Dans un univers sombre et magnétique, où les époques et les lieux se superposent jusqu’au vertige, Gabriel, Damien ou Natasha se débattent avec de vieilles peurs héritées de l’enfance et leurs pulsions les plus inavouables.
Jérémy Fel entraîne ici son lecteur dans un imaginaire éblouissant, où cruauté et trahison règnent en maître. Comme dans un palais des glaces, les destins se répondent et se reflètent, créant un monde où visible et invisible, réel et fiction, se confondent.
Jérémy Fel est écrivain et scénariste. Il a publié chez Rivages Les Loups à leur porte (2015) et Helena (2018). Nous sommes les chasseurs est son troisième roman.
Maison hantée dans le Doubs, possession, créatures extraterrestres malfaisantes, univers parallèles, Xavier Dupont de Ligonnès, loups-garous, sorcières, sacrifices humains, pandémie, meurtres en série, secte apocalyptique, découverte de l’homosexualité masculine, cérémonie satanique, pédophilie, énigmes criminelles plus ou moins célèbres, chuchoteurs (ces citoyens qui vous surveillent pour le compte d’un gouvernement obsédé par le contrôle de sa population) – et l’inventaire est loin d’être clos –, voilà en partie ce que vous trouverez dans ce faux roman faux recueil de nouvelles dont le fil rouge semble être l’actrice Nathalie Wood, qui, sorte de gadget narratif, de balle rebondissante, apparaît dans tous les segments, à toutes les époques : jeune, célèbre, pas encore morte, rescapée du destin tragique qu’elle a connu dans notre monde (noyade accidentelle ? meurtre ?).
Jérémy Fel, dont c’est le troisième roman, après Les Loups à leur porte (2015) et Helena (2018), ne manque pas d’ambition. Il fait parfois preuve, mais pas toujours, d’une maîtrise narrative impressionnante qui le rapproche de Stephen King, peut-être en un peu plus aride. Mais voilà, boum patatras, Nous sommes les chasseurs est trop long, la multiplication des thèmes et des personnages (certains à peine esquissés, d’autres totalement interchangeables) finit par lasser là où elle avait sans doute l’intention d’impressionner. Arrivé à un peu plus de la moitié (vers la page 400 sur 720) le lecteur commence à s’enliser. Les nombreux points de repère culturels (David Lynch, évidemment, mais il y a tant d’autres références pop ici et là) apportent une sorte de vernis écaillé, assez peu convaincant, qui tombe au sol à mesure qu’il est appliqué. On regrettera aussi la référence aux deux précédents romans de l’auteur sous forme de notes de bas de page. Sur le moment, le procédé semble puéril, évoque des béquilles trop courtes, inutiles.
Si on peut aisément faire l’économie de cette lecture harassante, on se permettra toutefois de garder à l’esprit que Jérémy Fel est un auteur à suivre et qu’il n’est pas du tout à l’abri de nous pondre un chef-d’œuvre un jour. En tout cas, il a bien compris quel est le cœur battant de la grande littérature : rien de moins que la nature du mal.
On ne félicite pas l’éditeur, qui signe pour l’occasion le texte de quatrième de couverture le plus pourri de l’année.
Thomas DAY (site web) Première parution : 1/7/2022 Bifrost 107 Mise en ligne le : 9/4/2025