de Gibson réside en son écriture, nourrie de heurts et de contrastes, ou les verbes arrivent en rafales dans des phrases courtes. Pourtant, il s'en dégage une poésie parfois très forte (qu'il est toujours difficile de restituer dans la traduction), même et surtout quand Gibson intègre un jargon technologique contemporain, dans une sorte d'anglais mondialisé qui colle plus à la technologie que notre propre langue.
Les premières pages de Comte Zéro sont symptomatiques tant de ces qualités que des défauts qui peuvent les accompagner : une perte de réflexion, de sentiment, due peut-être à l'ivresse de la technologie, qui menace sans cesse de faire basculer le roman dans l'exotisme et le visionnage publicitaire du futur. Comte Zéro ne met pas en jeu les idées lourdes de menace et de merveilleux de Neuromancien, pas d'intelligence artificielle prête à s'éveiller, et quand on visite le cyberspace, c'est pour y trouver les loas du Vaudou. On me pardonnera de crier au tricheur, l'économie esthétique que la SF avait emprunté à la science en prend du plomb dans l'aile.
Du coup, le livre s'épuise dans courses et combats, alors que Gibson sait faire tellement mieux (et on s'en rend compte quand on lit les nouvelles réunies dans Burning Chrome). Pour admirable qu'elle soit, l'écriture habille une coquille creuse. Si on pouvait comparer Neuromancien au roman noir, avec la même intensité dans l'amertume existentielle, Comte Zéro tombe au niveau de James Bond, riche en décors, en gadgets et en péripéties plus qu'en substance.