Le capitaine Oswald Bastable, brillant officier de l'Armée des Indes, victime d'une dangereuse drogue indienne, se trouve projeté dans l'avenir.
Au 20e siècle, très précisément.
Pas n'importe quel 20e siècle.
Rien à voir avec la pollution, le marché commun, les Nations Unies, la crise du Moyen-Orient, les pluies d'impôts, etc.
Non. Un 20e siècle où le plus léger que l'air a triomphé et qui vit en paix... jusqu'à l'heure où se manifeste O'Bean, le sorcier chilien.
Rien ne trouble encore l'harmonie raciale dans une Afrique du Sud gouvernée par Gandhi mais, au cœur du continent, l'Attila Noir se prépare à envahir le monde.
Les hordes de ses guerriers écrasent la flotte nippo-australienne avant de déferler sur l'Amérique.
Une Amérique régie par le Ku-Klux-Klan qui voit se dresser au-dessus de Washington, le Léviathan des Terres, un formidable rocher de Gibraltar monté sur chenilles.
Michael Moorcock, dans cette ahurissante suite du Maître des airs a réglé quelques comptes brûlants tout en libérant sa fantaisie et son humour le plus féroce.
Critiques
Après la plongée du capitaine Bastable dans un futur parallèle (Le seigneur des airs),en voici une dans un présent parallèle... Suite, ou autre variation mode rétro, ce second récit convainc moins que le premier : alors que dans le Seigneur,(traité du bout des lèvres par B dans Fiction 274) la forme (au premier degré un roman d'aventures riche en trouvailles et en suspense) et le fond (une réflexion plus profonde qu'il pouvait y paraître sur le pouvoir, la violence, la fin et les moyens en matière de Révolution) coïncidaient exactement, dans le Léviathan tout devient plus nonchalant, plus lointain, plus effleuré. Le récit, très linéaire dans sa progression, est trop académique pour qu'on s'attache vraiment au destin du héros et, politiquement, l'auteur s'est borné à étendre à toute sa trame un système d'inversion lui aussi sans surprise : le seul havre de paix et de justice de la planète est l'Afrique du Sud, les conquérants impérialistes sont les Noirs, l'Amérique est une nation sous-développée où sévit un chef de bande du nom de Kennedy, etc... Certes le gros Mike est capable de traiter à peu près bien n'importe quel genre ou sous-genre de la sf, mais il ne donne guère ici qu'un petit roman d'aventures agréable à lire, mais sans plus. Dommage.
Cette reprise en trois volumes de ce qui était au CLA : Les aventures uchroniques d'Oswald Bastable, permettra à de nombreux amateurs de découvrir une nouvelle facette du talent de l'auteur d'Elric de Nécromancien. Moorcock semble en vogue actuellement, puisque cette réédition suit de près la réédition en J'Ai LU du Chien de guerre, initialement paru chez Seghers, ouvrage qui ne manque pas de ressemblance avec la trilogie.
On y trouve le récit à la première personne, authentifié par le fait qu'il s'agirait de documents retrouvés et retravaillés par Moorcock. L'auteur s'effaçant derrière l'adaptateur (surtout lorsqu'il affirme que le premier récit fut dicté par le narrateur à son grand-père et seulement édité par lui) permet d'authentifier l'histoire. La méthode n'est pas nouvelle, mais donne déjà le ton de ce qui va suivre : une série d'incroyables aventures d'un officier anglais projeté de 1902 dans un univers parallèle, qui ne correspond en rien à celui que nous avons connu. Des dirigeables britanniques dominent ce monde en proie aux luttes politiques, des chrononautes sillonnent les pays et Hiroshima explose en 1973...
Cependant, ce récit alerte et brillamment raconté a pour but de mener une réflexion sur notre époque contemporaine et ses déchirements, passant du colonialisme anglais au socialisme russe. La réussite de Moorcock est de parvenir à un équilibre parfait où le discours ne parasite jamais la fiction, mais s'y mêle adroitement.
Il fournit en même temps un récit habilement mené grâce à un style qui passe allègrement du ton du suspense à celui de l'humour, qui se révèle tour à tour passionnant, grave ou sarcastique, ironique.
Ce n'est pas seulement le destin d'Oswald Bastable qui intéressera le lecteur, mais aussi celui d'autres personnages rencontrés au hasard des péripéties, comme cette mystérieuse voyageuse temporelle, Miss Una Persson, qui rencontre Moorcock pour lui faire lire la suite des aventures de Bastable rédigées par son grand-père. La façon également dont l'auteur parvient, alors que le récit se clôt sur lui-même, a avoir des nouvelles de son personnage principal ne cesse également de susciter la curiosité et permet en même temps de rappeler quelques données historiques pour mieux apprécier le parallèle qui sera fait par la suite.
Passionnant et intelligent.
note nooSFere : cette critique concerne les 3 romans de la série des aventures uchroniques d'Oswald Bastable, « Le seigneur des airs » Galaxie-bis n° 123, « Le Léviathan des terres » Galaxie-bis n° 125 et « Le Tsar d'acier » Galaxie-bis n° 127
Cité dans les Conseils de lecture / Bibliothèque idéale des oeuvres suivantesFrancis Valéry : Passeport pour les étoiles (liste parue en 2000) pour la série : Oswald Bastable / Nomade du temps