« O merveilleux Lewis, religieux ou poète,

     Dont l'infernal cerveau engendre les fantômes,

     Satan même craindrait d'habiter avec toi,

     Car il trouve en ton cœur un plus profond enfer. »

     Lord Byron

     Chef-d'œuvre incontesté du Roman noir anglais, que les historiens de la littérature appelent roman « gothique » ou « frénétique », Le Moine témoigne de l'imagination souveraine des Romantiques et donne le plus parfait exemple des antithèses, des démesures et du climat sulfureux qui leur sont chers. Le combat d'une sainteté qui se défait contre les puissances des ténèbres devient titanesque sous la plume de Lewis, en des scènes tour à tour d'une audace incroyable et d'une infernale cruauté, auxquelles le décor oppressant du Madrid de l'inquisition donne un relief saisissant. Les amours diaboliques de cet homme déchiré sont décrites avec un talent qui laisse loin derrière lui ceux d'Horace Walpole, de Maturin et même d'Ann Radcliffe, pionniers du genre.

     Lewis, ami de Byron et de Walter Scott, fut accusé d'immoralité dès la sortie du Moine, et dut couper certaines scènes lors de la deuxième édition, mais le texte intégral que nous publions aujourd'hui fait justice de ces accusations.