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Helstrid

Christian LÉOURIER

Première parution : Saint-Mammès, France : Le Bélial', collection Une Heure-Lumière, février 2019

Illustration de Aurélien POLICE

BÉLIAL' (Saint-Mammès, France), coll. Une Heure-Lumière précédent dans la collection n° 17 suivant dans la collection
Date de parution : 21 février 2019
Dépôt légal : février 2019, Achevé d'imprimer : février 2019
Première édition
Novella, 128 pages, catégorie / prix : 8,90 €
ISBN : 978-2-84344-944-4
Format : 12,0 x 17,9 cm
Genre : Science-Fiction

Existe aussi en numérique, aux formats ePub (ISBN : 978-2-84344-862-1) et PDF (ISBN : 978-2-84344-861-4), au prix de 4,99 €.


Ressources externes sur cette œuvre : quarante-deux.org
Ressources externes sur cette édition de l'œuvre : quarante-deux.org

Quatrième de couverture

Certains mondes ne sont pas faits pour l’humanité : Helstrid est de ceux-là. Des températures de -150 °C ; des vents de 200 km/h ; une atmosphère toxique. Pourtant, la Compagnie tient à exploiter ses énormes ressources en minerai, appâtant les volontaires à l’exil à grand renfort de gains conséquents. Des hommes et des femmes à l’image de Vic, qui supervise le travail de prospection et d’exploitation des machines. Un job comme un autre, finalement, et qui vaut toujours mieux que d’affronter son passé laissé sur Terre… Jusqu’à ce que le porion soit contraint d’accompagner un convoi chargé de ravitailler un avant-poste à plusieurs centaines de kilomètres de la base principale. Un trajet dangereux, mais les IA sont là pour veiller à la bonne marche des véhicules suréquipés et à la protection du seul humain embarqué. Dans pareilles conditions, tout ne peut que se passer au mieux…

« Christian Léourier est l’un des secrets les mieux gardés de la SF française. »
Pierre-Paul Durastanti - Bifrost

Critiques

Nouvelle d’un monde lointain (si proche)

Exploité pour ses richesses minières, Helstrid est un monde inhospitalier. Un convoi constitué de trois véhicules intelligents, et d’un humain, quitte la base. Que se passera-t-il si une tempête se déclenche ?

La réponse pourrait aller de soi. Possédant une intelligence autonome, les véhicules ont été conçus pour Helstrid, et ils sont programmés pour protéger la vie humaine. Mission dont chaque robot s’acquitte avec une intransigeance pointilleuse. Au moment de passer de la base à son véhicule, l’humain – Vic – doit patienter, le temps qu’un robot effectue la check-list des vérifications de sa combinaison et ce temps excède de beaucoup le temps de traverser la cour. Bien qu’il soit pris avec le sourire, ce retard est un indice d’un climat angoissant.

Vic pourrait être le capitaine de l’expédition, or il apparaît qu’il est lui-même aux ordres, et qu’il ne possède aucune autonomie. De plus, il souffre d’une dépression passagère : sa dernière aventure amoureuse, s’est achevée avec le départ inexpliqué de sa compagne, Maï, or Vic est en mal de compagnie, et sa venue sur Helstrid semble avoir surtout répondu à un coup de tête.

Comme la vie est une source de dangers en cascade sur Helstrid, Vic se plie sans rechigner à ces contraintes sécuritaires qui semblent l’unique souci des robots et des instructions qui leur ont été données… et d’ailleurs, il ne se conçoit pas autrement que comme un exécutant, aussi consciencieux que fidèle. 

L’entité dans laquelle il prend ses quartiers, se présente spontanément à lui, sous un nom féminin : Anne-Marie (pour A), les autres s’appelant Béatrice et Claudine… Dès qu’apparaît un risque de tempête, une lutte pour la domination s’instille sournoisement entre eux : Anne-Marie est censée obéir, mais elle a souvent le dessus, en alléguant son désir de servir, et protéger l’humain dont elle a « charge ». D’ailleurs, comme si elle avait analysé le besoin de sociabilité de son passager, elle lui rappelle que son nom n’a été choisi que pour apaiser l’angoissant besoin de sentiments des Humains. Pour communiquer entre véhicules, Anne-Marie n’a besoin que de matricules. Au fur et à mesure de la montée des périls, les rapports se tendent. Vic désire participer à la bonne conduite de leur mission, et Anne-Marie s’oppose à la moindre proposition : certaine de « maîtriser la situation », elle lui assure qu’elle n’a pas besoin de ses services.

