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Nous avions un rêve

Jake LAMAR

Titre original : The last integrationist, 1996   ISFDB
Traduction de Nicholas MASEK

RIVAGES (Paris, France), coll. Noir précédent dans la collection n° 748 suivant dans la collection
Dépôt légal : septembre 2009
Roman, 496 pages, catégorie / prix : 10,50 €
ISBN : 978-2-7436-2003-5


Quatrième de couverture
     Dans une Amérique future et déjà présente, la guerre contre le crime et la drogue a conduit le pouvoir à ouvrir des camps de rééducation pour les toxicomanes et à multiplier les condamnations à mort. Les exécutions font même l'objet d'un show télévisé à succès. L'instigateur de cette croisade est l'Attorney général Melvin Hutchinson, qui a rétabli la pendaison car elle est la forme d'exécution la plus économique. Avec une cote de popularité au plafond, il est en passe de devenir le premier vice-président noir des États-Unis. Mais Melvin est un homme complexe qui, entre sa mère, sa femme et sa sœur, n'a pas vaincu ses démons personnels. Il cache un secret qui est en passe de le détruire.

     Publié aux USA en 1996, ce roman a pour toile de fond un pays rongé par l'intolérance, la colère et la haine, où les rapports entre Noirs et Blancs sont devenus irrémédiablement conflictuels. Qualifié à l'époque de visionnaire, ce livre s'est révélé si étonnamment prophétique vis-à-vis des années Bush. Par la profondeur des thèmes qu'il aborde, ce thriller n'a rien perdu de son actualité.

     « L'écriture de Lamar est toute tendue, et c'est bien cela qui tient ici en haleine, constamment. »
Les Inrockuptibles
Critiques des autres éditions ou de la série
Edition RIVAGES, Thriller (2006)

     Jake Lamar est sans conteste une nouvelle recrue talentueuse des éditions Rivages. Après Le Caméléon noir, publié chez Rivages « Noir » en 2003 (directement en poche, donc), Nous avions un rêve a l'honneur du grand format dans la collection Rivages « Thriller ». L'auteur, né en 1961 dans le Bronx, vit depuis 1993 à Paris. Ancien journaliste à Time Magazine et diplômé d'Harvard, il se consacre désormais à l'écriture et prône le métissage comme avenir de notre monde.

     Dans une Amérique uchronique, hélas proche de nous, Melvin Hutchinson est en passe de devenir le premier vice-président noir. Attorney général, il milite pour la peine de mort par pendaison, moyen économique s'il en est (la corde coûte moins cher que la seringue) d'éradiquer les criminels de toutes sortes. Mais sa popularité est due aussi à son œuvre majeure, l'ouverture de centres de rééducation de toxicomanes dans lesquels croupissent de jeunes délinquants — Noirs en majorité — en attendant la rédemption que promet le grand Melvin. Mais ce dernier, rongé par un secret aux remugles d'égout qui remonte peu à peu à la surface, s'enfonce dans l'alcoolisme et la haine.

     Loin de son quartier huppé vit Emma, sa nièce, une jeune photographe qui ne veut pas entendre parler de couleurs et de discrimination. Elle vit avec un Blanc, jeune loup puant, producteur d'un show télévisé encensé par l'Amérique. Son couple bat de l'aile alors qu'elle découvre sa grossesse. Peut-elle vraiment envisager de garder ce bébé ? Et pourquoi son oncle resurgit-il soudain dans la vie de la mère d'Emma ?

     Un puzzle implacable se met en place tandis que l'Amérique s'apprête à assister avec bonheur à une exécution en direct à la télévision...

     A travers une histoire de famille remarquablement construite, on découvre le sombre tableau d'une Amérique percluse de haine, de racisme et de violence. L'histoire de Jake Lamar, publiée en 1996, est un reflet très ressemblant de ce qui se passe aujourd'hui. Blancs et Noirs vivent côte à côte, dans un rejet pathologique où chaque communauté est endoctrinée par le fielleux babillage de la télé-réalité et les hurlements guerriers des politiques. La foule clame : « Hutch, pends-les haut et court » lors des apparitions publiques de Melvin, alors qu'un acteur célèbre particulièrement musclé (ça ne vous rappellerait pas le gouverneur de Californie ?), bourreau de l'exécution publique, s'écrie devant les spectateurs : « Parasite... éliminé ! »

     Les personnages de Jake Lamar ne sont en aucune manière sympathiques. Melvin est imbu de lui-même et xénophobe, pétri de culpabilité et obsessionnel depuis la mort accidentelle de sa fille ; Emma est intelligente, mais glaciale ; son copain, Seth, est redoutable de bêtise, de faiblesse et de méchanceté ; Scuggs, un ami d'Emma qui lui ouvre les portes de son centre culturel afro-américain, sombre dans l'extrémisme anti-Blancs comme dans une religion ; d'autres, telles les mères d'Emma et de Seth, sont folles et pathétiques ; le président des USA est un monstre de cruauté servi par un médecin, descendant très certainement du Dr Mengele ; ou encore le conseiller de Melvin, horrible gnome qui se tripote joyeusement devant ses propres interviews à la télé... Bref. Ils ont des failles, certes, qui les rendent humains parfois, mais ces blessures ouvertes les poussent vers plus de souffrance et d'extrémisme. Noirs ou Blancs, leur vision du monde s'étrécit de plus en plus, la bêtise galopante les rattrape et les transforme en êtres dénués de sentiments, maléfiques et sans âme.

     Pourtant, Jake Lamar parvient, après une des dernières scènes du livre digne d'un tableau de Bosch, à faire surgir un petit espoir, une lueur simple et émouvante d'intelligence. Tout n'est pas perdu, alors, monsieur Lamar ? En tout cas, il semble encore faire meilleur chez nous, non ?

Bénédicte LOMBARDO
Première parution : 1/1/2006
dans Bifrost 41
Mise en ligne le : 5/1/2008

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