Se mêle, en arrière-plan, le besoin de sentiments de Vic, qui ne se remet guère de la perte de Maï et qui tente de nouer un dialogue aimable avec ce robot qui a pris des attributs féminins : essentiellement sa voix. Mais la séduction est un leurre, et Vic tombe dans le piège de cette voix qui prétend le rassurer...

Le récit peut être abordé sous plusieurs facettes : le rapport homme-machine devient particulièrement complexe, du fait d’hommes à qui les robots, entraînés à faire respecter des consignes sécuritaires extrêmes, imposent des restrictions sur lesquelles aucune machine ne transige.

Mais est-on bien sur une planète si étrange ? Le climat d’Helstrid n’entretient-il pas des similitudes avec une modernité obsédée par les angoisses sécuritaires, où une police pointilleuse multiplie les barrières, les contrôles de routine, les vérifications, et les fouilles corporelles en raison d’une volonté absolutiste de sécurité ?

Pour la génération des années cinquante, les lois d’Asimov imposaient aux robots de donner priorité à la sauvegarde de la vie Humaine. Cet impératif toutefois cédait le pas à une cohabitation ouvrière et industrieuse entre hommes et machines intelligentes visant à réaliser un objectif partagé.

Ici, c’est maintenant. En matière de sécurité, les robots n’obéissent pas ou peu, aux humains. Les rares fois, où, les ennuis croissant, Vic tente une sortie, ce sera contre la volonté d’Anne-Marie, qui le laissera faire et ne manquera pas de lui faire la morale pour n’avoir pas écouté ses ordres « conseils ».
En avant, les véhicules B et C, n’ayant pas charge humaine, continuent leur route vaillamment, peu gênés dans leur course par le déchaînement des éléments.

En arrière, Anne-Marie qui adopte un ton de plus en plus impératif, a réponse à tout : elle explique à Vic que la présence d’un humain la gêne, la retarde, mais qu’elle applique les instructions. Elle dévie donc de sa route, en assurant à Vic qu’elle fait cela pour lui, l’humain, au seul motif de sa sécurité.

Elle n’autorise à Vic aucune initiative. Mais Anne-Marie est-elle bien un robot ?  À bien des égards, elle n’est pas sans me faire penser à certains jeunes adultes que je croise quotidiennement : imbus, pénétrés de leur supériorité et fermés à l’échange. Ils pensent que tout irait pour le mieux si tout un chacun se contentait de les imiter.

Et ce qui se joue, est-ce bien un conflit homme-robot autour d’une sécurité qui va se montrer aussi fiable qu’une tartine pour résister au passage de la confiture ? Ou n’est-ce pas le fait qu’un robot n’est que la production d’êtres qui l’ont éduqué « configuré » ?

N’est-ce pas aussi la nécessité de se réfléchir en tant cheville ouvrière d’un tout, et non pas en tant qu’entité « auto-imbue » ?

Jamais Anne-Marie ne semble penser que Vic puisse participer de la solution à son problème. Pour le noyau noétique, Vic n’est qu’une charge (comme ces PDG qui se plaignent de leurs charges) et là où une coordination des individus – et une vision de la société –, serait capable de sauver le monde, le sécuritarisme se révèle le danger le plus terrifiant qui soit pour l’humain… La sécurité isole, elle sépare, elle déresponsabilise, elle est une tombe pour la pensée alors qu’une vision de groupe, une coopération, seraient seules capables d’offrir – peut-être – une solution au dilemme… Que pourra faire Vic pour échapper à l’étreinte fatale de cette entité prétendant à le déposséder de lui-même ?
C’est toute la force de la Science-fiction que condense ce court récit, car elle seule est capable – avec une telle force émotive – de raconter l’ailleurs pour mieux pointer sur le présent un regard précis mais tendre.

Bernard HENNINGER (site web)
Première parution : 25/8/2019 nooSFere


    Helstrid est une novella de SF de Christian Léourier. C’est aussi le nom de la planète très inhospitalière sur laquelle se déroule le récit. Une atmosphère saturée d’alcane, des vents approchant les 200 km/h, des températures inférieures à -150 °C, Helstrid a tout pour qu’on ne s’y pose pas. Mis à part des ressources minières ; voilà pourquoi la Compagnie l’exploite. C’est sur Helstrid que travaille Vic, avec quelques autres aux motivations variées — argent, goût de l’aventure, de la découverte, ou encore, dans le cas de Vic, la volonté de se refaire une vie après une rupture douloureuse. Car si les contractuels ne passent que peu d’années sur Helstrid, le voyage aller-retour — en hibernation — prend cinquante ans. Quand il reviendra sur Terre, Vic, enrichi, retrouvera un monde différent et un entourage vieilli ou décédé…

    Pour l’instant en tout cas, Vic est sur Helstrid, et il doit assurer le ravitaillement d’un avant-poste qui en a grand besoin. C’est à bord du convoyeur Anne-Marie qu’il va s’élancer vers l’antenne N/2, accompagné par les convoyeurs automatiques Béatrice et Claudine. De fait, pour cette mission, Vic ne sert à rien, les trois IA des véhicules gèrent seules trajet et pilotage, la présence humaine n’est contrainte que par un protocole désuet. Durant la quarantaine d’heures prévue pour le voyage, Vic aura donc le temps de s’interroger sur le sens de la vie. Mais voilà que les incidents se multiplient, que la survie même de Vic devient douteuse, et que l’interrogation existentielle prend une tournure terriblement actuelle.

    Ayant fui le souvenir d’une femme aimée qui l’a quitté sans explication, Vic réalise trop tard que, si loin qu’on aille, ce n’est jamais qu’avec soi qu’on part, et qu’à destination ne se trouve nul autre que soi-même. Arpentant le sol glacé d’un monde encore plus dangereux qu’il ne l’imaginait, Vic n’est pas un héros. Il n’est qu’un homme seul, perdu au milieu d’un enfer environnemental, un nobody contre qui une planète largement inconnue s’acharne, un solitaire forcé d’accorder sa confiance, jusqu’à lui confier sa vie, à une IA qui dit faire de sa sécurité sa priorité. Guide et planche de salut à la fois, Anne-Marie sait être une compagne compatissante durant ces quelques jours d’effroi. Amicale, prévenante, rassurante, conversant volontiers, elle disserte sur la conscience et la perception, jusqu’à prouver à Vic qu’entre son moi numérique et celui, biologique, de son passager, les différences sont moindres qu’il ne le croit. Sur la fin, alors que tout est encore en balance, Vic fera preuve de dignité et de courage, des caractéristiques humaines qui contrastent avec la rationalité tranquille de l’IA.

    Lisant Helstrid, le lecteur passera plus de cent pages en compagnie du couple improbable formé par Vic et Anne-Marie. Et il en sortira éprouvé, car Vic est un personnage que sa détresse rend attachant, au point qu’on tremble pour lui quand le danger arrive. L’homme et l’IA vont de Charybde en Scylla, la tension ne cesse de monter jusqu’à l’insupportable, on se croirait parfois dans Le Salaire de la peur.

    Léourier raconte ici une très belle histoire pleine de tension et d’humanité — une sorte de Vieil homme et la mer de l’espace. Il offre une de ces histoires old school qui mettent le focus sur l’homme face à l’adversité, qui l’obligent à se mettre au clair avec ce qu’il est, qui oublient pour un temps société et politique. Une histoire reposante, en somme, par la simplicité de ses enjeux, et en même temps terriblement « impliquant » par l’énormité de ceux-ci — pour le héros menacé du récit comme pour le lecteur qui prend fait et cause pour lui au point que sa tension artérielle augmente au rythme du sien. Must-read.

Éric JENTILE
Première parution : 1/4/2019 dans Bifrost 94
Mise en ligne le : 20/9/2023

Prix obtenus
Grand Prix de l'Imaginaire, Nouvelle française, 2020
Rosny aîné, Roman, 2020
Prix Utopiales européen, Roman, 2019
Francis (Charles) Valéry, senior, [sans catégorie], 2019


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